14ème législature

Question N° 99127
de M. Bernard Brochand (Les Républicains - Alpes-Maritimes )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > sécurité publique

Tête d'analyse > prévention

Analyse > système d'alerte et d'information des populations. fonctionnement.

Question publiée au JO le : 20/09/2016 page : 8308
Réponse publiée au JO le : 28/02/2017 page : 1834
Date de changement d'attribution: 07/12/2016

Texte de la question

M. Bernard Brochand attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les dispositifs de communication cellulaire d'alerte à la population dans le cadre de la prévention de risques naturels ou de menaces urgentes. Alors que l'application SAIP (système d'alerte et d'information des populations) a été mise en place le 8 juin 2016 par le ministère de l'intérieur, ses prérogatives sont apparues rapidement comme étant très limitées et requièrent des conditions d'utilisation très spécifiques. Elle ne s'adresse en effet qu'à une petite partie de la population cumulant la possession d'un smartphone (elle ne fonctionne pas sur les portables standards), l'installation volontaire de l'application et l'activation de la géolocalisation. À ce jour, aucune donnée chiffrée n'a d'ailleurs été communiquée quant au nombre officiel de téléchargements de cette application. En outre, son efficacité a très vite été remise en question au soir du 14 juillet 2016 lors du terrible attentat qui a frappé la ville de Nice. Le message d'alerte a été adressé à 1 heure 34 du matin soit 3 heures après l'attaque du camion sur la promenade des Anglais. Enfin, cette application ne signale actuellement que certains évènements comme les attentats, les risques nucléaires, les ruptures d'ouvrage hydraulique ou l'émanation de produits dangereux mais en aucune manière les catastrophes naturelles tels que les inondations, les crues, les séismes, les avalanches ou les tempêtes. Or le département des Alpes-Maritimes, et plus particulièrement le bassin cannois, a subi le 3 octobre 2015 la pire tempête que la région ait connue ces derniers siècles et les orages qui se sont abattus sur les Alpes-Maritimes ont malheureusement causé de nombreuses victimes. Il conviendrait donc, pour sauver d'innombrables vies, d'adopter un nouveau dispositif d'information de toutes les personnes présentes dans les zones touchées par ces évènements et de recourir à des techniques de diffusion cellulaire (cell broadcast) déjà déployées avec succès par de nombreux pays tels que l'Espagne, l'Italie, la Finlande, les Pays-Bas, la Chine ou les États-Unis. En effet, les opérateurs de communication ont aujourd'hui la possibilité d'isoler l'ensemble des cartes SIM connectées à leurs réseaux dans un périmètre donné même celles des touristes étrangers. La mise en place de cette méthode de diffusion cellulaire leur permettrait d'agir pour le compte de l'État en partenariat étroit avec les collectivités locales, en leur octroyant la possibilité d'émettre une alerte prévenant d'un péril imminent vers tous les abonnés sans exception à partir d'une antenne-relai. Il lui demande donc de bien vouloir indiquer les intentions du Gouvernement sur la possibilité d'utiliser les compétences des opérateurs de communications électroniques afin d'acheminer tout message utile pour avertir l'ensemble du public d'un péril nécessitant de ne pas approcher d'une zone déterminée ou de se confiner chez soi notamment en cas d'attaques terroristes ou de catastrophes naturelles.

Texte de la réponse

La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) du ministère de l'intérieur et le service d'information du Gouvernement (SIG) ont travaillé de concert au développement de l'application mobile d'alerte des populations lancée le 8 juin dernier. Si dans sa première version était principalement visée l'alerte en cas d'attentat (mais aussi d'autres crises pouvant être issues d'un attentat : nucléaire, produits dangereux, rupture de barrage hydraulique), les travaux se poursuivent également pour faire évoluer l'application, en intégrant notamment les autres risques de sécurité civile : inondations, feux de forêts, séismes, intempéries, tempêtes, cyclones, submersions marines, éruptions volcaniques. En outre, depuis le dysfonctionnement de l'application mobile SAIP le 14 juillet dernier, des travaux de fiabilisation et de sécurisation ont été menés à bien par le prestataire de l'application, travaux validés par un audit externe commandé par l'administration. A ce jour, plus de 700 000 téléchargements de cette application mobile ont été réalisés dont 58 % sur Apple store et 42 % sur Google Play. Les services de l'Etat se sont appuyés sur les conclusions d'un rapport inter inspections pour éclairer leur choix quant aux solutions à mettre en œuvre pour compléter le spectre de moyens d'alerte du système d'alerte et d'information des populations (SAIP). Le choix de développer une application mobile s'est imposé au regard de l'étude des gains attendus de chacune des solutions alternatives, à savoir le cell-broadcast et le sms géolocalisé. Ces deux solutions, sans pour autant être totalement écartées, n'ont pas été retenues dans l'immédiat du fait des nombreuses contraintes qu'elles présentent, lesquelles surpassent les bénéfices pouvant en être attendus. Ainsi, le cell-broadcast nécessiterait pour pouvoir être déployé en France, des investissements dont l'ampleur s'est révélée dissuasive. De plus et outre le coût très important qu'elle représente, cette technologie n'est pas prise en charge par l'ensemble des opérateurs, et n'est à ce jour pas compatible avec la norme 4G. C'est pourquoi cette option n'a, comme en Suisse, pas été retenue. Le sms géolocalisé présente quant à lui des difficultés d'ordre opérationnel. En effet, la diffusion massive de sms peut entraîner un ralentissement significatif du temps d'acheminement du message lié à la saturation des réseaux. Un tel ralentissement n'est pas acceptable dans le cadre de la diffusion d'une alerte. Par ailleurs, un sms géolocalisé ne se distingue pas d'un sms classique, et risquerait donc de ne pas être efficace en tant que vecteur d'alerte devant impérativement être reconnu comme tel. Par ailleurs, pour être possible, la diffusion de sms nécessite la tenue d'un annuaire dynamique mettant à la disposition des pouvoirs publics les numéros de téléphone des personnes présentes sur une zone donnée, ce qui pourrait être vécu comme une intrusion dans la vie privée des destinataires et pourrait donc paraître attentatoire aux libertés individuelles. Enfin, cette option présente un coût non négligeable pour l'administration. Ainsi, l'envoi d'une seule alerte sur l'ensemble de l'Ile-de-France coûterait plus de 350 000 €. Le choix du développement d'une application mobile s'est donc imposé. Le coût de l'application s'est élevé à 408 960 € TTC, prix qui inclut le développement, l'hébergement et la maintenance de l'application. Pour porter un message d'alerte des pouvoirs publics, il n'a pas été possible de s'appuyer sur une application existante. Aucune ne pouvait garantir aux utilisateurs l'absence de remontées de données personnelles, exigence qui constitue un point crucial pour que l'application ne puisse pas être soupçonnée d'être un outil de surveillance déguisé et faciliter ainsi son appropriation par le grand public. Le développement d'une application spécifique, dédiée au besoin propre de la sécurité civile et répondant à l'ensemble des critères de confidentialité et de sécurité en matière de sauvegarde de l'intégrité du dispositif s'est donc révélé nécessaire. Enfin, la géolocalisation reste une option, qui peut être remplacée par la définition de lieux favoris dont l'utilisateur souhaiterait recevoir les alertes en l'absence de géolocalisation. En tout état de cause, parmi les exigences fonctionnelles de cette application, figure la nécessité d'une faible consommation de batterie. Néanmoins, le champ des technologies de téléphonie mobile étant très évolutif, l'administration s'attachera à réévaluer ses choix quand cela s'avérera nécessaire.