Question écrite n° 1781 :
Coupures d'eau illégales

15e Législature
Question signalée le 29 janvier 2018

Question de : M. Jean-Luc Mélenchon
Bouches-du-Rhône (4e circonscription) - La France insoumise

M. Jean-Luc Mélenchon attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'application des dispositions de la loi interdisant les distributeurs d'eau à pratiquer des coupures pendant toute l'année. Cette pratique est en effet interdite depuis la promulgation de la loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes. Malgré cette loi, certains distributeurs privés continuent de pratiquer des coupures d'eau comme mesure de rétorsion envers des ménages en situation d'impayés. Ainsi, le 13 juin 2017, Véolia a été condamné par le tribunal d'instance de Lens à verser 4 000 euros de dommages et intérêts à un homme d'Hénin-Beaumont allocataire du RSA pour avoir posé une lentille ralentissant son débit d'eau. La SAUR a été condamné pour la même raison le 17 aout 2017 à verser 9 000 euros de dommages et intérêts. Depuis 2015, une quinzaine de décisions de justice vont dans ce sens, reconnaissant la pose de lentilles réduisant le débit d'eau des usagers comme équivalent à une coupure. La fondation France Libertés avait, après la mise en application de la loi, collecté pas moins de 1 200 témoignages de coupures d'eau. La question de l'application de cette loi se pose donc pleinement. La fondation Dannielle Mitterrand - France Libertés, dans son rapport « Droit international à l'eau et coupures d'eau en France » note que si les opérateurs publics appliquent maintenant la loi, les opérateurs privés, eux, l'ignorent sciemment. Les sommes imposées par les tribunaux en dommages et intérêts à ces opérateurs pour leurs pratiques illégales sont insignifiantes comparé à leur chiffre d'affaire. Il lui demande si le Gouvernement envisage des mesures pour renforcer les sanctions contre les entreprises privées qui ignorent sciemment la loi. Il semble que la meilleure garantie pour son application soit la gestion publique de la distribution d'eau. Il voudrait savoir si le Gouvernement souhaite inciter les collectivités à privilégier ce mode de gestion.

Réponse publiée le 27 mars 2018

L'article 19 de la loi nº 2013-312 du 15 mars 2013, dite loi « Brottes », en modifiant l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles a interdit les coupures d'eau pour impayés à toute époque de l'année, pour l'ensemble des résidences principales, sans conditions de ressources, alors que cette interdiction était jusque-là réservée aux familles en difficulté bénéficiant ou ayant bénéficié du Fonds de solidarité pour le logement (FSL). En l'état actuel des textes, et comme l'ont confirmé les jurisprudences rendues par la cour d'appel de Limoges le 15 septembre 2016, le tribunal d'instance de Lens le 13 juin 2017 et le tribunal de grande instance de Nanterre le 17 août 2017, la réduction de débit d'eau n'est pas non plus autorisée. Ces interdictions s'appliquent aux entreprises privées en délégation de service public comme aux collectivités gérant directement la distribution de l'eau. La Constitution du 4 octobre 1958, dans son article 72, établit que « les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon. Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences. » L'article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) pose le principe d'une compétence obligatoire des communes en matière de distribution d'eau potable. Le choix du mode de gestion du service de distribution d'eau potable relève donc de la libre administration des collectivités concernées. Les collectivités qui ont fait le choix de confier à un opérateur privé la mission de distribution de l'eau potable restent néanmoins maîtres d'ouvrage et définissent le cahier des charges de la mission confiée à l'opérateur. La collectivité contrôle et vérifie que l'opérateur remplit sa mission conformément à la loi et au contrat passé entre les deux parties. Elle peut donc sanctionner l'entreprise en cas de non-respect des engagements pris et notamment de coupures ou réductions illégales de débit d'eau.

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Mélenchon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Eau et assainissement

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 29 janvier 2018

Dates :
Question publiée le 10 octobre 2017
Réponse publiée le 27 mars 2018

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