15ème législature

Question N° 10903
de M. Louis Aliot (Non inscrit - Pyrénées-Orientales )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > sécurité des biens et des personnes

Titre > Armes à feu : lutter contre les filières illégales

Question publiée au JO le : 17/07/2018 page : 6286
Réponse publiée au JO le : 30/10/2018 page : 9765
Date de changement d'attribution: 16/10/2018

Texte de la question

M. Louis Aliot attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur la réglementation relative à la détention d'armes à feu. Le décret n° 2018-542 du 29 juin 2918 relatif au régime de la fabrication, du commerce, de l'acquisition et de la détention des armes, est le décret d'application de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018, transposition de plusieurs directives européennes décidées après les attaques islamistes de janvier et de novembre 2015 à Paris, lors desquelles les terroristes ont fait usage d'armes à feu automatiques. Afin d'intensifier la lutte contre le terrorisme, la Commission européenne et le Conseil ont décidé, sous l'impulsion de l'ancien ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, de durcir la législation européenne concernant l'acquisition et la détention des armes à feu par les particuliers, sportifs, chasseurs et collectionneurs, laquelle était pourtant déjà très restrictive en France, comme dans la plupart des pays limitrophes membres de l'Union européenne. Pour atteindre cet objectif, le Parlement européen a adopté la révision de la directive 91/477/CEE du Conseil du 18 juin 1991 relative au contrôle de l'acquisition et de la détention d'armes à feu, désormais transposée et applicable en droit français. S'il soutient évidemment le contrôle strict de la circulation d'armes à feu en France, il s'interroge sur l'opportunité d'une transposition dans la législation française d'un texte qui semble surtout s'attaquer aux chasseurs et aux tireurs sportifs. En effet, les terroristes islamistes et les criminels n'achètent pas leurs armes sur le marché légal des armes à feu où l'usager et le détenteur sont soumis à des autorisations et des contrôles difficiles, tant sur le plan administratif que sur le plan médical. À la suite de la disparition de la Yougoslavie, 100 millions de fusils d'assaut AK-47 (plus connus sous le nom de « kalachnikov ») auraient ainsi disparu dans la nature. On estime pareillement que près de 10 millions d'armes à feu illégales circuleraient actuellement en France. En outre, les armes utilisées lors des attaques terroristes susmentionnées avaient été achetées via la filière des Balkans ou en provenaient. Le terrorisme islamiste et le grand banditisme utilisent les mêmes marchés parallèles, sur lesquels nous n'avons que peu de prises et peu d'informations. Il se dit même, dans certaines cités, qu'il serait plus facile de se procurer une « kalach' » qu'un fusil de chasse. Ses questions sont donc les suivantes : un durcissement supplémentaire de la législation concernant le marché légal des armes à feu pourrait-il alimenter mécaniquement le trafic illégal ? Les directives européennes avaient pour objectif d'intensifier la lutte contre le terrorisme islamiste et ses moyens d'approvisionnement en armes à feu. Il lui demande en quoi s'attaquer aux détenteurs légaux d'armes à feu, majoritairement des chasseurs et des tireurs sportifs, permettrait de remplir ce louable objectif et si le rétablissement des contrôles aux frontières ne serait pas un meilleur moyen de lutter contre la circulation d'armes à feu illégales au sein de l'Union européenne.

Texte de la réponse

Sur initiative de la France, au lendemain des attentats de Paris de janvier 2015, la modification de la directive 91/477/CEE du Conseil du 18 juin 1991 relative au contrôle de l'acquisition et de la détention d'armes par la directive 2017/853 du 17 mai 2017 s'est inscrite dans une dynamique globale visant à renforcer la lutte contre le trafic illégal d'armes à feu. Des mesures de transposition ont été adoptées pour mieux encadrer les régimes légaux d'acquisition et de détention des armes à feu. Parallèlement, des mesures dépassant le cadre strict de cette directive ont été prises dans une double logique de renforcement de la protection des citoyens et de simplification administrative, en sécurisant les conditions de vente des armes à feu entre particuliers ou encore en allégeant certaines formalités pour les chasseurs et les tireurs sportifs en matière de réducteurs de son ou d'acquisition d'armes de catégorie C. D'autres initiatives tendent à renforcer la lutte contre le trafic illégal d'armes à feu. Sans prétendre à l'exhaustivité, il convient de rappeler que l'Union européenne a modifié le 5 mars 2018 le règlement d'exécution 2015/2403 du 15 décembre 2015 pour augmenter les normes de neutralisation des armes, afin notamment d'assurer que des armes neutralisées ne pourraient être facilement transformables et réutilisées à des fins criminelles. Le Gouvernement a participé activement à l'adoption de ce règlement européen établissant des standards minimaux communs en matière de neutralisation des armes à feu. De la même façon, la France participe activement aux travaux européens en vue de s'assurer que les armes d'alarme ou de signalisation – dont certaines ont été utilisées dans des attentats terroristes – ne puissent être utilisées à des fins létales. Le Parlement s'apprête enfin à autoriser l'adhésion au protocole contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu, additionnel à la convention des Nations-Unies contre la criminalité transnationale, adopté à New York le 31 mai 2001. Ce protocole constitue le premier accord international juridiquement contraignant visant spécifiquement à contrôler les armes à feu et à lutter contre les trafics illicites. Pleinement mobilisé, le Gouvernement s'efforce constamment de rechercher l'efficacité en réglementant le marché légal d'armes à feu tout en oeuvrant au quotidien sur le plan international et national pour prévenir et combattre le trafic illicite des armes à feu. La lutte contre la menace terroriste est, par ailleurs, une préoccupation majeure comme en témoigne notamment la décision prise depuis 2015 de rétablir les contrôles aux frontières nationales.