15ème législature

Question N° 15049
de M. Régis Juanico (Socialistes et apparentés - Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Sports
Ministère attributaire > Sports

Rubrique > ordre public

Titre > Conditions d'organisation du match de football du 23 novembre 2018 à Lyon

Question publiée au JO le : 11/12/2018 page : 11334
Réponse publiée au JO le : 19/05/2020 page : 3561
Date de signalement: 14/01/2020

Texte de la question

M. Régis Juanico appelle l'attention de Mme la ministre des sports sur les conditions d'organisation du match de football ayant opposé à Lyon, le 23 novembre 2018, l'Olympique lyonnais (OL) à l'Association sportive de Saint-Étienne (ASSE). À cette occasion, une nouvelle interdiction de déplacement des supporters de l'ASSE avait fait l'objet d'un arrêté préfectoral et d'un arrêté ministériel. L'OL a publié un communiqué indiquant que « les services de sécurité du club remettront (...) aux forces de l'ordre et aux représentants du parquet » les personnes contrevenant aux dispositions de ces arrêtés, c'est-à-dire les personnes se prévalant de la qualité de supporter de l'ASSE ou se comportant comme tel. Ce même communiqué précise également que « pour des raisons de sécurité et en lien avec les arrêtés, plusieurs dizaines de billets ont été annulés par l'Olympique lyonnais et les acheteurs avertis par mail afin qu'ils ne se présentent pas au stade pour le match de ce soir ». Sur ce dernier point, ce club a transmis aux personnes concernées un courriel précisant que le choix des billets à annuler s'est fondé sur l'identification et l'analyse de leur adresse électronique, celle-ci « comportant des éléments » laissant supposer que les intéressés soutenaient l'ASSE. Dans la presse, le club de l'OL a par ailleurs admis qu'il était probable que ces annulations aient aussi affecté des supporters lyonnais. Aussi, il souhaiterait savoir si le droit actuel, et notamment l'article R. 211-25 du code de la sécurité intérieure, donne compétence aux stadiers pour se substituer aux forces de l'ordre ; connaître les conditions requises pour qu'un club soit autorisé à analyser et identifier, depuis une simple adresse électronique, la qualité présumée de supporter d'un club, et en particulier dans quelle mesure la Commission nationale de l'informatique et des libertés doit préalablement donner son autorisation ; savoir dans quelle mesure un club de football peut annuler les billets de supporters à raison du simple fait qu'il les soupçonne d'être supporters du club visiteur et alors même qu'aucun élément ne permet de penser qu'ils entendent se comporter comme tel ni se prévaloir de cette qualité ; connaître, pour les trois occurrences précédentes, les sanctions encourues en cas d'irrespect de la réglementation ; connaître les intentions du Gouvernement pour rappeler le club concerné à ses obligations dans l'hypothèse où un ou plusieurs manquements à celles-ci aurait été constaté.

Texte de la réponse

Concernant les stadiers, l'article R. 211-25 du code de la sécurité intérieure leur donne la compétence pour coopérer, si besoin, avec les forces de l'ordre. Néanmoins, cette intervention ne peut se faire que dans les cas prévus par les alinéas 3 et 5 de cet article : 3° Etre prêts à intervenir pour éviter qu'un différend entre particuliers ne dégénère en rixe ; 5° Alerter les services de police ou de secours. Il résulte de ces dispositions qu'un ou des individus peuvent être appréhendés par des stadiers si un comportement est de nature à compromettre la sécurité des personnes et des biens lors de la manifestation. L'individu est ensuite remis aux forces de l'ordre. Concernant la possible annulation de billets, les conditions requises pour qu'un club soit autorisé à analyser et identifier, depuis une simple adresse électronique, la qualité présumée de supporter d'un club sont prévues par l'article L.332-1 du code du sport, issu de la loi n° 2016-564 du 10 mai 2016 renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre l'hooliganisme. Cette identification doit cependant respecter à la fois les droits et libertés des supporters et la protection de leurs données personnelles. Le législateur a étendu les prérogatives des clubs en conférant aux organisateurs de manifestations sportives à but lucratif la capacité de refuser l'accès à l'enceinte sportive pour garantir au mieux la sécurité dans les stades. Ce refus se caractérise soit par le refus de délivrer le billet d'entrée, soit par le retrait du billet délivré. Néanmoins, ce refus a pour finalité de contribuer à la sécurité des manifestations sportives et ne peut être opposé qu'aux personnes qui ont contrevenu ou contreviennent aux dispositions des conditions générales de vente, ou du règlement intérieur relatives à la sécurité de ces manifestations. Dans ce cadre, les organisateurs peuvent établir un traitement automatisé de données à caractère personnel relatives à ces manquements, conformément à l'article L. 332-1 du code du sport. Le club détient en conséquence des données relatives à l'adresse électronique des personnes concernées. Cet outil a été créé pour prévenir les violences de supporters dans les stades et permettre aux clubs d'exercer cette responsabilité renforcée. Cependant, ce fichier n'est pas un fichier de police mis en œuvre par l'autorité administrative et a par conséquent fait l'objet d'un encadrement fort. Le décret d'application de la loi n° 2016-564 du 10 mai 2016 renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme a été pris après avis « motivé et publié » de la CNIL. L'article R. 332-15 du code du sport prévoit ainsi l'encadrement des données pouvant être enregistrées en énumérant les seuls cas sur lesquels les autorités du club peuvent s'appuyer pour justifier leurs décisions de refus. De même, les personnes disposent de plusieurs garanties respectant le nouveau règlement européen de protection des données personnelles, notamment l'information des personnes concernées, l'accès à leurs données ainsi que l'effacement automatique de ces données au terme d'un délai de 18 mois. À ce titre sur le billet d'accès au stade, il est mentionné qu'en cas de non-respect des conditions générales de vente et du règlement intérieur, les personnes sont susceptibles de faire l'objet d'un refus d'accéder à l'enceinte sportive ou faire l'objet de la suspension de leur abonnement. Enfin, toute décision de refus ou d'annulation d'un titre d'accès à cette manifestation peut être contestée dans le cadre d'un recours contentieux exercé devant le juge dans les conditions de droit commun. En conséquence, les clubs sont autorisés à analyser et identifier la qualité présumée du supporter et à annuler un billet d'accès au stade selon un cadre légal strict qui respecte la protection des données personnelles. Enfin, concernant les intentions du Gouvernement quant au rappel aux clubs de leurs obligations en cas de manquements avérés, la ministre des sports s'engage à saisir l'instance nationale du supporterisme sur cette question et plus particulièrement sur la nécessité de mieux informer les clubs professionnels sur la loi du 10 mai 2016.