Question de : M. Jean Lassalle
Pyrénées-Atlantiques (4e circonscription) - Non inscrit

M. Jean Lassalle alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les graves conséquences induites par le changement de formule des excipients du Lévothyrox. Face aux polémiques et aux plaintes suscitées par la mise sur le marché par le laboratoire Merck à la fin de mars 2017 de cette nouvelle formule du Lévothyrox, le Gouvernement avait, à l'automne 2017, annoncé le rétablissement de l'ancienne formule. Les autorités avaient toutefois précisé que ce retour était temporaire. Aujourd'hui, l'arrêt définitif de la commercialisation de l'Euthyrox au-delà de 2018 inquiète particulièrement les malades. En effet, alors que la crise sanitaire liée à ce médicament dure depuis plus d'un an et que les patients lourdement touchés par de nombreux effets indésirables causés par le changement de formule de ce dernier sont désormais un million, le Gouvernement tarde à adopter les mesures effectives et radicales qui s'imposent. Tout d'abord, les associations de malades ne comprennent pas le refus des responsables sanitaires et du Gouvernement de reconnaître la crise sanitaire liée au Lévothyrox et ce, malgré l'ampleur de la situation. Elles restent sans réponse de la part de l'État quant aux caractéristiques et motifs qui lui auraient permis de la décréter. Ensuite, les associations de malades auraient aimé comprendre les raisons du lancement d'une nouvelle étude en double aveugle, annoncé par les responsables sanitaires, puisque cette dernière a déjà été entreprise deux fois. En effet, elle a eu lieu la première fois lors de tests précités sur 200 volontaires et la deuxième, selon les associations, sur les malades directement, donc devenus les cobayes à leur insu. En l'occurrence elles réclament une vraie étude pharmacocinétique et dynamique de la part des autorités françaises qui pourrait affirmer ou infirmer l'expertise scientifique d'un laboratoire indépendant, commandée par l'Association française des malades de la thyroïde. D'autant plus que cette étude a soulevé, entre autres, de sérieuses anomalies dans la composition de la nouvelle formule du Lévothyrox. Enfin, les associations déplorent, d'une part le manque de communication et de prise en charge des malades adaptée et ordonnée par le ministère, et d'autre part et de surcroît, la propagation d'informations incorrectes. En effet, selon les chiffres avancés dans ses derniers communiqués, le ministère de la santé parle de 500 000 patients qui seraient passés à une alternative de la nouvelle formule. Or, selon les graphiques établis par l'association Vivre sans Thyroïde, calculés à partir des chiffres de l'assurance maladie de mars 2018, près d'un million de malades sur 3 millions ont été contraints de migrer vers une alternative de traitement. Face à ces graphiques très parlants et aux doléances des nombreux malades, les associations s'étonnent de la position du ministère de la santé qui juge « positif » le rapport bénéfices-risques. Par ailleurs, en collégialité avec l'Ordre des médecins et des pharmaciens, ces derniers notamment accusés de ne pas avoir transmis la mise en garde aux patients, ils dénoncent le déni des autorités face à leurs responsabilités indéniables et avérées dans cette affaire. Dans le contexte de ce scandale qui reste entier malgré la détresse des patients qui souffrent, il lui demande, d'une part de rétablir la justice en déclarant officiellement la crise sanitaire dans l'affaire du Lévothyrox et, d'autre part d'apporter en urgence les réponses attendues par ces patients et restaurer la confiance des Français dans les médicaments.

