15ème législature

Question N° 14097
de M. Sylvain Maillard (La République en Marche - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > droits fondamentaux

Titre > Propos antisémites, racistes et homophobes sur la plateforme russe VK

Question publiée au JO le : 13/11/2018 page : 10107
Réponse publiée au JO le : 19/02/2019 page : 1680

Texte de la question

M. Sylvain Maillard attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le fait que, sur internet, la plateforme russe VK (VKontakte) offre une interface qui est utilisée par des extrémistes alors qu'elle n'est pas modérée. Sur VK, les néonazis publient des contenues et des images antisémites, racistes et homophobes d'une rare violence, et appelant au meurtre. Par ailleurs, le réseau russe ne dispose pas d'une représentation légale en France, susceptible d'être approchée par les autorités, aucun dialogue n'est possible. Or sur VK se constituent les pires infractions contrevenant aux dispositions pénales en matière de lutte contre le racisme et l'antisémitisme. Les textes sont publiés par des citoyens français et alimentés du territoire national. Considérant que des mesures adéquates doivent être prises, surtout après le tragique attentat qui a été perpétré contre une synagogue de Pittsburgh, il souhaiterait savoir comment le Gouvernement et particulièrement son ministère entendent lutter contre la prolifération inquiétante des propos tenus par certains internautes, contraire aux valeurs de la République française.

Texte de la réponse

Depuis de nombreuses années, le ministère de l'intérieur s'est fortement impliqué dans la lutte contre toutes les formes de contenus haineux. Ainsi, le ministère de l'intérieur veille systématiquement à signaler à l'autorité judiciaire tous les faits portés à sa connaissance qui lui semblent constitutifs d'infractions. En effet, ces pratiques doivent faire l'objet d'une réponse pénale, l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prohibant la provocation publique à la haine, à la discrimination ou à la violence ainsi que les diffamations et injures, lorsqu'elles sont commises à raison de l'origine, de l'appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ainsi qu'à raison du sexe, de l'identité sexuelle, de l'identité de genre ou du handicap. Au regard des dispositions de l'article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, peuvent être poursuivis en tant qu'auteur de l'infraction le directeur ou le codirecteur de la publication ou, à défaut, l'auteur du contenu ou, à défaut de l'auteur, le producteur, qualité que revêt le créateur d'une page sur un réseau social. Pour sa part, la plateforme russe VKontakte est un service de communication en ligne de type réseau social à l'instar de Facebook. Elle constitue donc un fournisseur d'hébergement au sens de l'article 6 I.-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique dite LCEN et échappe à ce titre au système de responsabilité précité. Les hébergeurs ne peuvent en effet être tenus pour responsables d'un contenu qu'ils stockent que si, ayant connaissance d'un contenu illicite s'adressant à un public français, ils ne l'ont pas retiré dans les meilleurs délais, dans les conditions prévues par les articles 6 I.-3 et 6 I.-5 de la LCEN. Ils ont en revanche l'obligation de mettre en place un dispositif permettant de signaler certains contenus illicites, dont les contenus haineux que vous déplorez. Cependant, à ce jour, très peu de comptes Vkontakte ont été portés à la connaissance de la police nationale via la plate-forme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (PHAROS) en raison de leur contenu. Plus largement, s'agissant de tels contenus illicites, les services enquêteurs et judiciaires butent régulièrement sur la difficulté à en identifier les auteurs. En outre, bien que la loi pénale française soit applicable à ces situations en vertu des articles 113-1 et suivants du code pénal, il existe des difficultés à donner effet aux injonctions judiciaires françaises à l'étranger. Aussi, afin de mettre un terme au trouble provoqué par ces contenus, il peut être fait application des mesures d'urgence contenues dans la loi française. En effet, selon l'article 50-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, « lorsque les faits visés par les articles 24 et 24 bis résultent de messages ou informations mis à disposition du public par un service de communication au public en ligne et qu'ils constituent un trouble manifestement illicite, l'arrêt de ce service peut être prononcé par le juge des référés, à la demande du ministère public et de toute personne physique ou morale ayant intérêt à agir. » Pour sa part, l'article 6 I.-8 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique permet à l'autorité judiciaire de prescrire en référé ou sur requête aux hébergeurs ou, à défaut, aux fournisseurs d'accès à internet toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne. Ces dispositions ont été appliquées récemment par le tribunal de grande instance de Paris, lequel, sur le fondement de l'article 50-1 de la loi du 29 juillet 1881, a le 27 novembre 2018 enjoint les fournisseurs d'accès à internet de mettre en œuvre toute mesure appropriée de blocage afin d'empêcher l'accès en France au site internet democratieparticipative.biz, au regard de ses nombreux articles incitant à la haine raciale et de représentations faisant l'apologie de crime contre l'humanité. A plus long terme, le ministère de l'intérieur prend une part active à la réflexion menée par le Gouvernement sur les mesures à prendre pour responsabiliser davantage les plateformes comme les réseaux sociaux, notamment dans le cadre des états généraux des nouvelles régulations numériques lancés en juillet 2018. Les pistes envisagées incluent des obligations de retrait rapide des contenus illicites signalés, tels que les contenus haineux, ou encore la représentation légale des grands opérateurs au sein de l'Union européenne.