Prostitution des mineurs
Question de :
Mme Clémentine Autain
Seine-Saint-Denis (11e circonscription) - La France insoumise
Mme Clémentine Autain alerte Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, sur la question de la prostitution des mineurs en Seine-Saint-Denis. L'émission « Complément d'enquête : esclavage, prostitution, les nouveaux trafiquants » du 9 novembre 2017 a consacré un reportage à ce sujet, en prenant l'exemple d'un hôtel de la zone industrielle de Villepinte. Cette situation de trafic d'êtres humains, extrêmement grave, ne cesse de prospérer. Selon l'association contre la prostitution des enfants (ACPE), entre 5 000 et 8 000 enfants seraient concernés. La publication d'annonces par internet rend plus difficile la lutte contre ces phénomènes. Certains sites, comme Vivastreet, ont fermé les pages consacrées aux rencontres depuis le 30 mai 2018, suite à une plainte déposée par le Mouvement du Nid. D'après l'enquête menée par le journal Le Monde en février 2017, ces annonces représentaient 40 à 50 % du chiffre d'affaires de la plateforme Vivastreet. Sa fermeture est une première étape. Cependant, d'autres continuent de prospérer, comme 6annonce.com, car difficiles à mettre en cause. Aujourd'hui, les moyens manquent face à ce phénomène d'ampleur : manque de policiers, mais également manque de connaissance et de formation. La lutte actuelle contre le trafic d'êtres humains se heurte à plusieurs écueils : faut-il ordonner la fermeture des sites internet, qui sont domiciliés pour la plupart hors de France ? Que faire pour aider les hôteliers ? Elle lui demande donc de réaliser une enquête nationale exhaustive afin de lever les interrogations sur ce sujet d'ampleur, afin d'adapter les réponses apportées par les différents services de l'État et mettre en place des politiques publiques efficaces pour venir en aide à ces mineurs.
Réponse publiée le 15 janvier 2019
La protection de l'enfance et la lutte contre le système prostitutionnel constituent des objectifs prioritaires du Gouvernement comme en témoignent son action et les dernières avancées législatives dans ces domaines. Ainsi la loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 viser à lutter contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées prévoit notamment le renforcement des moyens de lutte contre les réseaux et les proxénètes, des mesures de protection et d'accompagnement, des actions de prévention et de sensibilisation, notamment auprès des élèves du second cycle. Elle impose également aux fournisseurs d'accès à internet et aux éditeurs une obligation de signalement et de retrait des contenus illicites en matière de proxénétisme ou de traite des êtres humains. Concernant la prise en charge des victimes, les mineurs victimes de traite des êtres humains bénéficient des dispositifs de mise à l'abri prévus par le droit commun de la protection de l'enfance. Ainsi, en cas d'urgence, l'article 375-5 du code civil prévoit la possibilité d'un placement provisoire par le juge des enfants ou par le procureur de la République. Il s'agit d'une décision qui peut intervenir lorsque la situation du mineur requiert un placement immédiat afin de le protéger au plus vite du danger. Au-delà du recours aux dispositifs de droit commun, le premier plan national de lutte contre la traite des êtres humains (2014-2016) a engagé deux mesures pour répondre plus spécifiquement aux situations relatives aux mineurs. D'une part sur le volet de la formation des professionnels notamment de l'aide sociale à l'enfance, la mission interministérielle pour la protection des femmes et la lutte contre la traite (MIPROF) a élaboré, en novembre 2017 en lien avec l'observatoire national de la délinquance et de la réponse pénale (ONDRP), un livret de formation intitulé « L'action de l'éducateur auprès du mineur victimes de traite des êtres humains » ainsi qu'une fiche réflexe à l'attention des services enquêteurs non spécialisés et des magistrats relative à l'identification et la protection de ce public. D'autre part, elle a expérimenté sur Paris en lien avec les acteurs institutionnels et associatifs concernés un dispositif de protection des mineurs victimes de traite des êtres humains dans le but d'identifier ces victimes et de les soustraire à l'influence des réseaux et des personnes qui les exploitent, en les plaçant dans des conditions sécurisantes. Sur le champ de la connaissance, la MIPROF et l'ONDRP publient depuis 2017 conjointement une enquête annuelle sur les victimes de traite des êtres humains suivies par les associations en France. Au-delà des données dont dispose l'Office centrale pour la répression de la traite des êtres humains, cette enquête constitue une source d'information précieuse sur le profil et les besoins des victimes. Conformément à ses engagements au titre de la convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains du 16 mai 2005, le Gouvernement entend poursuivre son action en la matière dans le cadre d'un second plan national en cours d'élaboration sous l'égide de la MIPROF. Une attention particulière sera portée à l'amélioration de la connaissance de ce phénomène ainsi qu'au renforcement de la formation des professionnels notamment ceux de l'aide sociale à l'enfance, et à la protection des victimes mineures.
Auteur : Mme Clémentine Autain
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enfants
Ministère interrogé : Égalité femmes hommes
Ministère répondant : Égalité femmes hommes et lutte contre les discriminations
Dates :
Question publiée le 18 septembre 2018
Réponse publiée le 15 janvier 2019