15ème législature

Question N° 13087
de Mme Anne Genetet (La République en Marche - Français établis hors de France )
Question écrite
Ministère interrogé > Action et comptes publics
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > impôts et taxes

Titre > Articulation entre l'exit tax française et le futur dispositif européen ATAD.

Question publiée au JO le : 09/10/2018 page : 8935
Réponse publiée au JO le : 28/05/2019 page : 4977
Date de changement d'attribution: 16/10/2018

Texte de la question

Mme Anne Genetet interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics sur le projet de réforme de l'exit tax. Alors que le Président de la République avait annoncé en mai dernier son intention de supprimer le mécanisme, le Gouvernement s'orienterait désormais vers un recentrage afin de cibler spécifiquement les cessions intervenant peu de temps après le départ de France (moins de 2 ans), ceci dans le but d'éviter les cas d'optimisations et d'abus. Cette révision de l'exit tax, prévue à l'occasion du projet de loi de finance initial pour 2019, interviendrait alors que la directive européenne dite « ATAD » (Anti-Tax Avoidance Directive) sur la lutte contre les pratiques d'évasion fiscale en date du 12 juillet 2016 entrera en application le 1er janvier 2019, pour une transposition dans le droit français programmée au plus tard pour le 31 décembre 2019. Son article 5 prévoit notamment la mise en place d'une « imposition à la sortie » des entreprises, basée sur la valeur de leurs actifs transférés, avant que ces derniers ne soient délocalisés en dehors de l'Union. Si la suppression de l'exit tax actuellement en vigueur avait été compensée par une création à un autre niveau (européen), cela ne devrait pas être le cas ici, et nous nous dirigeons au contraire vers un cumul des dispositifs. Au regard de ces considérations, elle souhaiterait donc savoir comment le Gouvernement prévoit d'articuler l'exit tax française révisée et la futur exit tax européenne, de manière à ce que leur cumul ne constitue pas un frein à l'attractivité.

Texte de la réponse

Deux dispositifs d'« exit tax » existent actuellement en droit fiscal français : l'un applicable aux personnes physiques qui transfèrent leur domicile fiscal hors de France et l'autre aux sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés (IS) qui transfèrent leur siège social ou un établissement hors de France. S'agissant des personnes physiques, l'article 112 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a remplacé le dispositif dit d'« exit tax » par un nouveau dispositif anti-abus applicable aux transferts de domicile fiscal intervenant à compter du 1er janvier 2019. L'article 167 bis du code général des impôts (CGI) prévoit ainsi l'imposition immédiate, notamment, des plus-values latentes constatées sur les droits sociaux, valeurs, titres ou droits lors du transfert par le contribuable de son domicile fiscal hors de France, lorsque ces mêmes droits sociaux, valeurs titres ou droits représentent au moins 50 % des bénéfices sociaux d'une société ou lorsque leur valeur globale excède 800 000 € à cette même date. Ces plus-values sont imposables à l'impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 12,8 %, ou soumises au barème progressif en cas d'option expresse et globale du contribuable dans les conditions prévues au 2 de l'article 200 A du CGI. Les plus-values sont également imposables aux prélèvements sociaux en vigueur lors du transfert du domicile fiscal hors de France. Afin de recentrer ce dispositif sur les risques d'optimisation les plus manifestes, consistant en un transfert de domicile hors de France des contribuables pour y céder rapidement leurs titres, le délai de conservation des titres ou droits concernés par le contribuable, au-delà duquel ce dernier bénéficie selon le cas d'un dégrèvement ou d'une restitution de l'impôt afférent aux plus-values latentes, est ramené à deux ans à compter du départ hors de France, ou à 5 ans lorsque la valeur globale de ces titres ou droits excède 2,57 millions d'euros à la date du transfert. Par ailleurs, les conditions permettant de bénéficier du sursis de paiement sont aménagées : le sursis de paiement est accordé de plein droit lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal non seulement dans un État membre de l'Union européenne (UE) ou certains Etats parties à l'accord sur l'espace économique européen, mais également dans tout autre État ou territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, ainsi qu'une convention d'assistance mutuelle en matière de recouvrement. La constitution de garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor ne reste exigée que des contribuables transférant leur domicile dans un Etat ou territoire n'ayant pas conclu avec la France de telles conventions. Les obligations déclaratives sont par ailleurs simplifiées. Cette réforme permet ainsi à la fois de maintenir un dispositif ciblé de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales tout en renforçant l'attractivité de la France pour les investisseurs. Pour les sociétés passibles de l'IS, le 2 de l'article 221 du CGI prévoit que le transfert hors de France du siège ou d'un établissement de la société entraîne en principe les mêmes conséquences fiscales que celles de la cessation d'entreprise, à savoir l'imposition en France des bénéfices d'exploitation non encore imposés et des plus-values latentes, ainsi que celles en report et en sursis, constatées sur les éléments de l'actif immobilisé. Toutefois, lorsque le transfert du siège ou de l'établissement est effectué vers un autre Etat membre de l'Union européenne (UE) ou vers un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen (EEE), les conséquences fiscales diffèrent selon que le transfert est ou non accompagné du transfert d'éléments d'actif. Ainsi, lorsque le transfert est accompagné du transfert d'éléments d'actif, il entraîne l'imposition des plus-values latentes, en report et en sursis constatées sur les seuls éléments d'actif immobilisé transférés. Dans ce cas, l'impôt dû est acquitté dans les deux mois suivant le transfert des actifs soit pour la totalité de son montant soit, sur demande expresse de la société, de façon fractionnée, par cinquième. Lorsque le transfert ne s'accompagne d'aucun élément d'actif, il n'entraîne aucune imposition à raison des actifs qui demeurent au bilan de l'établissement français de la société. Par ailleurs, l'article 5 de la directive (UE) n° 2016/1164 du Conseil du 12 juillet 2016 établissant des règles pour lutter contre les pratiques d'évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur (dite « ATAD » pour anti-tax avoidance directive) prévoit des règles d'imposition particulières à la sortie pour les contribuables à l'IS qui transfèrent leurs actifs ou leur résidence fiscale vers un autre Etat membre de l'Union européenne ou vers un pays tiers. Les Etats membres doivent transposer ces dispositions au plus tard le 31 décembre 2019, pour une application au plus tard le 1er janvier 2020. La transposition de cet article 5 de la directive ATAD ne concerne que les dispositions du 2 de l'article 221 du CGI et non celles de l'exit tax applicable aux personnes physiques. Par suite, une telle transposition ne constituerait pas un dispositif supplémentaire à celui de l'article 167 bis du CGI.