15ème législature

Question N° 10974
de M. Michel Larive (La France insoumise - Ariège )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > animaux

Titre > Le braconnage des éléphants à des fins commerciales

Question publiée au JO le : 24/07/2018 page : 6596
Réponse publiée au JO le : 22/01/2019 page : 687
Date de changement d'attribution: 05/09/2018

Texte de la question

M. Michel Larive attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur le braconnage des éléphants à des fins commerciales. Les défenses des éléphants, nécessaires à leur survie, attisent la convoitise de nombreux braconniers pour alimenter le marché de l'ivoire, causant la mort de 20 000 éléphants chaque année, soit 55 éléphants tués par jour. La population d'éléphants a chuté de plus d'un tiers en 7 ans, atteignant un effectif extrêmement bas. L'existence d'un marché légal dans l'Union européenne (UE) stimule la demande d'ivoire, pour la fabrication d'objets de décoration ou de bijoux, et est en train de pousser les éléphants vers l'extinction. Cependant, une prise de conscience émerge au sein des peuples européens. 72 % des Français sont favorables à une interdiction totale du commerce de l'Ivoire, selon un sondage IFOP commandé par IFAW en avril 2017. Après un débat houleux, la France a fait une avancée majeure. Par un décret du 16 avril 2016, elle a complètement interdit le commerce de l'ivoire brut sur son territoire et a restreint le commerce de l'ivoire travaillé. Toutefois, cette avancée majeure risque aujourd'hui d'être remise en cause par la volonté de valoriser les métiers de l'ivoire. Il semble que le Gouvernement souhaite mettre en place un accompagnement et un dispositif de reconversion du métier d'ivoirier dans un but de relancer ces métiers artisanaux. Mais un accroissement du nombre d'ivoiriers favorisera le maintien, voire la hausse de la demande d'ivoire. Or, comme l'ont démontré Lusseau D et Phyllis C. dans leur étude de 2016, intitulée Can we sustainably harvest ivory ?, pour que le commerce de l'ivoire soit écologiquement soutenable, il faudrait prélever environ trois fois moins d'ivoire que ce qui est fait actuellement. Alors certes le marché légal peine à fournir la demande mondiale en ivoire, ce qui encourage effectivement les actes de braconnage, mais il semble que le seul moyen de sauvegarder durablement les populations d'éléphants serait de mettre en œuvre des mesures visant à réduire la demande en ivoire. C'est la raison pour laquelle les associations de défense des animaux s'interrogent sur la cohérence de ses décisions. D'un côté la France interdit le commerce d'ivoire sur son territoire, et de l'autre elle envisage de favoriser la transmission du métier d'ivoirier. La position de la France doit être plus claire. Elle se doit de jouer un rôle central pour la sauvegarde des éléphants et la lutte contre le braconnage, en portant un message fort afin d'être l'une des voix influentes au sein de l'UE sur ce sujet. En 2017, la Commission européenne a publié un document dans lequel elle incite les États membres à interdire les exportations de l'ivoire brut. Malgré le travail remarquable du Conseil de l'environnement, qui aux côtés du Royaume-Uni, agit afin d'interdire complètement le commerce de l'ivoire brut sur le territoire européen, la position de l'UE est encore trop timide. Il est nécessaire d'aller plus loin. L'UE doit interdire dans les plus brefs délais l'importation, les exportations et la vente domestique de l'ivoire, en mettant en place des sanctions juridiques fortes. Considérant ces éléments, il aimerait savoir quelles sont les mesures concrètes qu'il envisage de mettre en place afin d'œuvrer à la protection des éléphants.

Texte de la réponse

Au plan national, la France s'inscrit depuis plusieurs années dans l'effort collectif de réduction de la demande en ivoire. Elle a cessé d'exporter des défenses d'éléphants depuis le 27 janvier 2015. S'agissant du commerce intérieur, l'arrêté du 16 août 2016 relatif à l'interdiction du commerce de l'ivoire d'éléphant et de la corne de rhinocéros a institué un régime particulièrement strict, les possibilités de commerce d'objets en ivoire étant extrêmement limitées. Cet arrêté ne permet plus la création de pièces en ivoire travaillé, à l'exception de certaines composantes d'instrument de musique. D'autre part, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages permet désormais des enquêtes sous pseudonyme, renforce la coopération entre services, cible en particulier la cybercriminalité et augmente considérablement les sanctions en cas d'infractions. Ces dispositions s'appliquent notamment au commerce de l'ivoire. Au plan européen, des lignes directrices ont été publiées le 17 mai 2017 au Journal officiel de l'Union européenne (EU) suspendent les expéditions d'ivoire brut hors de l'Union à compter du 1er juillet 2017. Elles durcissent également les conditions de dérogations ponctuelles à l'interdiction de commerce actuellement en vigueur au sein de l'UE pour tous les objets en ivoire d'éléphant, hormis les antiquités. La Commission européenne travaille maintenant à déterminer si l'Union doit mettre en place des restrictions supplémentaires, eu égard à l'objectif de réduction du braconnage de l'éléphant et du trafic international de l'ivoire. Pour évaluer l'impact de telles mesures, les données concernant le commerce intérieur de l'ivoire et son utilisation dans les 28 États membres, ainsi que les résultats de la consultation publique réalisée par la Commission européenne (du 15 septembre au 8 décembre 2017), ont été analysées par la Commission. Selon les données actuellement disponibles, l'Union ne constituerait pas un marché pour l'ivoire braconné ces dernières années. En effet, les infractions constatées dans l'Union ou en frontières résultent de lacunes documentaires pour de l'ivoire ancien ou concernent de l'ivoire africain en transit vers l'Asie via l'Union européenne, mouvements déjà totalement interdits par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES). Au plan international, la France est engagée depuis décembre 2013 au plus haut niveau en faveur de la sauvegarde des éléphants, ainsi que dans la lutte contre le braconnage et les trafics associés. Elle soutient le Consortium international de lutte contre la criminalité des espèces sauvages, le programme mondial pour la lutte contre la criminalité faunique et forestière de l'Office des nations unies contre la drogue et le crime, et le Fonds pour l'éléphant d'Afrique. Elle finance des actions de protection de la grande faune et de lutte anti-braconnage au Gabon et au Mozambique, à hauteur de 10 et 8.5 millions d'euros, respectivement. Elle apporte enfin un soutien actif à Interpol par la mise à disposition d'un expert technique international.