15ème législature

Question N° 12996
de M. Jean-Luc Lagleize (Mouvement Démocrate et apparentés - Haute-Garonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > animaux

Titre > Engagements du Gouvernement face aux surmortalités de colonies abeilles

Question publiée au JO le : 09/10/2018 page : 8943
Réponse publiée au JO le : 19/02/2019 page : 1610
Date de changement d'attribution: 16/10/2018
Date de renouvellement: 15/01/2019

Texte de la question

M. Jean-Luc Lagleize alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation critique dans laquelle se trouvent de nombreux apiculteurs, qui font face à une catastrophe tant écologique qu'économique liée à la perte massive de colonies d'abeilles dont ils sont victimes. Incapables de produire du miel en quantité suffisante, ces exploitations apicoles sont dans l'impossibilité de vivre de leur métier et demandent la mise en place d'un plan exceptionnel de sauvegarde des exploitations sinistrées. Face à ce constat inquiétant, il paraît aujourd'hui nécessaire que le Gouvernement s'engage de deux manières complémentaires. Tout d'abord en mettant en œuvre un plan de soutien et de sauvegarde dédié aux apiculteurs sinistrés, afin d'éviter que des exploitations apicoles disparaissent faute d'un engagement concret des pouvoirs publics. Ces exploitations apicoles font partie du patrimoine culturel, agricole et gastronomique et doivent donc être soutenues. Ensuite, en accélérant les actions pour éviter une extinction de masse des abeilles et des insectes pollinisateurs. Il est d'ailleurs utile de rappeler que la biodiversité est essentielle à la survie, mais qu'elle rend aussi d'importants services économiques. Les insectes pollinisateurs, dont les abeilles font parties, sont notamment indispensables à certaines productions végétales qui représentent entre 5 % à 12 % de la valeur totale de la production végétale française, soit un montant compris entre 2 et 5 milliards d'euros. Protéger la biodiversité ne doit donc plus être perçu comme un coût par les autorités publiques, mais comme un investissement dans l'avenir, un investissement dans un capital naturel dont la société tirera profit dans son ensemble. Il l'interroge donc sur les actions engagées pour la mise en œuvre urgente d'un plan de sauvegarde des apiculteurs sinistrés et le renforcement de la protection des abeilles et des insectes pollinisateurs.

Texte de la réponse

Alors que près de 80 % des espèces de plantes dépendent des insectes pollinisateurs dont les abeilles, on observe depuis plusieurs années un déclin et un affaiblissement des colonies d'abeilles. D'après une enquête réalisée par le ministère chargé de l'agriculture, le taux moyen de mortalité durant l'hiver 2017-2018 avait atteint près de 29,4 % (contre un taux naturel de 10 %). Cette mortalité s'explique par une pluralité de phénomènes, dont le recours aux produits phytopharmaceutiques ou le parasite varroa. Face à ce constat, un dispositif d'aide exceptionnel pour les apiculteurs impactés par cette surmortalité a été mis en place en 2018. Ce dispositif soutient le renouvellement du cheptel apicole à travers une aide forfaitaire de 80 euros par essaim acheté. Les apiculteurs éligibles sont les apiculteurs ayant plus de cinquante ruches, ayant subi une mortalité hivernale de plus de 30 % de leur cheptel et procédé à un traitement anti-varroa. Afin de répondre au besoin de trésorerie des apiculteurs touchés, une avance a été versée dès l'instruction des dossiers terminée. Les apiculteurs ont jusqu'à la fin du printemps 2019 pour réaliser les achats d'essaims et transmettre les factures. En termes de protection des pollinisateurs, le ministère de la transition écologique et solidaire, et le ministère de l'agriculture et de l'alimentation ont annoncé le 5 février 2018 la mise en place d'un groupe de travail, en vue de renforcer les mesures de protection des abeilles et autres insectes pollinisateurs de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, à la suite de la parution de l'avis de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) relatif à la protection des abeilles et des autres insectes pollinisateurs. Ce groupe de travail associera l'ensemble des parties prenantes, et visera à définir les mesures permettant de limiter les risques liés aux produits phytosanitaires pour les pollinisateurs, tout en prenant en compte les contraintes techniques pour les agriculteurs. Ces travaux s'inscrivent dans le prolongement des initiatives déjà prises par le Gouvernement français en faveur de la protection des pollinisateurs et de la lutte contre le déclin des colonies d'abeilles domestiques et des pollinisateurs sauvages. Ainsi, le Gouvernement a interdit l'utilisation de tous les produits phytopharmaceutiques de la famille des néonicotinoïdes depuis le 1er septembre 2018, en raison des risques qu'ils font courir aux populations d'insectes pollinisateurs. Cette interdiction va être étendue, en application de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous du 30 octobre 2018, aux substances insecticides possédant un mode d'action identique à celui des substances de la famille des néonicotinoïdes. De plus, le Gouvernement va renouveler sa demande à la Commission européenne d'actualiser dans les meilleurs délais les méthodologies d'évaluation des risques pour les pollinisateurs qui sont mises en œuvre au niveau européen pour approuver les substances actives. Au-delà de la toxicité aiguë, la toxicité chronique pour les abeilles doit être mieux prise en compte pour améliorer le niveau de protection des pollinisateurs, dès lors que les méthodes analytiques le permettent. En termes de lutte contre les agents biologiques responsables d'affaiblissement et de mortalités, compte tenu des enjeux sanitaires et économiques liés à varroa destructor, une stratégie nationale de prévention, surveillance et lutte a été élaborée afin de réduire la pression d'infestation des ruchers avec des travaux techniques menés par la fédération nationale des groupements de défense sanitaire. La filière, éventuellement par son interprofession nouvellement créée, doit s'emparer de façon prioritaire de ce sujet en s'engageant dans une stratégie réglementaire face à ce parasite. Enfin, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation soutient le développement de la filière, tant pour augmenter la production de miel et de produits de la ruche, dont la France est un importateur net, que pour garantir le rôle fondamental que jouent les colonies dans la pollinisation. À ce titre, le programme apicole européen constitue le principal instrument financier pour améliorer les conditions de production et de commercialisation des produits de l'apiculture. Ce programme, doté d'un budget de 21,3 millions d'euros sur la période 2017-2019 dont la moitié provient de crédits nationaux, finance le renouvellement du cheptel, des actions de lutte contre le varroa, la recherche sur la mortalité apicole et la recherche génétique, l'assistance technique et la majeure partie des actions de l'institut technique et scientifique de l'abeille et de la pollinisation. En outre, la mise en œuvre en France de la politique agricole commune permet de favoriser le développement de cultures et de pratiques favorables à l'abeille, aussi bien dans le cadre du premier pilier à travers le « verdissement », avec les surfaces d'intérêt écologique et la diversification des cultures, et les soutiens couplés aux protéagineux et aux légumineuses, que du second pilier, au moyen des mesures agro-environnementales et climatiques.