Tables de mortalité - Inégalité homme/femme
Question de :
M. Jean-Carles Grelier
Sarthe (5e circonscription) - Les Républicains
M. Jean-Carles Grelier attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, sur l'inégalité découlant des tables de mortalité appliquées aux rentes viagères et assurances vie pratiquées par les sociétés d'assurances. En effet, une directive européenne du 21 décembre 2012 concernant la discrimination homme/femme a engendré une modification des tables de mortalité utilisées pour calculer le montant d'une rente. Depuis cette date, les femmes et les hommes sont censés avoir la même table de mortalité. Cependant, dans un souci d'économie et non pas de prudence ou d'égalité, les compagnies d'assurances ont décidé d'appliquer les tables destinées aux femmes, alors que celles-ci étaient moins favorables que celles des hommes. Ainsi, les assureurs n'ont donc pas comblé l'inégalité puisqu'ils ont mis les hommes au niveau des tables des femmes. Selon l'article A132-18 du code des assurances, deux tables sont utilisables : table en A par sexe et table en B non par sexe. Il convient d'utiliser celle-ci pour nommer une table unique homme/femme (TGU05) par exemple. Les compagnies d'assurances prétendent pouvoir se servir de ce texte (qui correspond à la table appropriée conduisant au tarif le plus prudent) qui est un texte explicatif pour désigner la table TGF05, table par sexe comme étant la table unique. Les femmes n'ont donc rien gagné de plus, au contraire des hommes qui ont donc été pénalisés puisque la différence peut aller jusqu'à 20 % ! Cette situation a été vécue par de nombreuses personnes, qui regrettent ce choix discriminant. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer si elle entend agir pour remédier à cette situation.
Réponse publiée le 2 juillet 2019
Pour établir les tarifs des contrats de rente viagère et comptabiliser les provisions correspondant à ces contrats, les assureurs peuvent, soit utiliser des tables de mortalité réglementaires, soit utiliser des tables d'expérience certifiées, conformément aux dispositions de l'article A.132-18 du code des assurances. Cette approche permet de garantir une tarification et un provisionnement prudents, tenant notamment compte de l'augmentation continue de l'espérance de vie. Comme vous l'indiquez, un arrêt de la Cour de justice européenne du 1er mars 2011 a déclaré invalide les dérogations au principe de non-discrimination fondée sur la prise en compte du sexe comme facteur dans le calcul des primes jusqu'alors prévues par l'article 5 de la directive 2004-113 relative à l'égalité entre les hommes et les femmes. Pour tirer les conséquences de cet arrêt, la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a modifié l'article L. 111-7 du code des assurances pour proscrire toute discrimination fondée sur le sexe pour les contrats conclus ou substantiellement modifiés après le 20 décembre 2012. Outre que cette contrainte est liée à une décision prise au niveau européen, elle apporte une solution proportionnée aux questions d'égalité entre les femmes et les hommes. La convergence tarifaire entre les risques associés aux assurés masculins et féminins se traduit par une mutualisation de la situation inégale entre ces deux sous-populations en termes d'espérance de vie. La tarification individualisée qui existait avant 2012, fondée sur l'espérance de vie des femmes statistiquement plus élevée, se traduisait comme vous le relevez par un coût d'acquisition des rentes plus onéreux que pour les hommes, mais inversement par des garanties en cas de décès plus abordables – comme en assurance emprunteurs. L'indistinction tarifaire entre hommes et femmes permet donc depuis 2012 un accès équitable aux mêmes garanties, reposant sur la solidarité vis-à-vis de l'espérance de vie. Il n'en demeure pas moins que les tables de mortalité réglementaires sont prudentes, comme vous le relevez, a fortiori si celles utilisées pour l'ensemble de la population assurée sont celles établies sur les données du sexe apportant le plus de prudence. Néanmoins, la règlementation impose que les excédents techniques qui en découlent soient reversés aux assurés, dans des conditions précisées par arrêté (article A.132-11 du code des assurances), de sorte que les assurés ne soient pas pénalisés par des tarifs excessivement conservateurs. Dans le cas que vous évoquez, l'utilisation de la table TGF05 conduit en effet à ce que les sociétés d'assurance dégagent un bénéfice technique. Les assureurs ont néanmoins l'obligation de restituer dans les 8 ans une part importante de ce bénéfice technique aux assurés, dans le cadre d'une répartition que l'assureur peut orienter en fonction de sa politique commerciale, par exemple sous la forme d'une revalorisation des rentes. Dans ces conditions, le Gouvernement n'envisage pas d'engager un travail réglementaire sur ce sujet.
Auteur : M. Jean-Carles Grelier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Assurances
Ministère interrogé : Égalité femmes hommes et lutte contre les discriminations
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 20 novembre 2018
Réponse publiée le 2 juillet 2019