Conditions de travail des accueillants familiaux
Question de :
M. Jean Lassalle
Pyrénées-Atlantiques (4e circonscription) - Non inscrit
M. Jean Lassalle attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les inquiétudes des personnes travaillant comme accueillants familiaux pour les personnes âgées ou handicapées concernant une proposition de loi déposée le 25 juillet 2018 à l'Assemblée nationale. Cette proposition de loi, « visant à développer l'accueil familial des personnes âgées ou handicapées », co-signée par trente députés, se trouve désormais devant la commission des affaires sociales. En 1989, le législateur a réglementé les initiatives de particuliers accueillant à leur domicile, à titre onéreux, des personnes âgées ou handicapées. Ce mode d'accueil, qualifié de familial, a été précisé par des modifications au CASF (loi de 2002 et décret de 2004, loi ASV de 2015 et décrets de 2016 et 17). Les textes successifs ont pérennisé le « gré à gré » en statuant que les accueillants familiaux, agréés, exercent une activité « libérale », contractualisée avec les personnes accueillies, contrôlée par les services des conseils départementaux. Alors que les associations d'accueil familial ne cachent pas que le système et les conditions de leur travail ont besoin d'être améliorés, en l'occurrence ils redoutent les conséquences de cette proposition de loi et estiment que ce texte confond abusivement le cadre juridique de l'exercice « professionnel » des accueillants familiaux et celui des « aidants familiaux ». Tout d'abord cette proposition de loi souligne la spécificité du contrat actuel, le « contrat écrit » conclu de gré entre l'accueillant et l'accueilli n'étant pas un contrat de travail. Ce qui signifie que l'accueillant familial ne cotisant pas à l'assurance chômage, il ne peut donc bénéficier des droits à des indemnités de licenciement, à l'assurance chômage et aux aides d'accès à l'emploi. De fait, les auteurs de cette loi proposent de requalifier la nature du contrat, en rendant obligatoire l'emploi des accueillants familiaux par une personne morale de droit public ou de droit privé, tout en maintenant le contrat d'accueil écrit préexistant. Selon les associations, adopter cette disposition reviendrait à signer la fin des accueils de « « gré à gré », alors même qu'elles dénoncent les dysfonctionnements des accueils salariés institués en 2007. Pourtant, il suffirait, comme elles l'avaient régulièrement demandé, d'accorder aux accueillants familiaux le statut de salarié au service de particuliers. Ensuite, elles considèrent, concernant le droit au répit, la proposition de loi comme étant surréaliste. En effet, la loi d'adaptation de la société au vieillissement du 28 décembre 2015 a instauré ce droit pour les proches aidants de personnes bénéficiaires de l'APA (allocation personnalisée d'autonomie), assurant une présence ou une aide indispensable à la vie à domicile de leur proche, et qui ne peuvent être remplacés pour assurer cette aide par une personne de l'entourage. Selon cette proposition de loi, le droit au répit permettrait de développer davantage l'accueil familial en offrant aux accueillants des garanties qu'impose la grande implication qui est celle des accueillants familiaux, au service des personnes âgées ou handicapées. Cependant, selon les associations, depuis que les accueillants ont droit à des congés, il leur appartient déjà, en concertation avec leurs accueillis, d'organiser leur remplacement et ceci sans surcoût pour les personnes accueillies. Seules avancées positives de cette loi, selon les associations d'Accueil Familial, sont celles déjà réclamées par elles même depuis plusieurs années, et concrètement celles qui concernent une indemnité journalière représentative des frais d'entretien courants de la personne accueillie et le nombre de personnes pour lequel l'agrément est accordé. En effet, ce nombre ne doit pas être systématiquement limité par « précaution » et être évalué au cas par cas, si l'évaluation est positive et si les capacités d'accueil et les qualités professionnelles du candidat sont suffisantes. Même si les accueillants familiaux tiennent à la souplesse de leur formule d'accueil, ils dressent un constat alarmant de leur situation. Selon eux, la profession souffre de plusieurs freins au développement de l'accueil, dont un le plus important, la faiblesse de leur rémunération. Alors que l'accueil familial est une formule souple permettant à la personne âgée ou handicapée de maintenir des liens avec son environnement antérieur tout en lui offrant un cadre familial et un accompagnement personnalisé, seules 15 800 personnes vivaient en accueil familial (selon l'enquête de l'observatoire national de l'action sociale en 2010), alors que 800 000 personnes étaient hébergées en établissement. Force de constater que cette profession a un grand besoin d'être améliorée et développée. Ainsi, dans ce contexte, il lui demande quelle est sa position concernant cette proposition de loi et ce qu'elle compte mettre en œuvre afin d'améliorer les conditions de travail des accueillants familiaux et pour développer cette profession, en offrant plus largement cette solution d'hébergement aux personnes âgées et handicapées.
Réponse publiée le 29 janvier 2019
Depuis sa création en 1989, le dispositif de l'accueil familial de personnes âgées ou handicapées a connu plusieurs adaptations qui ont permis d'améliorer de façon significative le statut des accueillants familiaux et de renforcer la qualité et la sécurité des accueils. Les dernières évolutions, intervenues dans le cadre de la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement, ont permis de consolider la formation des accueillants familiaux, de mieux encadrer la procédure d'agrément, de renforcer la protection des droits des accueillants familiaux et des personnes accueillies et de simplifier les démarches administratives liées à l'accueil via le recours au chèque emploi service universel. Ce processus d'adaptation sera poursuivi par la définition d'un formulaire unique de demande d'agrément des accueillants familiaux afin de renforcer l'équité de traitement entre les candidats à l'agrément, par l'élaboration d'une trame de projet d'accueil personnalisé afin d'appuyer les accueillants familiaux et les personnes accueillants dans cette démarche désormais obligatoire et par la refonte des contrats d'accueil types pour en renforcer la cohérence et la lisibilité. Concernant le salariat des accueillants familiaux, cette possibilité, introduite par la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, reste aujourd'hui peu mise en œuvre. Au regard du droit du travail, le lien établi entre l'accueillant familial et la personne accueillie ne peut être assimilé au lien de subordination du salarié à l'employeur et la personne accueillie ne peut être considérée comme un employeur exerçant un pouvoir de direction et conclure un contrat de travail avec l'accueillant familial. Le salariat des accueillants familiaux est donc soumis à des modalités d'organisation spécifiques : les accueillants familiaux ne peuvent être salariés que par une personne morale ayant obtenu l'accord du président du conseil départemental. En outre, la loi limite leur temps de travail à 258 jours par an, ce qui implique pour l'employeur d'organiser un remplacement sur une période de 107 jours par an, difficile à assurer autrement qu'en logement dédié. Au regard de ces contraintes, la généralisation du salariat des accueillants familiaux n'apparaît pas comme la solution la plus opportune, d'autant que la grande majorité des accueillants familiaux exercent leur activité dans le cadre d'une relation directe, dite « de gré à gré » avec les personnes accueillies.
Auteur : M. Jean Lassalle
Type de question : Question écrite
Rubrique : Professions et activités sociales
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Dates :
Question publiée le 4 septembre 2018
Réponse publiée le 29 janvier 2019