15ème législature

Question N° 12063
de Mme Jeanine Dubié (Non inscrit - Hautes-Pyrénées )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Entreprises françaises et colonies israéliennes en territoire palestinien

Question publiée au JO le : 11/09/2018 page : 7921
Réponse publiée au JO le : 25/06/2019 page : 5878

Texte de la question

Mme Jeanine Dubié attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la violation des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'Homme de l'ONU que constituent les activités économiques et commerciales auxquelles se livrent des entreprises françaises au sein des colonies israéliennes situées sur le territoire palestinien occupé. En effet, le rapport de la mission internationale indépendante d'établissement des faits, chargée d'étudier « les effets des colonies de peuplement israéliennes sur les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels des Palestiniens dans le territoire palestinien occupé », adopté le 22 mars 2013 par le Conseil des droits de l'Homme des Nations unies, pour 46 voix contre une (États-Unis), a constaté que certaines entreprises ont, directement et indirectement, permis, facilité ou profité de la construction et de la croissance de ces colonies de peuplement, contribuant ainsi à leur maintien, à leur développement et à leur consolidation. Ainsi, le Conseil des droits de l'Homme a demandé au Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme (résolution 31/36 du 24 mars 2016) d'établir une base de données des entreprises impliquées dans ces activités. Un rapport du 1er février 2018 du Haut-Commissaire fait état de l'avancement de cette base de données, dénombrant quatre entreprises françaises, dont les noms n'ont pas été rendus publics à ce jour. De plus, dans cette même résolution 31/36, le Conseil des droits de l'Homme a appelé les États à prendre des mesures destinées à faire en sorte que les entreprises domiciliées sur leur territoire ou relevant de leur juridiction, s'abstiennent de commettre ou de contribuer à ces atteintes aux droits de l'Homme des palestiniens. Aussi, elle lui demande quelles démarches l'État français envisage d'entreprendre pour dissuader les entreprises françaises de participer à des activités économiques et commerciales dans les colonies israéliennes, et pour demander la publication de la « base de données des entreprises impliquées dans des activités liées aux colonies israéliennes dans le Territoire palestinien occupé » de l'ONU.

Texte de la réponse

La politique de colonisation est illégale au regard du droit international. Elle nuit à la recherche d'une paix juste et durable et menace la solution des deux Etats. Le Conseil de sécurité des Nations unies a rappelé cette position dans la résolution 2334, adoptée le 23 décembre 2016. C'est pourquoi la France condamne les annonces de construction de nouveaux logements dans les colonies en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, ainsi que les démolitions et les évacuations en zone C qui participent de la même dégradation. De même, la France appelle publiquement les autorités israéliennes à reconsidérer ces décisions et à geler la colonisation afin de préserver la solution des deux Etats avec Jérusalem comme capitale. La dégradation de la situation dans les Territoires palestiniens constitue une source de préoccupation. Le Président de la République a ainsi appelé à plusieurs reprises le Premier ministre israélien à faire des gestes courageux vis-à-vis des Palestiniens, notamment en gelant la colonisation. De même, la France a exprimé à plusieurs reprises, avec la plus grande clarté, sa préoccupation face aux démolitions et aux déplacements forcés de populations et a appelé les autorités israéliennes à revenir de manière définitive sur la décision de démolition du village de Khan al-Ahmar, aujourd'hui suspendue. En conformité avec le droit international, des mesures concrètes ont été prises au niveau européen face à l'accélération de la colonisation et en vue de distinguer le territoire de l'Etat d'Israël et les territoires occupés depuis 1967. Ainsi, les lignes directrices de l'Union européenne adoptées en juillet 2013 par la Commission européenne excluent de tout financement européen les entités israéliennes actives dans les colonies, mesure entrée en application depuis le 1er janvier 2014. De plus, au regard du droit de l'Union, les produits israéliens issus des colonies ne sauraient bénéficier du même régime que ceux produits en Israël. En effet, les préférences douanières réservées aux produits originaires du territoire d'Israël en vertu de l'accord commercial qui lie Israël à l'Union européenne ne s'appliquent pas aux territoires occupés. En outre, par souci de transparence et d'information du consommateur européen, la Commission européenne a adopté une communication interprétative relative à l'origine des biens produits dans les territoires occupés par Israël depuis juin 1967, publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 12 novembre 2015. Le ministère de l'Economie et des Finances a mis en ligne en novembre 2016 un avis attirant l'attention des opérateurs économiques sur cette communication. Enfin, la France a publié des recommandations pour les entreprises et les citoyens au sujet des risques juridiques, financiers et de réputation encourus en menant des activités dans les colonies. Ces messages leur sont rappelés régulièrement par l'ensemble des services concernés. Néanmoins, comme l'Union européenne a pu l'exprimer lors de l'adoption de la résolution sur les colonies de peuplement par le Conseil des droits de l'Homme en mars 2016 portant création d'une base de données des entreprises impliquées dans des activités de colonisation, la France considère que l'information des entreprises au sujet des risques liés à leurs activités dans les colonies doit se faire avant tout par chaque Etat, conformément à la législation en vigueur. Dès lors et en l'absence d'information concernant la façon dont cette base de données serait constituée, les suites données à la publication de cette liste ainsi que les possibilités de recours pour les entreprises, la France, comme tous ses partenaires européens, s'est abstenue lors de l'adoption de cette résolution. La France est pleinement mobilisée en vue d'un règlement définitif du conflit israélo-palestinien, fondé sur la solution des deux Etats, Israël et la Palestine, vivant côte à côte, en paix et en sécurité, dans des frontières sûres et reconnues, fondées sur celles de 1967, et avec Jérusalem pour capitale. La France rappelle ces paramètres avec constance, et s'attache activement à les défendre, sur le terrain et aux côtés de ses partenaires.