15ème législature

Question N° 16877
de Mme Clémentine Autain (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Intervention française au Tchad

Question publiée au JO le : 12/02/2019 page : 1274
Réponse publiée au JO le : 02/04/2019 page : 3032

Texte de la question

Mme Clémentine Autain appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'intervention militaire qui a eu lieu dans le nord-est du Tchad. L'attaque française d'un convoi de rebelles le lundi 4 février 2019 relève d'un interventionnisme militaire en soutien à un président autoritaire, Idriss Déby, que la France avait déjà aidé à accéder au pouvoir en 1990. Le Gouvernement explique ce soutien par l'impératif absolu de lutte contre le terrorisme. Mais comment expliquer que cet objectif, essentiel, amène la France à protéger certains régimes autoritaires et corrompus, alors qu'elle abandonne dans un même temps ses alliés kurdes, qui ont sacrifié des milliers de leurs jeunes combattants dans la guerre menée contre Daesh ? En plus d'être une nouvelle illustration de la permanence du maillage militaire en Afrique, cette intervention française l'amène à l'interroger sur la cohérence de la stratégie portée par le Gouvernement dans la lutte contre le djihadisme.

Texte de la réponse

En réponse à une demande du président Déby exprimée dans une lettre daté du 2 février, la France a mené des actions militaires les 3, 5 et 6 février contre une colonne d'une cinquantaine de pickups du groupe armé rebelle UFR (Union des forces de la résistance) qui a traversé la frontière entre la Libye et le Tchad le 1er février, en direction du sud. Conformément à l'article 35 de la Constitution, le Premier ministre a transmis le 6 février, une lettre aux Présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, les informant de ces actions militaires. Vous savez l'importance du Tchad dans la lutte que nous menons, collectivement, contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne. Ce pays est engagé avec détermination, à la fois dans la Force conjointe du G5 Sahel, dans la force multinationale mixte qui combat contre Boko Haram, ce groupe qui tue chaque jour de nombreux civils dans le bassin du Lac Tchad, et la branche Afrique de l'Ouest de l'Etat islamique (ISWAP), ainsi que dans la mission des Nations unies au Mali (MINUSMA). Dix soldats tchadiens y ont laissé la vie le 20 janvier dernier. Nous ne pouvions donc pas accepter le risque d'une déstabilisation du Tchad qui aurait eu un effet négatif sur toute la région. C'est pour cela que nous avons décidé de répondre à la menace qui visait ce pays. Notre action militaire a eu pour objectif d'arrêter un groupe rebelle armé venu de l'extérieur, décidé à prendre le pouvoir par les armes et d'empêcher la déstabilisation d'un pays clef dans la lutte contre le terrorisme. Elle ne visait aucun autre but et s'est arrêtée dès cet objectif atteint. Bien entendu, le soutien de la France au Tchad va de pair avec le souhait que les autorités mènent les réformes nécessaires pour renforcer les institutions du pays, améliorer la gouvernance, ouvrir l'espace politique et retrouver le chemin de la croissance et d'un développement équitable. C'est ce que le Président de la République a souligné, lors de sa visite à N'djamena les 22 et 23 décembre derniers, lorsqu'il a déclaré qu'il fallait "permettre ainsi aussi une forme démocratique indispensable aux bons équilibres et à la bonne gouvernance du pays".