15ème législature

Question N° 10990
de M. Michel Larive (La France insoumise - Ariège )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > bois et forêts

Titre > Coopératives forestières et professionnels indépendants

Question publiée au JO le : 24/07/2018 page : 6519
Réponse publiée au JO le : 08/01/2019 page : 95
Date de changement d'attribution: 31/07/2018

Texte de la question

M. Michel Larive attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'existence d'une distorsion de concurrence entre les coopératives forestières et les professionnels indépendants. Élaboré en 2001, le dispositif DEFI-Forêt (dispositif d'encouragement fiscal à l'investissement) a pour but de favoriser l'investissement forestier, et d'inciter les propriétaires à gérer et à valoriser leur forêt de manière durable. Le dispositif propose par exemple des modalités d'assurance face aux intempéries (DEFI Assurance), ou un modèle de contractualisation avec les professionnels du secteur (DEFI Contrat), qui ouvre droit à un crédit d'impôt pour les propriétaires forestiers. Il prévoit aussi une réduction d'impôts sur le revenu pour l'acquisition de bois et forêts, sous certaines conditions (DEFI Acquisition). Mais selon l'association nationale des techniciens et gestionnaires forestiers indépendants (ANATEF), depuis 2014, la situation a évolué au détriment des propriétaires forestiers voulant gérer leurs forêts avec l'aide des techniciens forestiers indépendants. En effet, les coopératives forestières, qui ne concernent que 3 % des propriétaires forestiers français, bénéficient d'avantages très importants. Pour accéder au dispositif DEFI Travaux, la surface minimale est fixée à 10 ha pour un propriétaire isolé, mais elle est abaissée à 4 ha pour les coopératives forestières. Les coopératives bénéficient également d'un taux de crédit d'impôt plus intéressant pour les DEFI Travaux et les DEFI Contrat. Ce taux passe de 18 % pour un propriétaire forestier faisant intervenir un technicien forestier indépendant à 25 % pour une coopérative forestière. Toujours dans une volonté de favoriser ces coopératives, le DEFI Contrat prévoit la conclusion de contrats de gestions qui n'imposent pas aux propriétaires de disposer d'une surface minimale, mais sont conditionnés à l'existence de contrats d'approvisionnement pour pouvoir commercialiser les coupes de bois. Or les techniciens forestiers indépendants ne peuvent pas signer ce genre de contrats car ils ne font pas d'achat, ni de revente du bois qu'ils ont en gestion. Dans les faits, seules les coopératives forestières peuvent donc bénéficier de ce dispositif. La loi de finances rectificatives pour 2017 a reconduit le dispositif DEFI jusqu'en 2020, mais sans rectifier les inégalités mentionnées précédemment. Pis, l'article 16 aggrave encore l'iniquité d'accès en faveur des coopératives forestières en supprimant totalement le seuil permettant de bénéficier du DEFI Travaux pour les coopératives, alors qu'il est maintenu pour les techniciens forestiers indépendants. Les avantages importants concédés aux coopératives forestières créent une situation de concurrence déloyale entre les professionnels de la forêt, et met les techniciens forestiers indépendants en difficulté. Considérant ces éléments, il lui demande de justifier les avantages consentis aux coopératives forestières au détriment des propriétaires indépendants, et de proposer des mesures visant à réduire ces iniquités de traitement.

Texte de la réponse

Le dispositif d'encouragement fiscal à l'investissement forestier (« DEFI-Forêt) comprend, d'une part, une réduction d'impôt sur le revenu en faveur de l'investissement forestier, concernant les acquisitions en bois et forêts (volet « acquisition ») et les cotisations d'assurance versées pour couvrir les domaines forestiers, notamment contre les tempêtes (volet « assurance »), et, d'autre part, un crédit d'impôt sur le revenu portant sur les travaux forestiers (« volet travaux ») et les rémunérations dans le cadre d'un contrat de gestion (volet « contrat »). Le bénéfice de ce dispositif est particulièrement conditionné à des engagements en matière de gestion durable des bois et forêts et de conservation pendant un certain délai des parcelles acquises ou des parts de groupements forestiers et de sociétés d'épargne forestière détenues. S'agissant plus spécifiquement du crédit d'impôt sur le revenu, prévu à l'article 200 quindecies du code général des impôts (CGI), son taux est porté de 18 % à 25 % du montant des travaux réalisés (volet « travaux ») ou du montant des rémunérations versées (volet « contrat ») pour les adhérents à une organisation de producteurs et pour les membres d'un groupement d'intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF). En outre, les travaux éligibles à cet avantage fiscal sont ceux réalisés soit dans une unité de gestion d'au moins dix hectares d'un seul tenant, soit sans seuil plancher pour les propriétés regroupées au sein d'un GIEEF ou, depuis le 1er janvier 2018 (article 26 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017) au sein d'une organisation de producteurs. Cette différence de traitement entre les propriétaires forestiers regroupés dans des structures d'organisation économique et les autres propriétaires forestiers se justifie par l'objectif même du dispositif qui est de lutter contre le morcellement des propriétés forestières privées et d'inciter les propriétaires forestiers à réaliser les actes nécessaires à la gestion durable de leurs forêts. Or en la matière, le principal handicap de la forêt française est son morcellement, défavorable à une bonne gestion. C'est pour cette raison qu'une attention toute particulière est portée aux plus petites propriétés forestières, par le biais du crédit d'impôt sur le revenu, en incitant leur gestion en commun dans une structure de regroupement de type organisation de producteurs ou GIEEF. Étendre ces avantages aux propriétés non incluses dans de telles structures reviendrait à augmenter le coût budgétaire de la mesure, et surtout à la priver de son effet incitatif au regroupement de la gestion des petites propriétés. Une telle mesure ne répondrait pas à l'objectif de lutte contre le morcellement de la propriété privée et donc à une politique de gestion durable de la forêt.