15ème législature

Question N° 11515
de M. Daniel Labaronne (La République en Marche - Indre-et-Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > eau et assainissement

Titre > Financement des agences de l'eau

Question publiée au JO le : 07/08/2018 page : 7097
Réponse publiée au JO le : 16/10/2018 page : 9424
Date de changement d'attribution: 05/09/2018

Texte de la question

M. Daniel Labaronne interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'avenir à moyen terme des opérateurs de l'eau et de la biodiversité et sur le financement à court terme des agences de l'eau. Par lettre du 3 novembre 2017, le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'action et des comptes publics ont chargé le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et l'inspection générale des finances (IGF) : « d'effectuer une revue des opérateurs de l'eau et de la biodiversité et un bilan des démarches existantes en matière de rationalisation ou de mutualisation ; d'étudier des propositions hiérarchisées de scénarios d'évolutions structurelles de ces organisations ; d'étudier également des propositions de simplification de certaines missions assurées par ces opérateurs ». S'agissant de la mise en œuvre des politiques publiques par les opérateurs, le rapport présenté au mois d'avril par l'IGF et le CGEDD dresse le constat précis de politiques de l'eau et de la biodiversité construites par accumulation d'objectifs, sans que soit posée la question de l'adéquation des mission et des moyens, aboutissant à des juxtapositions dépourvues de cohérence. S'agissant plus particulièrement des agences de l'eau, les inspections soulignent que les prélèvements opérés par l'État, plusieurs années de suite, sur les ressources accumulées, ont été répartis entre les agences sans tenir compte des niveaux de leurs fonds de roulement mettant en grande difficulté certaines d'entre-elles, comme les agences de l'eau Loire-Bretagne et Rhône-Méditerranée-Corse ; que ces prélèvements conjugués à la baisse prévisionnelle du produit des redevances et à la baisse des retours d'avance remboursables induisent une diminution moyenne de 15 % des autorisations de programme pour les aides financières entre les Xe et les XIe programmes, dépassant même les 20 % pour trois agences. Les inspections constatent qu' « alors que la politique de l'eau doit atteindre des objectifs de résultats dument identifiés, la fixation de leurs ressources ignore ce cadre et répond, principalement sinon uniquement, à des considérations de finances publiques et de prélèvements obligatoires ». Elles notent : qu' « à aucun moment, les prescriptions législatives ne font le lien entre les résultats obtenus par les agences de l'eau et l'état d'avancement de leurs programmes » et qu' « à cet égard, les dispositions de la loi de finances pour 2018 relatives à l'abaissement du plafond annuel, pour brutales qu'elles paraissent, ne font que poursuivre des errements antérieurs ». Enfin, que si « le principe « pollueur-payeur » est présenté comme une des colonnes du temple, la réalité montre que la gouvernance des agences privilégie, dans ses choix, une fiscalité de rendement, au détriment des usagers domestiques. Ainsi, en 2016, les usagers domestiques acquittaient près de 86 % du produit total des redevances, une quotité qui n'est pas justifiée par la responsabilité de ces usagers en matière de pollution ». Au regard de ces éléments, il l'interroge sur ses intentions quant aux différents scénarios d'évolution avancés par l'IGF et le CGEDD pour une mise en cohérence de l'action publique dans les domaines de l'eau et de la biodiversité et sur les dispositions qu'il entend proposer à la représentation nationale pour sécuriser à court terme les capacités d'intervention des agences de l'eau les plus fragiles, notamment dans le cadre du projet de loi de finances 2019.

