15ème législature

Question N° 17562
de M. Jean-Michel Mis (La République en Marche - Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > santé

Titre > Développement de la phagothérapie

Question publiée au JO le : 05/03/2019 page : 2048
Réponse publiée au JO le : 30/04/2019 page : 4133

Texte de la question

M. Jean-Michel Mis attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le développement de la phagothérapie. La phagothérapie est un traitement qui consiste à utiliser des phages en complément des antibiotiques classiques, face aux bactéries multi résistantes. La phagothérapie peut être utilisée dans de nombreux cas : les infections osseuses, articulaires, urinaires, pulmonaires ou oculaires. La France est un des pays le plus consommateurs de médicaments en général, mais aussi d'antibiotiques (4e rang européen). L'apparition des antibiotiques a toutefois conduit à l'abandon de la phagothérapie après la seconde guerre mondiale. Au niveau européen, la législation de l'UE sur les médicaments ne définit pas d'exigences spécifiques concernant la phagothérapie ou les médicaments composés de bactériophages. Les bactériophages peuvent être réglementés au même titre que n'importe quel médicament si le produit concerné répond à la définition d'un médicament. À ce jour, en France, l'utilisation exceptionnelle de spécialités pharmaceutiques ne bénéficiant pas d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) et ne faisant pas l'objet d'un essai clinique est conditionnée à l'obtention préalable d'une Autorisation temporaire d'utilisation (ATU). Or l'absence d'un cadre juridique adéquat est un obstacle réel au développement de la phagothérapie. Pourtant, cette thérapie a récemment montré son efficacité à l'hôpital de la Croix-Rousse (Lyon) sur deux patients atteints d'infections ostéoarticulaires qui ne pouvaient plus cicatriser. Il lui demande ainsi les intentions du Gouvernement pour promouvoir la recherche dans ce domaine.

Texte de la réponse

L'antibiorésistance est l'une des préoccupations prioritaires de la ministre des solidarités et de la santé qui a nommé début janvier 2019, Mme le Professeur Céline Pulcini comme cheffe du projet national Antibiorésistance. Elle est chargée, sous l'autorité du directeur général de la santé, du pilotage opérationnel de la feuille de route interministérielle pour la maîtrise de l'antibiorésistance en santé humaine. Cette feuille de route comprend cinq axes dont un axe « Recherche et innovation en matière de maîtrise de l'antibiorésistance » dont l'objectif est notamment la structuration et la coordination des efforts de recherche, de développement et d'innovation sur l'antibiorésistance et ses conséquences ; la mise en œuvre d'une politique proactive de partenariats public-privé et d'accompagnement de l'innovation ; la valorisation et préservation des produits contribuant à la maîtrise de l'antibiorésistance. Lorsque le traitement n'est pas urgent, la phagothérapie peut constituer une réponse à des situations d'impasses thérapeutiques compte tenu de la multi résistance bactérienne et de l'absence de développement de nouveaux antibiotiques par l'industrie pharmaceutique. Cette thématique a fait l'objet de plusieurs réunions sur le sujet au ministère de la santé, associant le seul industriel français travaillant dans ce domaine. Un premier Comité Scientifique Spécialisé Temporaire (CSST) « Phagothérapie » avait déjà été réuni à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en mars 2016, un deuxième comité a eu lieu le 21 mars 2019. Le compte-rendu sera bientôt publié par l'ANSM. Dans le contexte préoccupant de l'antibiorésistance, ces comités ont permis de faire un retour d'expérience sur les administrations des bactériophages dans un usage compassionnel et de définir un cadre de mise à disposition précoce des bactériophages pour ces utilisations. Il n'existe pas d'autorisation de mise sur le marché (AMM) pour des bactériophages, notamment par manque de données cliniques. Depuis 2016, près d'une quinzaine de patients en France ont bénéficié d'administration compassionnelle de bactériophages « sous forme de matières premières à usage pharmaceutique pour préparations magistrales », par les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé. Ces utilisations ont été rendues possibles grâce à l'accompagnement personnalisé de l'ANSM pour chacun de ces cas. L'essai Phagoburn, a été réalisé dans un contexte très particulier que sont les services de grands brulés. Les résultats n'ont pas permis de démontrer une efficacité suffisante du protocole de phagothérapie utilisé dans cette étude. Deux Programmes Hospitaliers de Recherche Clinique (PHRC) essais cliniques multicentriques vont être réalisés en France prochainement. Ils seront très utiles pour apporter des éléments probants, basés sur des études à haut niveau de preuve, d'efficacité de la phagothérapie, données qui manquent à ce jour. De nouvelles préparations de bactériophages anti-Pseudomonas et anti-Staphylococcus devraient être mises à disposition par le biais d'Autorisations temporaires d'utilisation nominatives également courant 2019.