15ème législature

Question N° 15496
de M. Patrice Anato (La République en Marche - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > justice

Titre > Situation de la justice en Seine-Saint-Denis

Question publiée au JO le : 25/12/2018 page : 11982
Réponse publiée au JO le : 08/01/2019 page : 175

Texte de la question

M. Patrice Anato interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation de la justice dans le département de Seine-Saint-Denis. Depuis lundi 10 décembre 2018, quarante-six barreaux sont mobilisés contre la loi de programmation sur la justice. Les professionnels de justice, greffiers, magistrats et avocats considèrent que cette réforme serait une refonte déguisée de la carte judiciaire sous couvert de la création d'un tribunal judiciaire né des fusions des tribunaux de grande instance et des tribunaux d'instance. L'une de leurs craintes principales est que la justice ne soit complétement déshumanisée. Au tribunal de Bobigny où ont lieu également des blocages, les professionnels de la justice craignent que la future réforme ne complique l'accès à la justice des plus fragiles et notamment de ceux les plus éloignés du numérique. Le département de la Seine-Saint-Denis, considéré comme l'un des départements les plus criminogènes de France, est par la même occasion confronté à plusieurs difficultés en matière de fonctionnement de la justice et d'accès des administrés aux services publics judiciaires. Lors de l'audience solennelle de la rentrée, le 29 janvier 2018, la procureure de la République reconnaissait l'état dégradé de la justice en Seine-Saint-Denis. Elle rappelait également que « ce qui fait la différence avec d'autres juridictions, c'est la masse des affaires, la délinquance existe partout mais dans des conditions et des contextes bien différents. On est toujours en décalage entre nos moyens et les situations que l'on doit affronter ». Le 5 novembre 2018, les quinze juges pour enfants du tribunal de Bobigny dressaient un constat alarmant : « près de 900 mesures, soit 900 familles sont en attente. Nous en connaissons les raisons : un manque flagrant de personnel, lié aux restrictions budgétaires, dans un contexte où la dégradation des conditions du travail éducatif et social en Seine-Saint-Denis rend plus difficiles les recrutements. En Seine-Saint-Denis, des mineurs en détresse ne peuvent ainsi plus recevoir l'aide dont ils ont besoin, faute de moyens financiers alloués à la protection de l'enfance par le conseil départemental, tributaire en partie des dotations de l'État ». Chaque année, la juridiction reçoit près de 180 000 affaires et couvre toutes les affaires concernant le département et l'aéroport Charles-de-Gaulle, la justice y est non seulement un droit citoyen, un enjeu de justice républicaine, de sécurité pour tous et de respect du droit et des valeurs de la République. Le rapport des députés François Cornut-Gentille et Rodrigue Kokouendo sur l'action de l'État en Seine-Saint-Denis a avancé qu'il faut en moyenne 6,8 mois de délai de transmission des décisions du casier judiciaire national à Bobigny, contre 4,8 en France. De plus, le tribunal de grande instance de Bobigny, pourtant deuxième de France par le volume d'activité, arrivait dernier concernant le ratio d'effectif de magistrats du siège et du parquet. Ces indicateurs viennent alourdir le sentiment des habitants de Seine-Saint-Denis d'un abandon des politiques publiques alors même qu'il est l'un des départements ayant le plus été l'objet de politiques publiques ces dernières années. En conséquence de quoi, il lui demande de bien vouloir préciser quel est le plan d'action envisagé pour la justice dans le département de la Seine-Saint-Denis afin de garantir aux contribuables dyonisiens comme partout ailleurs l'accès au service public de la justice.

Texte de la réponse

La situation des tribunaux de Seine-Saint-Denis, et tout particulièrement du tribunal de grande instance (TGI) de Bobigny est suivie avec attention par le ministère de la justice. Ainsi, un contrat d'objectifs a été signé en 2016 afin d'adapter l'accompagnement du TGI de Bobigny à ses problématiques spécifiques.  Par ailleurs,  conformément à la demande de Madame la ministre, 4 magistrats - dont 2 au siège et 2 au parquet - sont actuellement affectés en surnombre au sein de la juridiction afin de faire face à la forte activité pénale de la juridiction. Un 15ème cabinet de juge des enfants a été créé en septembre 2018. Les effectifs du tribunal pour enfants sont au complet, ainsi que ceux de la section des mineurs du parquet. La situation de la juridiction sera en outre améliorée au 1er janvier 2019 avec un surnombre de 5 magistrats, dont 3 au siège et 2 au parquet, afin de soutenir la mise en œuvre des préconisations de l'inspection générale de la Justice dans son audit de fonctionnement de la chaîne pénale de la juridiction. Afin d'accompagner ces arrivées de magistrats, la localisation des emplois de fonctionnaires a été augmentée dans la juridiction balbynienne cette année, passant de 378 à 384 fonctionnaires. Actuellement, 14 postes de fonctionnaires de catégorie C sont vacants. Ils seront partiellement pourvus dès le 31 décembre 2018 par des agents recrutés dans le cadre de l'appel complémentaire des lauréats du recrutement sans concours d'adjoints administratifs 2017, d'une part, et à compter du 1er mars 2019 par les opérations de mobilité enregistrées lors de la commission administrative paritaire du second semestre 2018, d'autre part. Les postes restés vacants seront proposés dans le cadre des recrutements d'adjoints administratifs et techniques au titre de l'année 2019, ce qui devrait permettre de renforcer encore la juridiction en septembre prochain afin de pourvoir l'ensemble des postes vacants.