Effets de l'activité humaine sur les fonds marins
Question de :
Mme Caroline Janvier
Loiret (2e circonscription) - La République en Marche
Mme Caroline Janvier alerte M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les effets de l'activité humaine sur les fonds marins. En effet, la revue Current biology révèle, dans une étude en date du 26 juillet 2018, qu'il reste seulement 13 % d'espaces marins dépourvus de traces humaines, c'est-à-dire exempts de traces liées à l'activité humaine. Ainsi, l'homme affecte la quasi-totalité du vaste écosystème marin. Cela est encore plus grave quand on sait que ces zones ne connaissant pas la présence humaine possèdent un niveau de biodiversité extraordinaire qu'il faut absolument protéger. L'étude de la revue scientifique démontre également que seulement 5 % des espaces sauvages disposent de la protection qu'offrent les aires marines protégées (AMP). Ces AMP sont des espaces en mer dont la protection est assurée à long terme. Le code de l'environnement en reconnaît aujourd'hui 15 types. Ces zones vierges de toute présence humaine doivent recevoir l'appui d'une protection particulière, et qui soit intégrée aux normes internationales. C'est notamment l'exigence de l'accord de Paris sur les océans qui est le prolongement de l'accord de Paris sur le climat et dont la finalisation devrait voir le jour à l'horizon 2020. Elle souhaiterait savoir quelles sont les modalités que le Gouvernement entend mettre en place aux niveaux national et international pour assurer la protection de cet écosystème encore intact et qui doit le rester pour les générations futures.
Réponse publiée le 20 novembre 2018
L'étude présentée de la revue Current biology présente des résultats marquants quant aux impacts des activités humaines sur les espaces et espèces marines. La revue démontre que seulement 5 % des espaces marins sauvages (c'est-à-dire n'ayant pas été exposés à l'impact des activités humaines telles que notamment la pêche et le transport maritimes) disposent de la protection qu'offrent les aires marines protégées (AMP). Or, du point de vue de la protection des zones les moins impactées, la France poursuit une politique active et volontariste. C'est notamment le cas des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), dont une grande partie de la zone économique exclusive (ZEE) (670 000 km2, soit plus que la superficie de la France hexagonale), bénéficie du statut de réserve naturelle nationale depuis 2016, et de la Polynésie française, dont l'ensemble de la ZEE bénéficie du statut d'aire marine gérée depuis mars 2018. En haute mer, où se situent la grande majorité des zones les moins impactées, la France est également partie prenante de plusieurs initiatives de protection, dont la commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l'Antarctique (CCAMLR). Par ailleurs, dans le cadre du traité sur l'Antarctique, elle participe également au processus de désignation d'aires spécialement protégées de l'Antarctique (ASPA), non impactées par l'homme et dont l'accès est conditionné par la délivrance d'un permis (on dénombre à ce jour 73 ASPA, dont deux ont été désignées en Terre-Adélie, sur proposition de la France, en 1995 et en 2006). Plus globalement, le réseau français d'AMP, qui couvrait moins de 5 % des eaux marines en 2012, couvre désormais 22,36 % de l'ensemble des eaux sous juridiction française situées en métropole et outre-mer. Cette extension rapide du réseau d'AMP s'explique notamment par la création, depuis septembre 2007, de neuf parcs naturels marins, en métropole comme en outre-mer : Iroise, Mayotte, golfe du Lion, Glorieuses, estuaires picards et mer d'Opale, bassin d'Arcachon, estuaire de la Gironde et mer des Pertuis, cap Corse et Agriate, Martinique. L'extension du réseau se poursuit actuellement : elle devrait couvrir 32 % des eaux sous juridiction d'ici 2020, du fait de nouvelles créations (extension de la réserve naturelle nationale des TAAF) et du déploiement de nouveaux outils, tels que les zones de conservation halieutiques, issues de la loi du 8 août 2016 relative à la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Aussi, conformément aux engagements pris à la suite du comité interministériel de la mer et en application du plan biodiversité, le ministère de la transition écologique et solidaire (MTES) vient de démarrer le processus de révision