15ème législature

Question N° 11635
de M. Michel Fanget (Mouvement Démocrate et apparentés - Puy-de-Dôme )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Montée de l'ismalophobie et de l'antisémitisme en Autriche

Question publiée au JO le : 07/08/2018 page : 7058
Réponse publiée au JO le : 23/10/2018 page : 9551

Texte de la question

M. Michel Fanget attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'antisémitisme et de l'islamophobie en Autriche. L'Autriche est membre de l'Union européenne, un pays ami qui bénéficie de la confiance que lui confère cette amitié européenne. Néanmoins, depuis les dernières élections législatives de 2017, ce pays ami dont le peuple souverain a décidé de confier la politique de l'État à un gouvernement conservateur (OVP) et d'extrême-droite. Le parti FPO a pour principe d'interdire l'immigration musulmane, qui constitue de fait une politique islamophobe. Pour recontextualiser cette réflexion, il est à rappeler que le parti FPO a été créé par deux anciens Waffen SS : Anton Reinthaller et Friedrich Peter. Si l'Autriche, tant qu'elle respecte, les valeurs de l'Europe est libre de porter la politique que son peuple lui confère, il est néanmoins important d'assumer le rôle de la France et de ne pas répéter les erreurs du passé et à assumer son rôle de gendarme du monde siégeant de droit au Conseil de sécurité de l'ONU. Aujourd'hui ce pays demande par la voie de son ministre de l'intérieur Herbert Kickl, corroborée par une note confidentielle de la présidence autrichienne de l'UE pour 6 mois, de modifier substantiellement les conditions d'attribution du droit d'asile. Ce droit consacré aux articles 13 et 14 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et du citoyen repris par la Convention européenne des droits de l'Homme que l'Autriche a ratifiée en 1956. Aujourd'hui, ce même pays met en place une campagne, sous couvert de la défense du bien-être animal, de la limitation de la pratique de l'abattage animal religieux, en établissant des listes de juifs et de musulmans pour s'assurer de la non surproduction de viande issue de ces rituels religieux qui prohibent l'étourdissement de l'animal avant l'abattage. Or, en Autriche, les autorités administratives possèdent déjà ces chiffres puisqu'il est exigé avant toute installation de déclarer sa religion et ceux pour tous les habitants autrichiens ou non. Il apparaît donc étonnant, voire inquiétant, que compte tenu des informations dont disposent l'État autrichien, que ce dernier use de propos publiquement islamophobes et antisémites, sous couvert d'une intention de lutter contre la souffrance animale. L'histoire ne peut ignorer les conséquences sur le long terme de ce type de propos, de ce genre de climat. À tort ou à raison, le gouvernement autrichien prend la route d'un passé qui semblait d'une autre humanité à laquelle il a été dit non par le peuple d'Europe auquel l'Autriche appartient. Il l'interroge donc pour savoir quelles ont été les mesures de mise en garde faites à l'Autriche face à cette situation.

Texte de la réponse

La France condamne fermement le racisme et l'antisémitisme en tout lieu et en toute circonstance. Le chancelier fédéral autrichien Sebastian Kurz, qui dirige une coalition comprenant des ministres du parti ÖVP et des ministres du parti FPÖ, a pour sa part condamné publiquement avec la plus grande fermeté et à diverses reprises toute forme de racisme et d'antisémitisme. Cette position du gouvernement autrichien apparaît également dans l'accord de coalition conclu en décembre 2017 entre l'ÖVP et le FPÖ. Elle s'est manifestée par la participation du gouvernement autrichien à la conférence "An end to antisemitism !" qui s'est tenue à Vienne du 18 au 22 février 2018, et par les mesures de dissolution prises contre la corporation étudiante Germania, lors des révélations faites en janvier 2018 sur l'existence d'un livret de chants comprenant des paroles de nature antisémite. Concernant la politique migratoire, dans le cadre de sa présidence de l'UE au second semestre 2018, le gouvernement autrichien met l'accent sur le volet externe de la politique migratoire et sur le développement d'un modèle migratoire recentré sur les personnes en besoin de protection. Il s'attache notamment aux problématiques du renforcement de la politique de retour pour les migrants non éligibles à la protection internationale, de la lutte contre les réseaux de passeurs, du renforcement des contrôles aux frontières extérieures, et de la coopération avec les pays tiers, notamment les pays d'Afrique du Nord. Dans le cadre des débats sur la solidarité et la responsabilité, l'Autriche s'est exprimée en faveur d'une diminution des aides financières de l'UE aux pays qui continueraient de refuser d'accueillir des migrants, tout en exprimant à plusieurs reprises ses réserves face à la politique des quotas dont elle estime qu'elle n'a pas fonctionné. Dans ce contexte, la France veille à une mise en œuvre équilibrée des conclusions du Conseil européen de juin 2018, notamment en matière de réforme du régime d'asile commun européen, sur la base des principes de responsabilité et solidarité et du respect du droit international. Concernant la proposition de limiter la pratique de l'abattage religieux, il ne s'agit pas d'une proposition du gouvernement fédéral autrichien. Gottfried Waldhäusl, membre FPÖ du gouvernement régional de Basse-Autriche, a expliqué le 18 juillet 2018 au quotidien Wiener Zeitung qu'il souhaitait limiter la pratique de l'abattage religieux au maximum en "liant la fourniture de viande à la résidence effective dans la région", ce qui pouvait conduire à dresser des listes en fonction des religions. Cette proposition s'est vue condamnée par le ministère autrichien de la Justice, qui a rejeté ce projet comme non conforme à la loi autrichienne sur la protection des données personnelles. Le respect de cette loi interdit par ailleurs d'exiger des citoyens autrichiens et étrangers qu'ils indiquent leur religion. Les autorités françaises demeurent vigilantes face à toute atteinte aux valeurs démocratiques et à l'Etat de droit en Europe, comme en atteste son plein soutien aux procédures engagées par la Commission européenne à l'encontre de la Pologne et de la Hongrie, auxquelles le chancelier autrichien Sebastian Kurz a également apporté son appui.