15ème législature

Question N° 15436
de M. Patrice Anato (La République en Marche - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Relations avec le Parlement
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > élus

Titre > Agressions subies par les parlementaires français

Question publiée au JO le : 25/12/2018 page : 11988
Réponse publiée au JO le : 19/02/2019 page : 1687
Date de changement d'attribution: 01/01/2019

Texte de la question

M. Patrice Anato appelle l'attention de M. le ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement sur la défiance grandissante des citoyens français envers l'institution parlementaire et sur les agressions subies par les élus. Dans l'enquête BVA pour Sciences Po, L'Obs et France Inter réalisée à l'occasion du 60e anniversaire de la Ve République du 29 au 30 août 2018, 72 % des sondés estimaient que l'Assemblée nationale reflétait mal la diversité des opinions et 93 % des sondés considéraient qu'une réforme des institutions - dont l'Assemblée et le Sénat - était nécessaire (voire dans une moindre mesure la suppression du Sénat). À cela, il faut ajouter la défiance qui s'installe dans la société à l'endroit des parlementaires. Ainsi, dans un sondage Harris Interactive pour l'ONG Transparency International France et Tilder réalisé en août 2016, on apprenait que 77 % des Français considéraient que les députés et sénateurs français étaient corrompus. Si la violence envers les élus n'est pas une question nouvelle, elle semble s'être banalisée, et même parfois légitimée sur les réseaux sociaux ou dans des discours politiques irresponsables face à la « violence étatique ». En juillet 2017, les violences physiques à l'encontre de Mme la députée Lauriane Rossi avaient déjà interpellé. Un an plus tard, il était de même contre les menaces antisémites et sexistes adressées à la présidente de la commission des lois, Mme Yaël Braun-Pivet. Aujourd'hui, en marge de la crise que connaît le pays, on rapporte plusieurs histoires de permanences saccagées et dégradées, de mise en danger de la vie de parlementaires par la divulgation d'adresses personnelles, intrusion à domicile voire même réception de balles de fusil. Sur les réseaux sociaux, nombreux sont les députés abreuvés d'injures et de menaces, plusieurs commentaires en appelant même à attenter à leur vie. Parmi les revendications des « gilets jaunes », plusieurs concernent le Parlement ou la mise en place d'une assemblée citoyenne. Si la colère qui s'exprime légitimement dans nos rues depuis plusieurs jours se fonde sur la volonté d'une meilleure participation à la vie démocratique et citoyenne ainsi que sur un pouvoir d'achat corrélé à l'investissement dans le travail, les attaques contre les institutions de la République et contre des représentants qui sont à l'Assemblée nationale par la volonté du suffrage de leurs concitoyens et donc du peuple, est préoccupante. En conséquence de quoi, il lui demande de préciser de quelle manière le Gouvernement est garant de toutes les institutions de la République dans le respect de la séparation des pouvoirs et quel est le régime prévu pour protéger les élus qui feraient face à des menaces inadmissibles dans l'exercice de leurs fonctions.

Texte de la réponse

Les infractions commises contre les élus constituent une atteinte intolérable à l'autorité de l'Etat et une priorité de l'action de la justice. Elles appellent la plus grande rigueur dans les enquêtes diligentées, tant dans le cadre du traitement en temps réel que lors du suivi des enquêtes préliminaires ou des dossiers d'instruction. Cette exigence constitue une préoccupation majeure des parquets dans la direction de la police judiciaire. Le code pénal comporte un arsenal répressif adapté à ce type de fait. La qualité d'élu de la victime est prise en considération au stade de la répression de nombreuses infractions par l'intermédiaire de diverses circonstances aggravantes qui conduisent à faire encourir des sanctions plus lourdes à leurs auteurs. Ces circonstances aggravantes, attachées soit à l'existence d'un mandat électif (notamment dans le cadre de l'article 433-3 du code pénal en matière de menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens), soit à la qualité de « personnes chargées d'une mission de service public » ou de « personnes dépositaires de l'autorité publique » (notamment dans le cadre des violences des articles 222-7 et suivants), sont caractérisées dès lors que les faits sont commis en lien direct avec la fonction exercée par la victime et « lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur ». L'aggravation des peines est également encourue lorsque l'infraction est commise sur le conjoint, les ascendants ou les descendants en ligne directe ou sur toute autre personne vivant habituellement au domicile des élus en raison de leurs fonctions. La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse sanctionne tout abus dans l'exercice de la liberté d'expression et incrimine spécialement les injures publiques ou diffamations publiques commises en raison de leurs fonctions ou qualités, à l'encontre notamment du Président de la République, d'un ou plusieurs ministres, parlementaires, fonctionnaires publics, d'un citoyen chargé d'un mandat d'un service ou d'un mandat public, temporaire ou permanent. Cette même loi punit d'une peine de 5 ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende la provocation publique à la commission d'atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, lorsque cette provocation n'a pas été suivie d'effet. Chaque atteinte aux personnes investies d'un mandat électif public justifie qu'une réponse pénale soit apportée, avec défèrement et comparution immédiate, lorsque cette voie est ouverte, pour les faits les plus graves ou commis par un auteur récidiviste ou réitérant. Pour des cas complexes ou contestés, des informations judiciaires sont ouvertes. Seuls les faits non contestés les moins graves donnent lieu à des mesures alternatives aux poursuites, qui permettent de donner une dimension pédagogique à la réponse pénale, tels que les stages de citoyenneté.