Indemnisation des militaires victimes de l'amiante
Question de :
Mme Nicole Dubré-Chirat
Maine-et-Loire (6e circonscription) - La République en Marche
Mme Nicole Dubré-Chirat attire l'attention de Mme la ministre des armées sur la situation des militaires touchés par une affection liée à l'amiante ainsi que sur celles des anciens militaires reconvertis dans le privé et également malades de l'amiante. Ces deux catégories de malades, exposés à l'amiante durant leur carrière militaire, semblent en effet souffrir de difficultés dans l'indemnisation de leur invalidité. Le premier obstacle concerne ceux reconvertis dans le secteur privé sans droit à pension. Ceux-ci ne peuvent en effet bénéficier de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA), bien qu'ils aient accompli des travaux identiques à ceux y ouvrant droit. En 2014, le Gouvernement envisageait pourtant, sans que cela soit suivi d'effets pour le moment, de réformer l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 instituant l'ACAATA afin d'en faire bénéficier aussi les anciens militaires reconvertis dans le privé. Le second obstacle concerne la reconnaissance de l'incurabilité des maladies de l'amiante par le code des pensions militaires d'invalidité (PMIVG). Bien qu'il n'existe aucun traitement médical pour les affections liées à l'amiante, les militaires ne peuvent prétendre qu'à des pensions d'invalidité temporaires. Ceux-ci doivent déposer un dossier tous les 3 ans et renouveler ainsi la procédure jusqu'à quatre fois avant de pouvoir toucher une pension d'indemnisation définitive. Réviser le code des PMIVG afin que soit reconnu dès la première expertise médicale le caractère incurable des maladies de l'amiante permettrait de simplifier cette procédure et de mieux prendre en compte les souffrances de ces militaires. Ainsi, elle lui demande ce que le Gouvernement entend faire face aux difficultés que rencontrent les anciens militaires dans l'indemnisation de leurs affections liées à l'amiante.
Réponse publiée le 11 septembre 2018
L'article 41 de la loi no 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 a ouvert, sous certaines conditions, le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, ainsi qu'aux ouvriers dockers professionnels et personnels portuaires assurant la manutention. Les listes mentionnant les établissements, les périodes ainsi que les métiers de la construction et de la réparation navales susceptibles d'ouvrir droit à l'ACAATA ont été fixées par un arrêté du 7 juillet 2000 modifié. Par la suite, un dispositif similaire d'allocation spécifique de cessation anticipée d'activité (ASCAA) a été institué par l'État et étendu progressivement à certains ouvriers de l'État relevant du régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État ainsi qu'à certains fonctionnaires et agents non titulaires relevant du ministère de la défense et du ministère chargé de la mer, respectivement par décrets no 2001-1269 du 21 décembre 2001, no 2006-418 du 7 avril 2006 et no 2013-435 du 27 mai 2013. Par ailleurs, l'article 146 de la loi no 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, publiée au Journal officiel du 30 décembre 2015, a instauré un dispositif de cessation anticipée d'activité applicable aux fonctionnaires et agents contractuels de droit public reconnus atteints, au titre de leur activité au sein de la fonction publique de l'État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière, d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante. Depuis la publication de ces dernières dispositions, seuls les militaires ne bénéficiaient pas d'un dispositif de cessation anticipé d'activité en cas de maladie liée à l'amiante. L'article 134 de la loi no 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 a en conséquence modifié l'article 146 de la loi du 29 décembre 2015 précitée, pour permettre aux militaires reconnus atteints, au titre de leur activité en qualité de militaire, d'une maladie provoquée par l'amiante de demander à bénéficier d'une cessation anticipée d'activité et à percevoir à ce titre une allocation spécifique. Cette allocation peut se cumuler notamment avec une pension militaire d'invalidité. Il est rappelé à cet égard que les militaires et anciens militaires sont éligibles, au titre du droit à réparation, à une pension militaire d'invalidité indemnisant une pathologie imputable à une exposition à l'amiante. Le décret no 2018-546 du 28 juin 2018 relatif à la cessation anticipée d'activité des militaires reconnus atteints d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante précise les modalités d'application de ces dispositions aux intéressés, s'agissant en particulier des conditions d'âge. Par ailleurs, il est souligné que pour toute infirmité consécutive à une blessure ou à une maladie contractée en service et susceptible d'ouvrir droit à une pension militaire d'invalidité (PMI) au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), le taux de la pension est déterminé consécutivement à une expertise médicale effectuée par un médecin expert désigné par la sous-direction des pensions (SDP) du ministère des armées. Le médecin expert détermine également le caractère incurable ou non de l'affection, au regard de l'existence éventuelle de traitements de nature à améliorer la situation médicale du demandeur de la pension. La pension est accordée à titre définitif lorsque l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. A défaut, elle est concédée pour une période de trois ans à compter de la date d'entrée en jouissance de la pension. Concernant les maladies, la pension temporaire est convertible en pension définitive au terme d'une ou plusieurs périodes de trois ans et en fonction des examens médicaux qui ont été pratiqués. L'article R. 121-5 du CPMIVG prévoit à cet égard qu'à l'expiration d'un délai de neuf ans à compter de la date d'entrée en jouissance de la pension, la situation du pensionné doit être définitivement fixée, soit par la conversion de la pension temporaire en pension définitive, soit par la suppression de toute pension. Il est également précisé que les maladies liées à l'amiante peuvent être regroupées en deux types d'affections : les plaques pleurales d'une part, les cancers du poumon et mésothéliomes d'autre part. S'agissant des plaques pleurales constatées radiologiquement, la SDP attribue depuis 2015 une pension définitive, par convention avec le service des retraites de l'État, en raison du caractère incurable médicalement reconnu de ces affections. Cette pension est fixée dès la première demande au taux minimum de 30 %, même en l'absence de répercussion fonctionnelle et nonobstant l'existence d'éventuels antécédents tabagiques. Dans le cas des cancers et des mésothéliomes, qui constituent des pathologies évolutives, la pension est concédée à titre définitif si le taux de l'infirmité atteint 100 % et si le malade suit un traitement. Si le malade est uniquement sous surveillance médicale et que le taux de l'infirmité est évalué à moins de 100 %, la pension est attribuée à titre temporaire pour trois ans. L'intéressé devra alors solliciter le renouvellement de sa pension, qui pourra être consolidée à titre définitif selon les modalités décrites ci-dessus. Dans ce contexte, chaque demande de pension formulée au titre d'une infirmité liée à l'inhalation de poussières d'amiante fait l'objet d'une étude particulièrement attentive et approfondie de la part de la SDP. Toutefois, la réalité médicale ne permettant pas de reconnaître de manière générale le caractère incurable des maladies provoquées par l'amiante, il n'est pas envisagé de modifier le CPMIVG dans le sens souhaité par l'honorable parlementaire. Il est néanmoins souligné que depuis le 1er janvier 2018, les militaires bénéficient d'une présomption d'imputabilité au service d'une maladie provoquée par l'amiante si celle-ci figure au nombre des maladies professionnelles répertoriées dans les tableaux prévus à l'article L. 461-2 du code de la sécurité sociale et si elle a été contractée par le militaire dans l'exercice ou à l'occasion du service dans les conditions mentionnées par ces mêmes tableaux.
Auteur : Mme Nicole Dubré-Chirat
Type de question : Question écrite
Rubrique : Maladies
Ministère interrogé : Armées
Ministère répondant : Armées
Dates :
Question publiée le 17 juillet 2018
Réponse publiée le 11 septembre 2018