Texte de la réponse

Faisant suite au rapport conjoint de l'inspection générale des finances (IGF) et du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) sur l'avenir des opérateurs de l'eau et de la biodiversité, dont les conclusions sont parues en avril dernier, une lettre de cadrage complémentaire à celle du 28 novembre 2017 a été envoyée aux présidents des comités de bassin prenant en compte certaines recommandations formulées par les auditeurs. Cette seconde lettre de cadrage intègre également les dispositifs issus du plan biodiversité et des conclusions de la première phase des Assises de l'eau. En premier lieu, cette deuxième lettre de cadrage rappelle l'intérêt de l'organisation actuelle des agences par grand bassin hydrographique. Elle invite toutefois les agences à poursuivre et amplifier les démarches de mutualisation inter-agences et de dématérialisation, à faire évoluer leur organisation et notamment la répartition des activités entre délégations territoriales et siège. Concernant les moyens des agences de l'eau, leur plafond de redevance a été fixé à 12,63 milliards d'euros sur 6 ans (soit 2,105 milliards d'euros par an). Ce plafond, qui se situe à un niveau intermédiaire entre celui des 9èmes et 10èmes programmes d'intervention (respectivement 11,4 et 13,6 milliards d'euros), fait à la fois participer les agences de l'eau à l'objectif de maîtrise des dépenses publiques et de limitation de la pression fiscale qui pèse sur les Français et les entreprises et leur donne la capacité à agir dont elles ont besoin pour leur action en faveur de la reconquête de la qualité des eaux. Le rapport IGF-CGEDD ayant de plus mis en évidence qu'un ajustement dans la déclinaison de ce cadrage budgétaire était nécessaire, afin notamment de permettre aux agences de l'eau les plus fragiles de recouvrer une pleine capacité d'intervention, plusieurs mesures en ce sens vont figurer dans le projet de loi de finances pour 2019 : - la première mesure consiste en un rééquilibrage des ressources par agence, qui s'effectuera de façon progressive sur 2019 et 2020 pour se stabiliser à partir de 2021, et se traduit dans des cibles de recettes de redevance par agences mieux équilibrées entre elles ; - la deuxième mesure porte sur la clef de répartition des contributions des bassins au financement des opérateurs de la biodiversité : celle-ci va être modifiée afin de revenir à la clef utilisée jusqu'en 2017 pour le financement de l'office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) puis de l'agence française pour la biodiversité (AFB) ; - la troisième mesure concerne la redevance pour pollution diffuse qui sera relevée de 50 millions d'euros dès 2019 (sous plafond) afin de financer l'agriculture biologique, relèvement qui contribuera notamment à diversifier les ressources des agences de l'eau en leur apportant des moyens plus directement liés à la préservation de la biodiversité, qui est affectée par les produits phytopharmaceutiques et à rétablir progressivement les principes « l'eau paye l'eau » et « pollueur-payeur ». En parallèle, le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, souhaite une refonte du système de redevances pour en faire un réel outil de fiscalité environnementale, comme le rapport IGF-CGEDD le préconise. En ce sens, les redevances pour pollution d'origine domestique et modernisation des réseaux seront rénovées pour se rapprocher davantage du dispositif en vigueur pour les redevances industrielles avec une application dès les 12èmes programmes d'intervention. Cette refonte s'accompagnera de la suppression progressive des primes pour performance épuratoire d'ici la fin des 11èmes programmes. Enfin, le recentrage des interventions des agences de l'eau sur les actions de connaissance, de planification et de gouvernance, la solidarité territoriale dans le « petit cycle » et les interventions en faveur du « grand cycle », de la biodiversité et du milieu marin seront accentuées dans les 11èmes programmes et se poursuivront dans les 12èmes programmes. Ces mesures consacreront l'évolution du rôle des agences de l'eau d'une fonction de « mutuelle de l'eau » vers un rôle d'opérateur de la politique d'accompagnement du changement climatique, de préservation de la biodiversité en lien avec les enjeux propres à la gestion de l'eau et de mise en œuvre des objectifs de la directive cadre sur l'eau. Concernant les autres opérateurs de l'eau et de la biodiversité, et plus spécifiquement l'AFB et l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), le Gouvernement a décidé la création en 2020 d'un nouvel opérateur d'envergure nationale issu de la fusion de ces deux établissements. Un projet de loi sera prochainement soumis à la représentation nationale.