Réponse publiée le 18 décembre 2018

La prise en compte des conséquences du changement de formule de la spécialité Levothyrox®, subies par les patients, est une préoccupation majeure de l'ensemble des autorités de santé mobilisées sur le sujet. La qualité de la nouvelle formule du Levothyrox® a été scientifiquement établie. Les résultats présentés lors du comité technique de pharmacovigilance, qui s'est tenu à l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) le 6 juillet 2018, ont permis de confirmer la bonne qualité de la nouvelle formule du Levothyrox®. Toutefois, et conformément aux engagements pris par la ministre des solidarités et de la santé, afin que les patients souffrant d'effets indésirables persistants avec ce médicament puissent bénéficier d'une prise en charge appropriée, l'ANSM poursuit ses actions dans le but, notamment, d'élargir et de diversifier l'offre thérapeutique des produits à base de lévothyroxine. Outre la spécialité Levothyrox® « nouvelle formule » comprimé sécable (8 dosages) du laboratoire Merck, sont disponibles à ce jour quatre médicaments à base de lévothyroxine disposant d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) pérenne en France : - la spécialité L-Thyroxin Henning®, comprimé sécable (8 dosages), du laboratoire Sanofi, - la spécialité L-Thyroxine Serb®, solution buvable en gouttes, du laboratoire Serb, - la spécialité générique Thyrofix®, comprimé (4 dosages), du laboratoire Uni-Pharma, - la spécialité TCaps®, capsule molle (12 dosages), des laboratoires Genevrier. De plus, à la demande des pouvoirs publics, la spécialité Euthyrox®, identique à l'ancienne formulation de Levothyrox®, a été mise à disposition des patients dès octobre 2017 par le biais d'importations temporaires du laboratoire Merck Santé. La prescription de la spécialité Euthyrox® est destinée en dernier recours aux patients qui rencontrent des effets indésirables durables et n'ont pas encore identifié la spécialité pérenne qui leur convient. Le 18 juillet 2018, l'évaluation approfondie de la nouvelle formule du Levothyrox® menée par 21 Etats-membres de l'Union européenne (worksharing) a abouti à un avis positif qui conforte l'évaluation favorable faite par l'ANSM avant le lancement de la nouvelle formule en France en mars 2017. La mise en œuvre de la nouvelle formule dans ces Etats membres et l'abandon de la commercialisation de l'ancienne formule se feront de façon étalée dans le temps et progressive. Dans cette perspective, le laboratoire Merck a annoncé le 6 novembre 2018, qu'il poursuivra les importations d'Euthyrox® de manière transitoire durant l'année 2019, afin de permettre aux patients présentant des effets indésirables de trouver une alternative qui leur convient. En outre, l'ANSM dans sa mission générale de sécurité sanitaire pour le compte de l'État et dans l'intérêt des patients, poursuit son enquête de pharmacovigilance initiée dès la commercialisation de la nouvelle formule, en mars 2017. Les trois premières études de cette enquête ont confirmé la survenue de déséquilibres thyroïdiens pour certains patients lors du passage de l'ancienne à la nouvelle formule. Elles ont conclu que le profil clinique des effets indésirables rapportés avec la nouvelle formule était semblable à celui des effets indésirables rapportés avec l'ancienne formule. En complément, l'Agence a également engagé une enquête de pharmacovigilance sur les effets indésirables des autres médicaments à base de lévothyroxine disponibles depuis octobre 2017. Enfin, l'ANSM a initié une étude de pharmaco-épidémiologie sur l'ensemble des patients traités sur la base des données de l'assurance maladie. L'analyse comparative de cette étude, dont les résultats sont attendus très prochainement, a pour objectif d'estimer les éventuels risques associés au passage à la nouvelle formule du Levothyrox®. Consciente des effets indésirables que subissent certains patients en raison de ce changement de formule, la ministre des solidarités et de la santé s'est engagée à ce que les voix des patients soient écoutées et entendues, à titre individuel ou lorsqu'elles sont portées par des associations de défense des droits des usagers de notre système de santé. Dans ce contexte, un comité de suivi piloté par la direction générale de la santé regroupant l'ensemble des parties prenantes dont les associations de patients a été mis en place afin de constituer un cadre d'échange privilégié au sein duquel les réponses précises aux questions susceptibles de se poser pourront être apportées.  Par conséquent, les autorités de santé maintiennent et vont maintenir une surveillance renforcée sur l'ensemble des spécialités à base de lévothyroxine disponibles en France.

Données clés

Auteur : M. Jean Lassalle

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pharmacie et médicaments

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Dates :
Question publiée le 7 août 2018
Réponse publiée le 18 décembre 2018

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