15ème législature

Question N° 1503
de Mme Danièle Obono (La France insoumise - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Transports
Ministère attributaire > Transports

Rubrique > discriminations

Titre > Rendre justice aux Chibanis de la SNCF

Question publiée au JO le : 03/10/2017 page : 4704
Réponse publiée au JO le : 09/01/2018 page : 215

Texte de la question

Mme Danièle Obono attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur le cas grave de discrimination au travail subie par les 842 cheminots « chibanis » employés pendant 40 ans à la SNCF. Ces cheminots, maintenant à la retraite, ont été recrutés principalement au Maroc dans les années 1970, à une époque où la France avait un grand besoin de main d'œuvre. Leur contrat d'embauche stipulait l'égalité de traitement et de salaire avec les travailleurs français, cette égalité s'étendant aux indemnités salariales, en vertu d'une convention de main d'œuvre signée en 1963 entre la France et le Maroc. Or alors qu'ils effectuaient le même travail que leurs collègues français, le contrat de travail n'a pas été respecté : ils n'ont jamais reçu de salaire égal, n'ont pas pu bénéficier de la progression de carrière et sont restés cantonnés aux tâches d'exécution reconnues comme étant les plus pénibles. Ils n'ont pas non plus eu accès aux avantages des autres salarié(e)s de la SNCF, comme la caisse spéciale de prévoyance et de retraite (CPR), la retraite à 55 ans, les facilités de circulation (tarifs préférentiels ou transports gratuits alors que tous les cheminots et leur famille y ont droit), ni l'accès aux services de soins du groupe. Il s'agit là de discriminations au travail liées à la nationalité et l'origine, qui contreviennent aux règles du code du travail et aux principes des droits humains tels qu'énoncés par plusieurs juridictions au niveau français, européen et international. Ils enfreignent également plusieurs accords et conventions d'association entre d'une part la France et l'Europe, et d'autre part le Maroc. Le 2 novembre 2015, après une décennie de procédure, la SNCF a finalement été condamnée en première instance à leur verser 170 millions d'euros pour discrimination dans la carrière et la retraite. Mais le groupe a fait appel et le délibéré est attendu pour le 31 janvier 2018. Mme la députée s'inquiète de la longueur des procédures pour ces « chibanis » dont certains sont en fin de vie, et demande que les 40 ans de discriminations envers eux soient enfin reconnues et que réparation leur soit faite. Tel que le rappelle l'article 1 du décret n° 2015-137 du 10 février 2015 : « l'établissement public industriel et commercial SNCF est placé sous la tutelle du ministre chargé des transports ». À ce titre, elle demande donc à Mme la ministre chargée des transports quelles sont les mesures qu'elle envisage de prendre pour reconnaître et réparer intégralement les dommages qui ont été faits à ces travailleurs pour les 40 ans de discriminations qu'ils ont subies. Par exemple, en tant qu'autorité de tutelle, Mme la ministre a la possibilité de demander à la SNCF de se désister de son appel en cours afin que le jugement du 2 novembre 2015 devienne définitif et que cesse enfin cette situation intolérable. Elle lui demande si elle compte faire usage de cette prérogative et si non, pourquoi.

Texte de la réponse

Par des jugements rendus le 21 septembre 2015, le conseil de prud'hommes de Paris a condamné la SNCF à réparer le préjudice subi par des salariés et anciens salariés contractuels marocains, à raison de la discrimination dont ceux-ci ont été victimes au cours de leur relation de travail. La SNCF a souhaité faire appel de ces décisions et la procédure est en cours auprès de la Cour d'appel. La définition et l'animation des politiques de ressources humaines du groupe public ferroviaire relèvent des compétences confiées par le législateur à la SNCF (article L. 2102-1 du code des transports). Les principes d'autonomie des établissements publics et de bonne gouvernance s'opposent, par ailleurs, à des instructions du ministère de tutelle dans la gestion du personnel de l'entreprise. Enfin, l'État, qui n'était pas partie à ces instances, n'a pas eu accès à la procédure et n'a pas eu connaissance des dossiers. Il ne lui appartient donc pas de commenter ou de s'immiscer dans une affaire pendante devant une juridiction.