Question de : Mme Clémentine Autain
Seine-Saint-Denis (11e circonscription) - La France insoumise

Mme Clémentine Autain interroge Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, sur les pouvoirs réels du Conseil supérieur de l'audiovisuel en matière de lutte contre les propos sexistes et misogynes. Les propos sexistes dans les médias font partie intégrante du combat qui doit être mené dans l'ensemble de la société contre un modèle dominant où l'homme serait la représentation de l'expertise et la femme celle d'un objet passif. Les représentations médiatiques ont un effet cumulatif notamment sur les plus jeunes qui consacrent de plus en plus de temps aux écrans et aux contenus informatifs sur internet. Les moyens du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) pour sanctionner des propos ou des comportements sexistes sont aujourd'hui très faibles. Le CSA assure une veille particulièrement utile pour mesurer l'évolution des représentations hommes-femmes notamment sur les plateaux télévisuels. Mais quels sont aujourd'hui ses moyens réels pour agir et sanctionner des propos inappropriés ? Le CSA peut signaler un événement épisodique et prononcer une mise en demeure, mais il n'applique aucune sanction. De plus, il ne lui est pas possible d'alerter sur les effets répétitifs d'émissions radiophoniques ou télévisuelles quotidiennes dont les concepts mêmes sont basés sur des représentations sexistes. Enfin, le CSA n'a aujourd'hui aucun pouvoir sur les contenus du numérique, dont on sait qu'ils représentent une part croissante des contenus regardés notamment par les plus jeunes. Elle lui demande de présenter les moyens envisagés pour donner les moyens au Conseil supérieur de l'audiovisuel de prendre part activement à la lutte contre les propos et comportements sexuels et sexistes et encourager la représentation égale des hommes et des femmes dans l'espace médiatique.

Réponse publiée le 18 décembre 2018

La mobilisation du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) en matière de lutte contre les propos sexistes et misogynes est constante depuis plusieurs années. Le CSA a notamment mis en place en 2013 un comité d'orientation « Droits des femmes » présidé par Mme Sylvie Pierre-Brossolette, qui réunit 2 ou 3 fois par an des personnalités et des experts. Cette instance constitue un lieu privilégié de réflexion sur les perspectives d'amélioration possibles en matière de représentation et d'image des femmes à la télévision et à la radio, ainsi qu'une instance opérationnelle guidant le Conseil dans son action, en formulant des propositions concrètes. La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes (art. 56) a par ailleurs renforcé les pouvoirs du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) afin de lutter contre le sexisme et protéger l'image et les droits des femmes. Ainsi, le Conseil doit « veiller à la juste représentation des femmes et des hommes à l'antenne, ainsi qu'à l'image des femmes dans les programmes, notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple ». Afin de rendre compte des progrès réalisés, le CSA produit depuis 2016 un rapport annuel relatif à la « représentation des femmes dans les programmes de télévision et de radio, à partir des données fournies par les médias (nombre de programmes pouvant se prévaloir d'un caractère non stéréotypé, nombre de programmes contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences, nombre de femmes à l'antenne en tant qu'expertes, présentatrices, etc.). Ce rapport permet d'établir un classement des médias du type « name & shame », d'observer d'année en année les évolutions et de formuler des recommandations auprès des chaînes pour améliorer leurs résultats. La loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et la citoyenneté a conféré une nouvelle compétence au CSA en matière de contrôle de l'image des femmes dans les messages publicitaires de la communication audiovisuelle. Dans ce contexte, l'étude du CSA sur « la représentation des femmes dans les publicités télévisées » publiée le 31 octobre 2017, réalisée à partir d'un corpus de 2055 messages publicitaires télévisés, a permis de mieux caractériser et quantifier les stéréotypes sexistes présents dans les publicités. A partir de ces constats, le CSA a réuni un groupe de travail comprenant les annonceurs, publicistes et l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), en vue d'élaborer avec eux une « Charte d'engagements volontaires pour la lutte contre les stéréotypes sexuels, sexistes et sexués dans la publicité ». Celle-ci a été signée le 6 mars 2018 par l'Union des annonceurs (UDA), par l'Association des agences conseils en communication (AACC) et la filière « la communication ». Dans la même logique, le CSA mène actuellement des travaux sur les émissions de téléréalité, afin de mettre en exergue les stéréotypes sexistes voire misogynes que contiennent ces programmes et d'inciter les professionnels (producteurs, chaînes) à faire évoluer leurs pratiques (via une charte par exemple). Par ailleurs, le CSA est doté d'un dispositif de signalement en ligne, accessible au tout public, pour l'alerter sur un programme ou une publicité diffusés à la télévision, à la radio, ou accessibles sur un service à la demande (formulaire à remplir en ligne). Une fois saisi, Le CSA examine les signalements des auditeurs et des téléspectateurs ; il intervient auprès de la chaîne, de la station ou du service s'il constate de leur part une infraction au cadre juridique de l'audiovisuel. Depuis un an, le CSA a renforcé son système de traitement des saisines faites par voie électronique. Les signalements portant sur des propos/comportements sexistes, humiliants, etc. sont traités par le département Missions cohésion sociale du CSA. Les signalements jugés non valides reçoivent une réponse automatique indiquant qu'il ne sera pas donné de suites. Le CSA peut également recourir le cas échéant à son pouvoir de sanction. Depuis quatre ans, le CSA est intervenu auprès de chaînes à 22 occasions en raison de propos ou comportements sexistes et dégradants (courrier/ notification à la chaîne concernée). Dans deux cas, une sanction a été prise par le CSA, impliquant un coût financier conséquent pour les chaînes (programmes Touche pas à mon poste (C8) et C Cauet (NRJ) en 2017). Ces sanctions ont été confirmées par le Conseil d'Etat en 2018. Ces premières condamnations montrent que le CSA utilise son pouvoir de sanction, avec en conséquence un renforcement de la vigilance des autres chaînes. S'agissant de la régulation des contenus numériques, une réflexion est actuellement menée sur une éventuelle extension des pouvoirs du CSA en la matière, à l'occasion de la transposition en droit français de la directive européenne sur les services de médias audiovisuel (ou SMA). Dans cette perspective, le CSA a lancé une étude sur la représentation des femmes sur internet.

Données clés

Auteur : Mme Clémentine Autain

Type de question : Question écrite

Rubrique : Audiovisuel et communication

Ministère interrogé : Égalité femmes hommes

Ministère répondant : Égalité femmes hommes et lutte contre les discriminations

Dates :
Question publiée le 18 septembre 2018
Réponse publiée le 18 décembre 2018

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