de la stratégie nationale de création et de gestion d'aires marines protégées (SAMP) 2012-2020. Une nouvelle stratégie sera adoptée pour la période 2020-2030, avec pour objectif de renforcer la connectivité, la cohérence et la représentativité du réseau d'AMP, en y développant notamment les dispositifs de protection renforcée au sein des secteurs de biodiversité marine remarquable. Dans les territoires ultra-marins, qui concentrent la plus grande partie de la biodiversité marine, les AMP couvrent parfois presque toutes la ZEE, comme en Martinique ou à Mayotte. Un haut niveau de protection des espaces marins a également été atteint dans certaines collectivités d'outre-mer ayant la compétence en matière d'environnement, à l'instar de la Nouvelle-Calédonie, dont le parc marin de la mer de Corail couvre 98 % des eaux sous juridiction. Le réseau d'AMP a pour but de répondre à divers enjeux adaptés au contexte environnemental, social et économique local : connaissance du milieu marin, préservation des espèces d'oiseaux, de mammifères marins (sanctuaires Agoa aux Antilles et Pélagos en Méditerranée) et des habitats (ex. : récifs coralliens, herbiers) d'intérêt communautaire (sites Natura 2000 en mer), protection de la biodiversité ordinaire (ex. : sites gérés par le Conservatoire du littoral), développement durable des activités en mer en veillant à la conciliation des usages, protection de fonctionnalités halieutiques, protection de biotope, protection des écosystèmes propres aux zones humides. Au niveau international, la France s'implique pour la création d'AMP en haute mer. La France participe également aux discussions de l'autorité internationale des fonds marins pour assurer la préservation des écosystèmes des grands fonds marins. Par ailleurs, en vertu des engagements internationaux qu'elle a pris dans le cadre de conventions relatives à la protection de l'environnement marin de différentes régions biogéographiques marines (Antilles, océan Indien, Atlantique Nord, Est, Méditerranée), la France coopère activement avec les États voisins parties à ces conventions en vue d'améliorer les connaissances relatives au milieu marin et de définir des actions communes à mettre en place pour limiter l'effet des activités humaines sur les écosystèmes (ex. : adoption d'un plan d'action régional de lutte contre les déchets marins au sein de la convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l'Atlantique Nord-Est). Les engagements européens de la France en matière de protection des écosystèmes marins permettent aussi de garantir l'action de l'État dans ce domaine. À cet égard, si l'ensemble des eaux sous juridiction française n'est certes pas couvert par le réseau national d'AMP, les eaux de métropole sont toutefois couvertes par l'obligation d'atteindre le bon état écologique des eaux marines d'ici 2020, en application de la directive européenne cadre « stratégie pour le milieu marin », ainsi que par un objectif d'atteinte du bon état de conservation des populations d'oiseaux, de mammifères marins, des récifs et autres types d'habitats dont la protection est requise au titre des directives oiseaux (DO) et habitat, faune, flore (DHFF). Dans le cadre de la mise en œuvre de la directive-cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM), des objectifs en termes de protection des espèces et des habitats relatifs aux fonds marins (habitats benthiques) sont définis pour les quatre façades maritimes : Manche Est-mer du Nord, Nord Atlantique-Manche Ouest, Sud-Atlantique, Méditerranée. Ils seront révisés début 2019, dans le cadre de l'adoption des stratégies de façade maritime. Enfin, dans le cadre des DO et DHFF, une extension du réseau Natura 2000 au-delà de la mer territoriale concernant l'ensemble des espaces maritimes de métropole, permettra la mise en place d'une meilleure protection des espèces marines mais aussi des habitats des fonds marins. Actuellement en cours d'examen par la Commission européenne, cette extension devrait faire passer de 41 683 km2 à 123 540 km2 la surface marine de métropole couverte par le réseau Natura 2000 (soit 34 % de surface marine ZEE de métropole).
Auteur : Mme Caroline Janvier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Environnement
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Dates :
Question publiée le 7 août 2018
Réponse publiée le 20 novembre 2018