Question écrite n° 13071 :
Financement urgences de la main - Fondation du diaconat de Mulhouse

15e Législature

Question de : M. Éric Straumann
Haut-Rhin (1re circonscription) - Les Républicains

M. Éric Straumann attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la remise en cause par l'ARS Grand-Est du financement de l'activité de prise en charge des urgences de la main par la Fondation de la maison du diaconat de Mulhouse (Haut-Rhin). Cette fondation privée à but non lucratif, reconnue d'utilité publique par un décret impérial du 14 juillet 1865, regroupe en Alsace 18 établissements et structures dans les secteurs sanitaire, social et médico-social, (MCO, soins de suites et de réadaptation, USLD, EHPAD, soins à domicile, adolescents en difficulté, formation) et s'appuie sur 3 000 professionnels. Elle fédère également 18 établissements « partenaires », dont la plupart sont des EHPAD et adhèrent à un réseau de gérontologie dénommé Alsa'Seniors, créé par la Fondation. Selon les chiffres de l'ARS Grand Est, la Fondation est le quatrième acteur de santé du Grand Est, derrière les CHRU de Nancy et Strasbourg et le CHR de Metz, mais devant le CHRU de Reims et les centres hospitaliers de Colmar et Mulhouse. Depuis 1988, la Fondation prend en charge les urgences de la main sur le site de la clinique du Diaconat-Roosevelt (Mulhouse). Depuis 30 ans donc, cette clinique est identifiée par la population du département comme le site de référence dans ce domaine. Progressivement, l'équipe médicale s'est étoffée, pour compter aujourd'hui 7 (et bientôt 8) chirurgiens de la main, dont l'expertise est reconnue. Depuis 1988, près de 140 000 urgences de la main ont été prises en charge (dont 9 067 en 2017), 18 000 interventions chirurgicales ont été réalisées en urgence au bloc opératoire (dont 913 en 2017) et 205 000 consultations de suite de soins ont été assurées (dont 6 762 en 2017). Depuis juillet 2013, sur décision de l'Agence régionale de santé d'Alsace, après 25 années de fonctionnement à titre quasiment bénévole, l'unité SOS-Main a le statut de structure d'urgence, spécialisée dans la prise en charge des urgences de la main. Ce statut induit des financements spécifiques, versés par l'ARS (désormais Grand est), représentant annuellement environ 500 000 euros. Or l'ARS Grand Est envisage désormais de remettre en cause l'existence même de cette activité d'urgence sur le site de la clinique du Diaconat Roosevelt, non pas pour un motif de qualité ou de sécurité déficiente, mais pour un motif « réglementaire » ubuesque. L'ARS Grand Est observe qu'il s'agit d'une activité spécialisée de prise en charge des urgences (en l'occurrence, urgences main), ce qui constituerait une « atypie » au regard de la réglementation, qui ne reconnaîtrait que des urgences polyvalentes. L'ARS d'Alsace n'avait pas eu cette lecture lorsqu'elle avait accordé à SOS-Main le statut de structure d'urgence. Ce faisant, l'ARS Grand Est n'entrevoit d'autre solution que d'inviter la Fondation à regrouper les urgences de la main et les urgences « polyvalentes » sur un même site, en l'occurrence la clinique du Diaconat-Fonderie à Mulhouse ; à défaut, le dispositif de prise en charge des urgences de la main cessera d'être financé, dès la fin de l'année 2018. Malheureusement, ce regroupement n'est techniquement pas envisageable. La Fondation a répondu le 6 mai 2016 à un appel à projets lancé par l'ARS Grand-Est et a présenté un projet de création d'un circuit court dédié à la chirurgie de la main. Il s'agissait d'aménager sur un plateau de 800 m2 (dans des locaux anciennement dédiés à la maternité) un circuit spécifique à la chirurgie de la main, que ce soit en réglé ou en urgence, mettant l'accent sur la chirurgie ambulatoire et s'appuyant sur deux salles d'opération et une salle de réveil dédiées. L'ARS a reconnu tout l'intérêt de ce projet mais ne l'a pas retenu. Malgré l'absence de soutien financier de la part de l'ARS, ce projet est devenu une réalité. La Fondation a investi plus de 1,4 millions d'euros dans la création et l'équipement de ce circuit court, qui a été mis en service le 3 septembre 2018. La concrétisation de ce projet de circuit court de chirurgie de la main constitue la dernière brique d'une reconstruction de l'offre de soins privée engagée en 2011, avec le rachat (sur incitation de l'ARS) de la clinique Saint-Sauveur, devenue Diaconat-Fonderie. Dès 2012, la Fondation a engagé la redistribution complète des activités médicales entre les cliniques du Diaconat-Roosevelt et du Diaconat-Fonderie, au prix de lourds et coûteux travaux de modernisation et de reconfiguration des locaux. En 7 ans, dans le cadre de son nouveau projet médical (soumis à l'ARS), la Fondation a supprimé divers doublons, répondant ainsi à plusieurs prescriptions du SROS-PRS : il existait deux maternités, deux services de cardiologie, deux USIC, deux services de chirurgie viscérale, deux services d'urologie, deux services de chirurgie vasculaire, deux plateaux d'endoscopie digestive, deux services d'ophtalmologie, deux services de chirurgie esthétique. Chaque site s'est spécialisé, les équipes médicales et paramédicales ont été réparties sur les deux structures composant le nouveau Pôle sanitaire privé mulhousien, des équilibres ont été trouvés avec les praticiens libéraux (chirurgiens, anesthésistes, ...), dont certains ont dû modifier l'implantation de leur cabinet en ville pour suivre leur discipline. Regrouper aujourd'hui les urgences signifierait regrouper les passages et les consultations post-opératoires ou de suivi, mais également les interventions chirurgicales, non seulement celles réalisées dans le cadre de l'urgence, mais également celles réalisées dans le cadre de l'activité réglée, afin d'optimiser l'organisation et la sécurité des prises en charge. Ce sont donc 5 200 interventions de chirurgie du membre supérieur et 15 800 passages et consultations qu'il faudrait faire basculer sur le site du Diaconat-Fonderie. Ce dernier est dans l'incapacité d'accueillir autant d'opérations et de consultations en sus, les salles d'opération et les locaux de consultation existants ne le permettant pas. Pour absorber ces activités supplémentaires, il faudrait faire basculer sur le site du Diaconat-Roosevelt un nombre similaire d'interventions chirurgicales réalisées pour l'heure sur le site du Diaconat-Fonderie, en transférant des disciplines et des équipes médicales et paramédicales entières, et en adaptant à nouveau les locaux, ce qui est juste impensable ! Il n'est donc pas concevable pour la Fondation de redistribuer une nouvelle fois les activités entre les deux cliniques composant le Pôle sanitaire privé mulhousien. Il est précisé à ce stade que le centre hospitalier de Mulhouse a récemment fait savoir qu'il n'avait pas pour ambition de se doter d'un SOS-Main, et encore moins de participer à la permanence des soins dans ce domaine. Faute d'accord d'ici la fin de l'année 2018, la Fondation sera dans l'obligation de fermer la polyclinique de 20 heures à 8 heures et le week-end, afin de compenser au moins partiellement la disparition des financements liés aux urgences de la main, et ne pourra plus assumer en journée que les urgences chirurgicales pouvant être insérées dans le programme réglé. Les patients seront orientés pour la plupart vers d'autres SOS-Main, à Strasbourg ou à Besançon. Il paraît inconcevable qu'une structure offrant de telles prises en charge, alliant qualité et sécurité des soins, puisse cesser d'exister pour de tels motifs. Une telle situation engendrerait des difficultés d'accès aux soins, notamment pour les plus démunis (le bassin de Mulhouse et environs compte une forte population ouvrière et 8 quartiers prioritaires), et des pertes de chance. En vue de sortir de cette impasse, la Fondation a formulé trois propositions par courrier à l'ARS en date du 4 juillet 2018 ; ce courrier n'a pas reçu de réponse à ce jour. Aussi, la Fondation vient de saisir Mme la ministre. Il lui demande de trouver une solution à cette « atypie » réglementaire qui met en péril un fleuron de l'offre de soins du Haut-Rhin, rendant depuis 30 ans des services considérables à la population.

