14ème législature

Question N° 98028
de M. Vincent Ledoux (Les Républicains - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Défense
Ministère attributaire > Défense

Rubrique > défense

Tête d'analyse > réservistes

Analyse > réserve opérationnelle. réglementation.

Question publiée au JO le : 26/07/2016 page : 6860
Réponse publiée au JO le : 13/09/2016 page : 8174

Texte de la question

M. Vincent Ledoux appelle l'attention de M. le ministre de la défense sur la mobilisation de la réserve opérationnelle dans le cadre de l'opération Sentinelle. Suite à l'annonce du Président de la République du maintien à haut niveau de l'opération Sentinelle, il sera fait appel à la réserve opérationnelle, qui doit permettre de faire face à la simultanéité des opérations et d'accroître la capacité des forces de l'ordre à durer, et ce en renforçant les unités d'active. Les réservistes ont ainsi reçu ce vendredi 15 juillet 2016 un mail leur confirmant leur sollicitation afin de renforcer le dispositif de protection et de sécurité de le territoire. Il s'avère que malgré la volonté de ceux-ci, leurs employeurs ne sont pas systématiquement enclins à leur permettre de répondre favorablement à cet appel. Publics ou privés, ceux-ci sont pourtant dans l'obligation légale de libérer les volontaires désireux de servir la réserve au moins cinq jours par an, avec suspension du contrat de travail et sans indemnisation du ministère de la défense. Le développement des missions des réservistes dans le contexte actuel va les amener de plus en plus à devoir se rendre disponibles pour leurs missions bien au-delà de ces cinq jours : une mission sentinelle dure entre trois et quatre semaines, les nécessités d'entraînement (tir, secourisme, combat, etc.) correspondent à une douzaine de jours par an, et il semblerait que les remontées de terrain confirment une position frileuse, voire hostile de certains employeurs, ces derniers tentant même de décourager les réservistes lorsqu'ils ne les incitent pas à utiliser leurs jours de congés payés pour remplir leurs missions au service de la Nation, voire à poser des congés sans solde. Les employeurs publics comme privés sont bien entendu soumis à de nombreuses contraintes, que ce soit en termes de continuité de service, de maintien de compétitivité et de productivité, avec des effectifs ne pouvant souvent répondre à leurs véritables besoins. Pour autant, la prolongation de l'état d'urgence doit aujourd'hui inciter collectivement à prendre davantage encore ses responsabilités. Quels moyens le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre afin de permettre aux réservistes de participer au renforcement des dispositifs de sécurisation du territoire français, sans qu'ils ne soient empêchés ou pénalisés dans le cadre de leurs activités professionnelles ? Il souhaiterait également savoir quels dispositifs incitatifs et facilitants peuvent ainsi être mis en place afin de permettre aux employeurs de gérer de manière plus sereine l'absence momentanée de collaborateurs au sein de leur organisation.

