Question de : M. Bruno Bilde
Pas-de-Calais (12e circonscription) - Non inscrit

M. Bruno Bilde interroge Mme la ministre de la culture sur la future loi audiovisuelle et le projet de financement de France Télévision par l'ensemble des contribuables français. Le 4 octobre 2018, un rapport d'information sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l'ère numérique, a été déposé par la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale. La proposition 14 du rapport fait figure de marqueur idéologique : « universaliser l'assiette de la contribution à l'audiovisuel public, par le biais d'une contribution forfaitaire par foyer, tout en maintenant son montant et en étendant aux nouvelles personnes assujetties à son paiement les exonérations sous conditions de ressources existantes ». Le 5 octobre 2018, le rapporteur du texte, Mme Aurore Bergé, porte-parole du groupe La République en Marche, réaffirmait sur RTL sa volonté de faire payer la redevance TV à tous les usagers, y compris ceux qui ne disposent pas de poste de télévision. En clair, ajouter un impôt de 139 euros à tous les contribuables déjà matraqués par la politique fiscale du Gouvernement et les diverses mesures subies depuis un an (augmentation de la CSG, hausse du forfait hospitalier, explosion du prix des carburants, taxe sur le tabac...). Au-delà du caractère injuste de cette proposition qui vise à ponctionner des Français qui ne regardent pas la télévision, se pose la question de la légitimité du financement du service public de l'audiovisuel par les citoyens. En effet, si on considère que l'audiovisuel public est un service public et donc qu'il « est logique qu'il soit financé par tous », ce service public doit en assumer le statut en garantissant le pluralisme de l'information, la diversité des débats et une représentation équitable de toutes les opinions et courants de pensée qui traversent la société française. Or, il est constaté que France Télévision, notamment, sélectionne ses émissions, ses sujets, ses invités en fonction d'orientations qui ne correspondent pas au devoir de neutralité d'un service public digne de ce nom. Ainsi, quand Laurent Ruquier déprogramme Eric Zemmour de son émission « On n'est pas couché » du 20 octobre 2018 ou quand France 5 annule Michel Onfray le 8 octobre 2018, où se trouve le service public ? Avant de réformer la redevance et de l'imposer à tous les Français, le Gouvernement serait bien inspiré de travailler à une refonte générale de l'audiovisuel public qui veillerait à la juste représentation de tous les Français. Il lui demande si le service public devient l'organe du pouvoir et le relai d'une pensée unique, pourquoi les Français devraient-ils consentir à le financer.

Réponse publiée le 15 janvier 2019

Le Gouvernement a entamé un processus de transformation de l'audiovisuel public en 2018. Le projet de loi de finances pour 2019 constitue la première étape de mise en œuvre de cette réforme, qui doit s'achever en 2022, et qui vise à adapter l'audiovisuel public à un environnement, notamment technologique, en pleine mutation, et à renforcer son efficacité et sa valeur ajoutée. La contribution à l'audiovisuel public (CAP), principale ressource des entreprises qui le composent, est un impôt dont la collecte est adossée à celle de la taxe d'habitation depuis 2005, et dont sont redevables les foyers détenteurs d'un équipement de réception de la télévision (article 1605 du code général des impôts). Au demeurant, le montant de la CAP en France (139 € dans l'hexagone et 89 € en outre-mer en 2018) est largement inférieur à celui d'autres pays européens ayant un secteur audiovisuel public important, comme le Royaume-Uni (164 € en 2018) ou l'Allemagne (216 € en 2018). Un certain nombre de parlementaires ont d'ores et déjà appelé de leurs vœux une évolution de la CAP indépendamment de son lien avec la taxe d'habitation, pour deux raisons. D'une part, compte tenu du développement de l'accès aux services audiovisuels sur les nouveaux écrans, le taux d'équipement en téléviseurs des foyers français ne cesse de diminuer et va entraîner une érosion du rendement de la CAP. D'autre part, l'évolution des usages pose une question d'équité fiscale entre les ménages selon la technologie utilisée pour accéder au même service public, en particulier au moment où il est demandé à l'audiovisuel public de développer ses services numériques. Aucune décision n'a cependant été prise à ce stade, le Gouvernement ayant fait le choix d'avancer en priorité sur les missions, les axes stratégiques et le périmètre de l'audiovisuel public. En tout état de cause, l'objectif de la réforme de la CAP ne saurait être d'augmenter les recettes de l'audiovisuel public, mais de lui assurer un financement pérenne, de manière à lui donner les moyens d'accomplir ses missions, parmi lesquelles la promotion du pluralisme des courants de pensée et d'opinion, ainsi que la représentation de la diversité dans les programmes audiovisuels, sous le contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). C'est notamment le cas de France Télévisions, dont le cahier des missions et des charges prévoit dans son préambule que « la télévision de service public a vocation à constituer la référence en matière de qualité et d'innovation des programmes, de respect des droits de la personne, de pluralisme et de débat démocratique ». Son article 35 garantit « l'indépendance et le pluralisme de l'information ainsi que l'expression pluraliste des courants de pensée et d'opinion », sous le contrôle du CSA qui « veille à la qualité et à la diversité des programmes […]. Il peut formuler des propositions sur l'amélioration de la qualité des programmes ». Il n'appartient de fait pas au ministre de la culture d'intervenir sur les choix éditoriaux des chaînes du service audiovisuel public. Aux termes de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, les chaînes de télévision, publiques comme privées, sont seules responsables de leur programmation dans le cadre des missions qui leur sont confiées par le législateur, sous le contrôle du CSA. Ce principe fondamental garantit l'indépendance des sociétés de l'audiovisuel public vis-à-vis du Gouvernement.

Données clés

Auteur : M. Bruno Bilde

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Culture

Dates :
Question publiée le 16 octobre 2018
Réponse publiée le 15 janvier 2019

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