Réponse publiée le 16 avril 2019

L'apport d'une prise en charge spécialisée assurant en permanence l'accueil de nouveaux patients telle que le met en œuvre la Clinique du Diaconat Roosevelt avec l'unité SOS-Main est très structurant dans l'offre de soins du territoire. Cette activité est identifiée comme pôle d'excellence et près de 10 000 patients ont été pris en charge l'année passée. Comme signalé par l'agence régionale de santé (ARS) Grand-Est, cette activité ne constitue cependant pas une « structure des urgences » au sens du code de la santé publique et ne peut donc à ce titre bénéficier du forfait « accueil et traitement des urgences » (ATU) et du forfait annuel des urgences « FAU ». L'éligibilité à ces forfaits est conditionnée à la détention d'une autorisation de médecine d'urgence, mise en œuvre dans le respect des conditions d'implantation et des conditions techniques de fonctionnement en vigueur. Celle-ci peut être délivrée aux structures répondant notamment à cinq critères cumulatifs : - la présence d'urgentistes ; - l'accueil de tout type de malade dans le cadre d'urgences générales ou pédiatriques (cf. article R.6123-18 du code de la santé publique) ; - la présence d'une salle de déchocage ; - la présence d'une unité d'hospitalisation de courte durée (UHCD) ; - une ouverture H24. C'est sous ces conditions que l'article R. 162-3-1 du code de la sécurité sociale dispose que « ces forfaits (les ATU) sont facturés pour chaque passage non-programmé dans un service ou une unité d'accueil et de traitement des urgences autorisé, dès lors que ce passage n'est pas suivi d'une hospitalisation en service de médecine, de chirurgie, d'obstétrique ou d'odontologie au sein de l'établissement ». Concernant le forfait annuel des urgences (FAU), il vient couvrir les charges fixes liées « aux soins dispensés dans les services et les unités d'accueil et de traitement des urgences ». Si l'unité SOS-Main ne peut être qualifiée en droit d'urgences et donc être financée en tant que telle, elle présente un fonctionnement susceptible d'être valorisé sur décision de ARS au titre de la permanence des soins en établissement de santé (PDSES), sous réserve de répondre à un besoin spécifiques défini en la matière par l'ARS dans le cadre de son projet régional de santé.

Données clés

Auteur : M. Éric Straumann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Dates :
Question publiée le 9 octobre 2018
Réponse publiée le 16 avril 2019

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