Question écrite n° 1586 :
Application à la gendarmerie nationale de la directive européenne 2003/88/CE

15e Législature

Question de : M. Éric Ciotti
Alpes-Maritimes (1re circonscription) - Les Républicains

M. Éric Ciotti attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur l'application complète au sein de la gendarmerie nationale de la directive européenne 2003/88/CE relative au temps de travail. En effet, en tant que militaires, les gendarmes sont tenus de rester disponibles en dehors du service. En contrepartie, ils bénéficient d'un logement de fonction par nécessité absolue de service. La directive européenne de 2003 relative au temps de travail prescrit des obligations incompatibles avec le régime de travail actuel des personnels placés sous statut militaire. Si, initialement, les forces armées et de sécurité bénéficiaient d'une dérogation, la Cour de justice de l'Union européenne en a limité la portée. Dans ce contexte, la France s'est engagée auprès de la Commission européenne à transposer cette directive aux forces armées avant la fin de l'année 2017 et la direction générale de la gendarmerie (DGGN) fait en sorte de remplir cette exigence. Toutefois, l'impact sur le nombre d'heures travaillées des gendarmes s'annonce dévastateur. Une transposition seulement partielle de la directive européenne a déjà entraîné, d'après les informations communiquées publiquement par la DGGN, une baisse du nombre d'heures travaillées comprise entre 3 % et 5 %, ce qui, pour 100 000 personnels, représente 3 000 à 5 000 équivalents temps plein. Or selon le rapport rédigé conjointement par l'inspection générale de l'administration et celle des finances en début d'année 2017, les soldes nets cumulés de création d'emplois dans la gendarmerie s'élèvent à 3 188 équivalents temps plein entre 2013 et 2017. Autrement dit, l'application partielle de la directive en gendarmerie a d'ores et déjà gommé le bénéfice de l'intégralité des créations d'emploi. La transposition complète de la directive prévue d'ici la fin de l'année, avec notamment les 48 heures maximales de travail hebdomadaire, pourrait donc se traduire par une baisse du nombre d'heures travaillées encore plus importante, ce qui serait une évolution parfaitement inacceptable au regard du contexte sécuritaire exceptionnel auquel les forces de gendarmerie sont confrontées. Il lui demande de préciser les conséquences de l'application complète de la directive européenne de 2003 sur la disponibilité des gendarmes et leur capacité opérationnelle, en heures travaillées et en équivalent temps plein.

Réponse publiée le 24 avril 2018

Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur est très attaché à la santé et au bien-être des gendarmes, qui exercent leur métier dans des conditions difficiles. Leur rythme de travail doit permettre de ménager un temps de repos,nécessaire à l'équilibre personnel comme au bon accomplissement des missions. Tenu à une disponibilité spécifique et pouvant être appelé à servir en tout temps et en tout lieu, le personnel sous statut militaire [1] ne dispose pas d'une durée légale du travail ni de cycles horaires ou d'heures supplémentaires. De ce fait, l'emploi opérationnel des gendarmes est marqué par une succession de temps de travail et de temps de récupération, structurés par les besoins opérationnels. Les gendarmes bénéficient de 45 jours de permissions par an et de 48 heures de repos hebdomadaires. Depuis le 1er septembre 2016, faisant suite à un contentieux devant la juridiction administrative, une instruction provisoire applicable aux personnels militaires de la gendarmerie prévoit le principe d'un repos de 11 heures par tranche de 24 heures, contre 10 heures auparavant. Cette période de repos peut être réduite pour des motifs opérationnels. Le militaire bénéficie alors de repos compensateurs. Par ailleurs, des règles spécifiques interviennent lorsque le militaire est en service entre 23 heures et 5 heures du matin, créneau identifié comme particulièrement générateur de fatigue. L'organisation quotidienne du service de la gendarmerie s'attache à préserver sa capacité de réaction aux événements, notamment les plus sensibles : grands rassemblements, catastrophes naturelles, accidents d'ampleur, opérations judiciaires d'envergure, recherches de personnes disparues ou de malfaiteurs et opérations d'ordre public. Pour restreindre l'impact de la réforme, plusieurs aménagements dérogatoires ont d'ores et déjà été mis en œuvre par la gendarmerie nationale, en lien avec le ministère des armées. Il en est ainsi, par exemple de l'élargissement du mécanisme de la neutralisation utilisé en situation opérationnelle exceptionnelle dans laquelle il n'est objectivement pas possible d'accorder les repos compensateurs aux militaires. En pareil cas, les repos compensateurs sont alors neutralisés et une protection adaptée est mise en place, notamment par l'octroi de périodes de repos à l'issue de la période d'activité soutenue. Ces aménagements permettent à la gendarmerie mobile de conserver son rôle de réserve gouvernementale face aux crises graves et aux grands événements, tout en préservant la condition des personnels. Enfin, aucune transposition n'est prévue sur les autres dispositions de la directive. En effet, le statut militaire, qui est le corollaire du rôle de force de recours de la gendarmerie, en cas de crises graves ou d'événements majeurs, apparaît incompatible avec une transposition plus étendue. Cette position de la France, qui s'applique également aux armées, a été notifiée à la Commission européenne. [1] Aux termes de l'article L.3211-3 et du code de la défense, « la gendarmerie est une force armée instituée pour veiller à l'exécution des lois » et « elle participe à la défense de la patrie et des intérêts supérieurs de la Nation ». En application de leur statut militaire, les gendarmes sont tenus à une disponibilité spécifique et peuvent être appelés à servir en tout temps et en tout lieu (art. L.4121-5 du même code).

Données clés

Auteur : M. Éric Ciotti

Type de question : Question écrite

Rubrique : Gendarmerie

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 3 octobre 2017
Réponse publiée le 24 avril 2018

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