15ème législature

Question N° 12779
de Mme Charlotte Parmentier-Lecocq (La République en Marche - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > outre-mer

Titre > Plan d'action contre le chlordécone

Question publiée au JO le : 02/10/2018 page : 8718
Réponse publiée au JO le : 04/02/2020 page : 878
Date de renouvellement: 24/12/2019

Texte de la question

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le pesticide chlordécone et les remèdes à y apporter. Dans les Antilles, ce pesticide a été massivement utilisé pour lutter contre le charançon de la banane. Cet insecticide, reconnu comme perturbateur endocrinien, classé comme cancérigène possible dès 1979, interdit aux États-Unis dès 1976, ne l'a été en France qu'au début des années 1990. Ce chlordécone, interdit il y a plus de vingt-cinq, est massivement présent aujourd'hui dans les sols, dans les rivières, contaminant les produits de la terre, les animaux et les poissons. Une contamination à grande échelle touche les Guadeloupéens et les Martiniquais, en particulier les plus pauvres s'approvisionnant dans les circuits informels, non contrôlé sanitairement. Une étude de l'INSERM, en 2012, montre que ce produit amène une augmentation des prématurés et a des effets cognitifs et moteurs sur les nourrissons. Il est également fortement soupçonné d'augmenter certains cancers comme celui de la prostate, la Martinique ayant le plus de cas par habitant au monde. L'État a tenté de prendre ses responsabilités au travers de trois plans d'action. Après la parution d'une étude de l'ANSES en 2017 affirmant que les nouvelles limites maximales de résidus (LMR) rehaussées par l'Union européenne de chlordécone dans les aliments, une inquiétude se fait jour. La recherche et la communication doivent être les prochains piliers des futurs plans d'action. Ainsi, elle souhaite savoir quelles seront les objectifs et moyens déployés après la fin du troisième plan d'action en 2020. Elle souhaite également connaître les dispositions prises pour lutter contre le commerce informel, principal vecteur de toxicité.

Texte de la réponse

La pollution par la chlordécone aux Antilles est une priorité pour le ministère chargé de la santé en matière de lutte contre les expositions environnementales aux pesticides. De nombreuses mesures sont mises en œuvre depuis la découverte de cette pollution environnementale et coordonnées au niveau national depuis le 1er plan chlordécone en 2008 pour gérer cette pollution et réduire l'exposition de la population antillaise à ce contaminant. Suite à la visite officielle du Président de la République en septembre 2018 et au colloque scientifique et d'information sur la chlordécone d'octobre 2018, le ministère chargé de la santé a établi, en lien avec les autres ministères et les préfectures, une feuille de route interministérielle sur la chlordécone 2019-2020 qui vient renforcer les 21 actions du plan chlordécone III 2014-2020. Actuellement, un plan chlordécone IV est en cours de préparation, dans un premier temps sous l'égide des préfets afin de recueillir les besoins et les attentes de la population locale, et des groupes de travail se réunissent aux Antilles avec toutes les parties prenantes (professionnels, associations…). En parallèle, une mission des inspections générales a été lancée le 28 mars 2019 pour évaluer le plan chlordécone III et faire des propositions pour le nouveau plan IV. Les objectifs et les moyens déployés après 2020 seront définis sur la base des conclusions de la phase locale de co-construction et du rapport des inspections générales attendues en février 2020. D'ores et déjà, il est néanmoins certain que le ministère chargé de la santé continuera à soutenir les mesures de réduction des expositions, en particulier le programme JAFA (jardins familiaux) mis en œuvre par les agences régionales de santé, ainsi que les programmes de protection des populations vulnérables (femmes enceintes, en âge de procréer…) et d'éducation à la santé. Le ministère continuera en outre à soutenir les études sur la connaissance des expositions (étude KANNARI II sur l'imprégnation) et sur les impacts sur la santé, notamment sur le cancer de la prostate avec un programme de recherche lancé fin 2019 par l'Institut National de Cancer (INCa) sur 5 ans ainsi que plusieurs études épidémiologiques en cours telles que Timoun et KP-Caraïbes. Sur le sujet du suivi médical et du dépistage de la chlordéconémie, le ministère chargé de la santé a demandé à la Haute autorité de santé (HAS) d'évaluer la pertinence de doser, de façon individuelle, la chlordécone dans le sang et, le cas échéant, d'un remboursement par l'assurance maladie ; ces travaux seront menés en 2020. Enfin, comme s'y était engagé le Président de la République, plusieurs chantiers se poursuivront pour améliorer l'indemnisation des professionnels exposés à la chlordécone avec une amélioration du dispositif des tableaux de maladies professionnelles ou encore la mise en place d'un fonds d'indemnisation pour les victimes de maladies professionnelles liées aux pesticides. En termes de communication et d'information de la population, il faut rappeler que le site chlordecone-infos.fr, géré par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), met l'ensemble des informations sur la chlordécone à la disposition de tous. Enfin, s'agissant des mesures prises contre le commerce informel, elles entrent dans le cadre de la feuille de route 2019-2020 et de l'objectif de tendre vers le zéro chlordécone dans l'alimentation. Ainsi, les services du ministère chargé de l'agriculture (DAAF) et ceux du ministère chargé de l'économie et des finances (DIECCTE) ont renforcé les contrôles en 2019 en augmentant de 30 % le nombre de contrôles en matière de détection de chlordécone dans les denrées, y compris sur le secteur informel ; cette pression de contrôle sera maintenue en 2020.