Pressions éventuelles de la France à l'encontre de pays tiers à propos du TIAN
Question de :
Mme Sabine Rubin
Seine-Saint-Denis (9e circonscription) - La France insoumise
Mme Sabine Rubin attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la nature des pressions éventuelles que la France exercerait à l'encontre de pays tiers dans le cadre de la ratification du traité d'interdiction des armes nucléaires (TIAN). La France depuis 2013, sur la scène onusienne, a refusé de participer à deux groupes de travail de l'ONU sur le désarmement nucléaire (en 2013 et en 2016), a voté contre la résolution « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire » (71/258, décembre 2016), permettant de lancer des négociations en 2017 sur un instrument juridiquement contraignant contre les armes nucléaires et s'est refusée à prendre part au négociation du traité désormais connu sous le nom de traité d'interdiction des armes nucléaires. Les interventions diplomatiques de la France vis-à-vis de l'ensemble de ce processus, qui ont amené à la création de cet instrument, ont souvent été très virulentes, ce qui explique la mesure n° 9 « la France devrait atténuer ses critiques à l'encontre du traité d'interdiction des armes nucléaires et des pays qui ont contribué à son adoption » du rapport « 50 ans après le TNP ou en est-on ? » des députés Fanget et Lecoq et approuvé à l'unanimité par la commission des affaires étrangères (le 18 juillet 2018). Indépendamment même des contours d'un tel traité, le fait que la France puisse exercer une pression non conforme au respect de la souveraineté d'États tiers représente à ses yeux un manquement aux devoirs de la France comme Nation respectueuse du droit international. Si la pression diplomatique fait partie du jeu des relations internationales, elle lui demande de bien vouloir lui apporter des explications et des informations sur les pressions réalisées à l'encontre d'État, notamment d'Afrique francophone, pour les dissuader de participer à ce processus de désarmement comme de les décourager à signer et à ratifier le TIAN.
Réponse publiée le 2 avril 2019
La France est pleinement engagée pour la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs et en faveur du désarmement nucléaire conformément à l'article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Elle développe en la matière une approche progressive, réaliste et pragmatique, de façon à promouvoir la stabilité, la paix et la sécurité internationales et à préserver les intérêts de sécurité de tous. La France n'est pas isolée dans son analyse. Tous les membres du P5 ont exprimé leur opposition à ce traité par une déclaration conjointe en Première commission de l'Assemblée générale des Nations unies en 2018. De nombreux autres Etats, engagés en faveur du désarmement nucléaire, ont décidé de ne pas le signer. Parmi les Etats qui avaient participé aux négociations, certains ont d'ailleurs pris leurs distances avec ce traité qui ne répond pas à leurs attentes et n'envisagent pas de le signer. Dans la perspective de la conférence d'examen du TNP de 2020, la France continuera à réaffirmer sans ambiguïté l'autorité et le rôle irremplaçable du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires comme celui du Conseil de sécurité des Nations unies. La France continuera à respecter pleinement toutes ses obligations au titre du TNP, y compris celles qui sont liées à son statut d'Etat doté, et restera déterminée à poursuivre la mise en œuvre de ses engagements en faveur du désarmement nucléaire. Ce dernier ne se décrète pas, il se construit - par des actions concrètes. Dans le cadre de cette approche, les priorités en matière de désarmement nucléaire sont notamment l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE), la négociation à la Conférence du désarmement d'un Traité d'interdiction de la production de matières fissiles pour les armes nucléaires (FMCT), la poursuite de la réduction des arsenaux nucléaires russes et américains (90 % du stock mondial d'armes nucléaires), et la poursuite des travaux sur la vérification du désarmement nucléaire. La France continuera à mener un dialogue ouvert, franc et respectueux avec l'ensemble de ses partenaires sur ces sujets. A ce titre, la France promeut notamment l'approfondissement du dialogue entre le P5 et les Etats non dotés de l'arme nucléaire, par exemple au travers du dialogue avec le NPDI (Non-Proliferation and Disarmament Initiative) dont certains membres ont signé le Traité d'interdiction des armes nucléaires. La France participe également aux sessions de dialogue organisées avec les représentants d'Etats non dotés organisées en marge des réunions du P5. La dernière, organisée en janvier 2019 à Pékin, avait permis de dialoguer avec certains Etats non dotés de l'arme nucléaire et avec les ONG. Ce dialogue, mené nationalement ou conjointement avec des alliés proches, permet à la France d'entendre les préoccupations des Etats, de faire valoir ses priorités en matière de désarmement nucléaire et son analyse de l'environnement de sécurité international et à rechercher le consensus, dans la perspective de la Conférence d'examen du TNP de 2020.
Auteur : Mme Sabine Rubin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 26 février 2019
Réponse publiée le 2 avril 2019