Texte de la réponse

La réserve militaire représente un renfort indispensable aux forces d'active pour qu'elles remplissent l'ensemble de leurs missions. Elle constitue également un relais vers la société civile et participe à la diffusion de l'esprit de défense. La rénovation du dispositif de la réserve opérationnelle, prévue par la loi no 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense, a pour objectifs une augmentation des effectifs à hauteur de 40 000 réservistes, ainsi qu'un élargissement des recrutements, en favorisant l'adhésion de personnes issues de la société civile. L'article L. 4221-4 du code de la défense définit les droits et obligations de l'employeur et du titulaire d'un engagement à servir dans la réserve opérationnelle, qu'il soit salarié de droit privé ou qu'il relève de la fonction publique. Ces droits et obligations sont fonction de la durée de l'activité de réserve opérationnelle effectuée au titre d'une année civile. Aux termes des dispositions de cet article, l'intéressé peut effectuer sur son temps de travail une activité de réserve opérationnelle de 5 jours maximum par année civile, à la seule condition de prévenir son employeur de son absence au moins un mois avant la date du début de cette activité. Au-delà de cinq jours, l'absence du réserviste est soumise à une autorisation de l'employeur. Dans l'hypothèse où ce dernier oppose un refus, il lui incombe de motiver sa décision et de la notifier au réserviste, ainsi qu'à l'autorité militaire, dans les quinze jours qui suivent la réception de la demande qui lui a été présentée. En cas de crise menaçant la sécurité nationale, et conformément aux dispositions de l'article L. 4221-4-1 du code précité, le ministre de la défense, ou le ministre de l'intérieur pour les réservistes de la gendarmerie nationale, peut prendre un arrêté qui a pour effet de porter de 5 à 10 par année civile le nombre de jours d'activité dans la réserve opposable à l'employeur. Dans ce même contexte, le délai de préavis peut être ramené de un mois à 15 jours. Le ministère de la défense est conscient du fait que l'emploi des réservistes (salariés ou agents publics) est soumis à des contraintes professionnelles qui limitent leur disponibilité. C'est la raison pour laquelle il cherche à établir et à consolider des liens avec les employeurs, cette démarche s'avérant fondamentale pour l'organisation et le rayonnement de la réserve opérationnelle. Dans ce contexte, diverses mesures ont d'ores et déjà été adoptées afin de faciliter l'accomplissement de périodes de réserve par les réservistes en renforçant le partenariat avec les employeurs. Les entreprises privées et organismes publics signataires avec le ministère d'une convention de soutien à la politique de la réserve militaire (344 conventions ont été conclues à ce jour) peuvent ainsi bénéficier, en contrepartie, d'avantages tels que l'attribution de la qualité de « partenaire de la défense nationale », conférée par arrêté du ministre de la défense, l'accès à des stages, notamment d'intelligence économique ou la délivrance d'informations relatives à la politique de défense et aux besoins des armées. De plus, lorsque l'employeur maintient tout ou partie de la rémunération du réserviste pendant son absence pour formation suivie dans le cadre de la réserve opérationnelle, la rémunération et les prélèvements sociaux afférents à cette absence sont admis au titre de la participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue. Concernant le secteur privé, il peut être signalé que le ministère de la défense a prévu de porter de 74 actuellement à 100 en 2019 le nombre des correspondants réserve entreprises défense, chargés de promouvoir l'esprit de défense et la réserve militaire auprès des acteurs de la vie sociale et économique et d'obtenir, de la part des employeurs, des conditions plus avantageuses pour les réservistes en termes de disponibilité et de réactivité. Le ministère de la défense travaille avec ses partenaires à créer les conditions d'un dialogue en vue de concilier le besoin de disponibilité des réservistes et les contraintes économiques auxquelles sont confrontées les entreprises et plus spécifiquement les PME. Enfin, un travail d'évaluation de la performance économique du réserviste, à titre individuel, mais également pour la société et pour son employeur, sera engagé avant la fin de l'année 2016. Les résultats de cette étude devraient permettre de valoriser l'emploi de réservistes, en particulier au regard du comportement aujourd'hui attendu des entreprises au titre de leur responsabilité sociétale. S'agissant du secteur public, le ministre de la défense a donné des directives aux services qui relèvent de son département afin qu'ils facilitent le renfort des forces armées par les réservistes. A cet égard, l'instruction no 230109/DEF/SGA/DRH-MD du 11 mars 2016relative à l'exercice par des personnels civils de la défense d'activités dans la réserve opérationnelle, publiée le 2 juin 2016 au Bulletin officiel des armées, prévoit que, dans le cadre des dispositions de droit commun et plus encore dans un contexte de crise menaçant la sécurité nationale, les agents publics civils réservistes opérationnels du ministère de la défense puissent, d'une part, disposer d'un nombre de jours d'activité accomplis pendant le temps de travail porté à 15 jours, au moins, par année civile, et, d'autre part, bénéficier d'un délai de préavis de l'employeur pouvant être réduit à 5 jours quand les circonstances le justifient. La possibilité d'appliquer ces aménagements devra être examinée au cas par cas, à l'aune des contraintes de service des intéressés et des responsabilités qu'ils exercent. Le ministère de la défense poursuivra ses efforts afin de propager cette dynamique auprès des différents employeurs de la fonction publique de l'État et de la fonction publique territoriale. En tout état de cause, les diverses mesures adoptées devront être accompagnées d'une sensibilisation accrue de tous les citoyens aux questions de défense nationale et notamment à l'existence et au rôle de la réserve militaire. Plusieurs axes de communication ont été mis en place dans ce but depuis l'été 2015 (journée nationale du réserviste, assises de la réserve, actions menées dans le cadre du salon de l'étudiant…) et seront développés au cours des prochaines années.