Pratique des fouilles en milieu carcéral
Question de :
M. Buon Tan
Paris (9e circonscription) - La République en Marche
M. Buon Tan attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les dysfonctionnements engendrés par l'interdiction de la pratique des fouilles intégrales en milieu carcéral. L'article 57 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 stipule que les fouilles intégrales doivent être justifiées par la présomption d'une infraction ou par les risques que le comportement des personnes détenues fait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l'établissement. De surcroît, les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou l'utilisation des moyens de détection électroniques sont insuffisants. Pourtant, les portiques installés aux parloirs s'avèrent soit très peu utilisés, soit peu performants, ne permettant pas la détection de tous les objets potentiellement dangereux. Les fouilles ont donc lieu sur suspicion, et non de manière automatisée. Pourtant, en 2017, 90 000 objets illicites ont été saisis dans les prisons françaises. Les fouilles sur personnes ont représenté 36 % des saisies. Dans bien des cas, les objets saisis rentrent dans l'enceinte pénitentiaire par le biais des visiteurs extérieurs qui se rendent au parloir. Pour cela, les syndicats de surveillants pénitentiaires demandent régulièrement l'autorisation du recours aux fouilles intégrales dès lors que les détenus auraient un contact avec l'extérieur. Il en va là de la lutte contre le trafic en tout genre (stupéfiants, téléphones portables) et de la protection du personnel et des détenus. Il lui demande donc comment le Gouvernement compte renforcer la lutte contre le trafic en milieu carcéral et la sécurité du personnel.
Réponse publiée le 5 mars 2019
La loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement a modifié le champ de l'article 57 de la loi pénitentiaire : auparavant, la nécessité d'individualiser au cas par cas les fouilles des personnes détenues pouvait s'avérer complexe notamment dans les établissements sur-occupés, compte tenu des difficultés à repérer les personnes détenues à l'origine ou bénéficiaires de trafics. La nouvelle rédaction de l'article 57 permet, en sus des fouilles individualisées, le recours à tout type de fouilles en cas de suspicions sérieuses d'introduction d'objets ou de substances interdits en détention ou constituant une menace pour la sécurité des personnes ou des biens, sans qu'il soit nécessaire d'individualiser cette décision au regard de la personnalité du détenu. Une note de la direction de l'administration pénitentiaire du 2 août 2017 est venue rappeler que ce nouveau régime juridique renforce les moyens à la disposition des chefs d'établissement dans la lutte contre les trafics et la détention d'objets prohibés. Une vigilance accrue est notamment portée à l'issue des parloirs et des promenades, lorsque l'établissement déplore des projections extérieures. En outre, depuis la note du 12 septembre 2018, les agents pénitentiaires disposent de la faculté de décider de fouilles inopinées de cellules. Les fouilles de cellule constituent un geste professionnel essentiel participant à la sécurité des établissements pénitentiaires. Les surveillants, principaux acteurs de la détention et observateurs privilégiés du comportement des personnes détenues doivent pouvoir être à l'initiative d'un tel geste professionnel. Ces fouilles inopinées décidées par le surveillant viennent en complément de celles décidées par l'encadrement. Par ailleurs, la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, que le Parlement vient d'adopter en lecture définitive, apporte de nouvelles modifications à l'article 57 de la loi pénitentiaire. Elle exclut, en effet, de son champ d'application les fouilles par palpation et les fouilles intégrales réalisées à l'égard des personnes détenues qui, revenant de l'extérieur, sont restées en dehors de la surveillance constante des personnels pénitentiaires ou des forces de sécurité intérieure. Le déploiement à venir des équipes de sécurité pénitentiaire permettra à des agents pénitentiaires armés de procéder, sur l'ensemble de l'emprise foncière affectée au service public pénitentiaire et à ses abords immédiats, au contrôle des personnes à l'égard desquelles existe une ou plusieurs raisons sérieuses de penser qu'elles se préparent à commettre une infraction portant atteinte à la sécurité de l'établissement pénitentiaire tel que prévu par l'article 12.1 de la loi pénitentiaire. Un amendement a également été apporté à cet article, en vue de définir plus précisément les conditions d'usage d'intervention, et notamment d'usage de la force, de ces équipes, et d'élargir son champ d'application aux abords des établissements pénitentiaires, y compris en dehors de son emprise foncière, afin de permettre le déploiement de ce dispositif dans les établissements qui ne disposent pas de domaine. Enfin, s'agissant de la lutte contre l'introduction d'objets et de substances interdits au sein des établissements pénitentiaires, des opérations sont régulièrement menées, en lien avec les parquets du ressort, ceux-ci adressant des réquisitions aux services du ministère de l'intérieur ou des douanes disposant d'équipes cynotechniques.
Auteur : M. Buon Tan
Type de question : Question écrite
Rubrique : Lieux de privation de liberté
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 23 octobre 2018
Réponse publiée le 5 mars 2019