15ème législature

Question N° 15035
de M. Jean-Bernard Sempastous (La République en Marche - Hautes-Pyrénées )
Question écrite
Ministère interrogé > Ville et logement
Ministère attributaire > Ville et logement

Rubrique > logement

Titre > Problématique de la violation de domicile

Question publiée au JO le : 11/12/2018 page : 11350
Réponse publiée au JO le : 02/07/2019 page : 6225

Texte de la question

M. Jean-Bernard Sempastous attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur la problématique de la violation de domicile. La loi ne donne aucune définition particulière du squat. Il s'agit le plus souvent de l'occupation d'un lieu destiné à l'habitation dans lequel une ou plusieurs personnes se sont introduites, généralement par la force (bris de porte, de volets ou autre) contre la volonté des propriétaires absents de leur domicile dans cette circonstance. Au-delà d'un délai de 48 heures suivant l'intrusion, ces occupants sans droit ni titre ne peuvent plus être expulsés et il faut alors engager une procédure devant le tribunal d'instance afin d'obtenir leur départ. Dans certains cas, plus d'un an est nécessaire au propriétaire pour récupérer son bien et cela peut mettre des familles dans une grande détresse. Il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement afin de remédier à cette anomalie, pour que les propriétaires récupèrent leur bien immédiatement sans engager aucune procédure, dans une telle situation.

Texte de la réponse

L'article L. 411-1 du code des procédures civiles d'exécution (CPCE) précise que « sauf disposition spéciale, l'expulsion d'un immeuble ou d'un lieu habité ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d'un commandement d'avoir à libérer les locaux ». En principe, la personne expulsée dispose d'un délai de deux mois suivant la signification du commandement de quitter les lieux. Il résulte des dispositions de l'article 201 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi Elan), que ce délai de deux mois n'est pas applicable lorsque la personne expulsée est entrée dans les lieux par voie de fait (article L. 412-1 du CPCE). Par ailleurs, il résulte de ce même article 201 de la loi Elan que la « trêve hivernale » n'est désormais plus applicable aux personnes entrées dans un domicile par voie de fait. Enfin, le juge pourra réduire ou supprimer ce délai lorsque l'occupation porte sur un local autre qu'un domicile (article L. 412-6 du CPCE). En matière d'occupation illicite d'un logement, il existe également une procédure administrative permettant de déroger à l'exigence d'une décision de justice et de la délivrance d'un commandement de quitter les lieux. Cette procédure est prévue à l'article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale. Elle permet au propriétaire ou au locataire d'un logement occupé de demander au préfet, en cas de violation de domicile, de mettre en demeure l'occupant de quitter les lieux, après avoir déposé plainte, fait la preuve que le logement constitue son domicile et fait constater l'occupation illicite par un officier de police judiciaire. Lorsque la mise en demeure de quitter les lieux n'a pas été suivie d'effet dans le délai fixé par le préfet, ce dernier peut procéder à l'évacuation forcée du logement, sauf opposition du propriétaire ou du locataire. Cette procédure administrative d'expulsion s'applique dès lors que le délit de violation de domicile, tel que défini à l'article 226-4 du code pénal, est constitué. Il n'est donc pas nécessaire que le bien soit occupé par le requérant le jour même de l'intrusion pour lui permettre de solliciter cette procédure administrative d'expulsion. Il doit démontrer que le logement est son domicile au sens admis par la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation, c'est-à-dire « le lieu où une personne, qu'elle y habite ou non, a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux », dès lors que ce lieux n'est pas vide de meubles et d'occupation (Crim., 22 janvier 1997, pour une appartement locatif non loué au jour de l'intrusion). Par ailleurs, la loi n° 2015-714 du 24 juin 2015 tendant à préciser l'infraction de violation de domicile a modifié l'article 226-4 du code pénal en spécifiant que cette infraction est caractérisée non seulement par le fait de s'introduire dans le domicile d'autrui à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, mais encore par le fait de se maintenir dans les lieux après y avoir pénétré de la sorte. L'infraction est en conséquence un délit continu, et tant que la personne se maintient dans les lieux, les services de police ou de gendarmerie peuvent diligenter une enquête dans le cadre de la flagrance, sans qu'il soit besoin de prouver que ce maintien est également le fait de « manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ». Il s'ensuit que le délai maximum de 48 heures suivant la réalisation d'une infraction, admis par la jurisprudence pour permettre aux services enquêteurs d'agir dans le cadre de la flagrance, n'est pas opposable en matière de violation de domicile tant que le bien immobilier est squatté. Dès lors, lorsqu'un domicile est occupé de manière illicite par un tiers, les forces de sécurité intérieure peuvent, sur le fondement de l'infraction de violation de domicile, procéder à l'interpellation des mis en cause, ce quel que soit le délai écoulé depuis leur intrusion dans le domicile. L'engagement de la procédure pénale permet en pratique au propriétaire de bénéficier de délais pour prendre les mesures nécessaires pour sécuriser les lieux, ou de solliciter une mesure d'expulsion administrative sur le fondement de l'article 38 de la loi du 5 mars 2007.