15ème législature

Question N° 13358
de M. Olivier Damaisin (La République en Marche - Lot-et-Garonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur (Mme la ministre auprès du ministre d'État)
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > presse et livres

Titre > Ouvrages illégaux - Appels à la haine et la violence

Question publiée au JO le : 16/10/2018 page : 9210
Réponse publiée au JO le : 03/12/2019 page : 10542
Date de changement d'attribution: 16/10/2018

Texte de la question

M. Olivier Damaisin appelle l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la diffusion illégale d'ouvrages incitant à la haine et la violence. La vente de livres en France est soumise à réglementation. Or il est à noter que des livres salafistes incitant à « humilier les juifs et les athées », « à battre » ou « même lapider les femmes » sont largement diffusés et ne se heurtent à aucun contrôle, puisqu'ils ne respectent pas, par exemple, l'obligation de dépôt légal. Pire, certains sont même complètement « fantômes », leurs éditeurs étant dépourvus d'existence juridique. Pour autant, le réseau de diffusion est large, il faut ajouter les stands confessionnels sur les marchés, les nombreux sites de vente sur internet, à la centaine de libraires qui les commercialisent en toute illégalité. Ces ouvrages diffusent des idées en totale contradiction avec l'article premier de la Constitution, complété il y peu par le Parlement, selon lequel la France « assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction de sexe ». Or, dans ces écrits, il est à noter que les femmes sont particulièrement dénigrées, ce qui les exposent, de fait, à des comportements violents et répréhensibles par la loi. M. le député souligne que l'extrémisme d'aucun propos, quels que soient par ailleurs les courants de pensées dont il est issu, n'est excusable. La société française souffre des « infox », des fausses informations colportées par certains médias dits « alternatifs » ou les réseaux sociaux, et les jeunes générations, en particulier, y sont très exposées. Il lui demande d'apporter un soin particulier au contrôle de ces ouvrages illégaux sur le territoire national, si, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, la circulation de ces livres, non conformes à la législation, a bien été prise en compte et si des moyens adaptés sont déployés sur le terrain.

Texte de la réponse

La liberté de pensée, de conscience et de religion, consacrée par l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 1er de la Constitution, impose le respect des différentes convictions ou croyances dont l'Etat garantit la libre expression. Les textes religieux relèvent de ces libertés. Ils ne peuvent faire l'objet de restrictions relatives à leur publication, quand bien même certains passages peuvent heurter la sensibilité d'un lectorat s'ils ne sont pas replacés dans le contexte de leur écriture, ou sont employés à ces fins. En revanche, ces ouvrages d'inspiration religieuse, comme l'ensemble des publications, sont susceptibles de se voir appliquer les dispositions de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse, qui répriment les provocations à la haine, à la discrimination ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ainsi qu'à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap. De même,  ces ouvrages ne peuvent inciter à la commission d'actes de terrorisme ou en faire l'apologie publique, conformément à l'article 421-2-5 du code pénal. La question souligne l'usage qui peut être fait de certains passages de ces ouvrages, choisis et associés intentionnellement, pour prôner un discours de provocation à la haine et à la violence. A ce titre, le ministère de l'intérieur veille systématiquement à signaler à l'autorité judiciaire tous les faits, portés à sa connaissance, qui lui semblent constitutifs d'une infraction pénale et notamment les appels manifestes à la violence ou à la haine y compris lorsqu'ils sont publiés dans des ouvrages ou sur internet. Il en est de même s'agissant des violations des règles du dépôt légal, comme le fait de se soustraire volontairement à l'obligation de dépôt légal prévu et sanctionné par l'article L. 133-1 du code du patrimoine. Enfin, il existe des dispositions législatives permettant de lutter contre la diffusion de fausses informations. Ainsi, l'article 27 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse sanctionne de 45 000 euros d'amende la publication, la diffusion ou la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses, lorsque, faite de mauvaise foi, elle aura troublé la paix publique ou aura été susceptible de la troubler. En outre, la loi relative à la lutte contre la manipulation de l'information a introduit dans le code électoral des dispositions permettant de lutter contre l'allégation ou l'imputation trompeuse ou d'un fait inexact durant la période électorale. L'ensemble de ces instruments légaux est effectivement mobilisé, dans le cadre des politiques de lutte contre la radicalisation et de garantie et défense des principes et valeurs de la République, auxquelles le ministère de l'intérieur est fermement attaché.