15ème législature

Question N° 17973
de Mme Emmanuelle Ménard (Non inscrit - Hérault )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Persécution des chrétiens en Algérie

Question publiée au JO le : 19/03/2019 page : 2522
Réponse publiée au JO le : 09/04/2019 page : 3272

Texte de la question

Mme Emmanuelle Ménard attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation très préoccupante des chrétiens en Algérie. En effet, l'Algérie est passée du 42e au 22e rang des pays où des persécutions sévissent contre les chrétiens selon l'Index mondial de persécution des chrétiens en 2019. L'ONG Portes Ouvertes recense 125 000 chrétiens dans le pays. L'Église y connait une forte croissance, du fait de conversions nombreuses de musulmans au christianisme. Or des lois promulguées en 2006 restreignent fortement l'exercice des cultes non-musulmans et interdit aux musulmans de quitter l'islam. Selon cette ONG, « les chrétiens sont discriminés et harcelés dans leur vie quotidienne », les musulmans convertis au christianisme sont tout particulièrement visés, vivant dans la crainte d'être accusés de blasphème. Les persécutions prennent de multiples formes et se caractérisent notamment par une pression administrative croissante depuis novembre 2017. Les inspections sanitaires servent effectivement de prétexte pour visiter les églises protestantes et demander leur fermeture. Trois églises dans la wilaya d'Oran ont par exemple été mises sous scellés. De même, une librairie chrétienne a été fermée alors que l'accusation d'impression illégale de bibles et de brochures chrétiennes à l'encontre de son propriétaire a été réfutée par la justice. Dans un communiqué du 18 mai 2018, l'Église protestante d'Algérie (EPA) alerte sur ce phénomène : les mises en demeure de fermeture « continuent à pleuvoir ». De plus, l'existence légale de l'EPA est remise en cause puisque sa demande de réenregistrement en 2013 n'a pas été prise en compte. Sans le travail effectué par cette association, les petites églises locales seront d'autant plus vulnérables face aux autorités administratives. Malgré ce constat alarmant, l'action diplomatique n'est pas sans effet. En juin 2018, trois églises qui avaient été fermées ont ainsi été rouvertes et, en décembre 2018, cinq chrétiens condamnés pour prosélytisme ont été acquittés. Il est donc décisif de maintenir une pression diplomatique à l'égard du pouvoir algérien en faveur des chrétiens. Elle lui demande donc les mesures qu'il compte prendre pour venir en aide aux communautés chrétiennes d'Algérie en danger.

Texte de la réponse

Très attachée au respect de la liberté de religion ou de conviction, telle qu'énoncée notamment à l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et à l'article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966, la France est attentive à la situation de ces droits et libertés fondamentales. C'est sur la base de ces principes que la France évalue la situation des religions en Algérie. Si les conditions de l'exercice des cultes relèvent exclusivement de la compétence des autorités algériennes, celles-ci sont, en effet, liées par leurs engagements constitutionnels et internationaux. La liberté de conscience et d'exercice du culte est garantie par l'article 42 de la Constitution algérienne. Une ordonnance de 2006 fixe les conditions d'exercices des cultes "autres que musulmans". Ces cultes, réunis en "associations à caractère religieux", doivent disposer d'un agrément délivré par le ministère algérien des Affaires religieuses. En outre, l'affectation d'un édifice à l'exercice d'un culte est également soumise à l'avis préalable de l'État algérien. L'Eglise protestante d'Algérie (EPA), qui rassemble notamment les églises protestantes luthériennes et évangéliques à l'échelle nationale, comme l'Eglise catholique, dispose, depuis 2011, d'un agrément des autorités algériennes, lui assurant un exercice libre de son culte. La France connait les difficultés rencontrées par certaines minorités religieuses en Algérie. Les sujets de préoccupation retiennent toute l'attention du ministre de l'Europe et des affaires étrangères qui a demandé aux services compétents du MEAE ainsi qu'à l'ambassadeur de France en Algérie de les prendre en compte dans leurs évaluations et leurs recommandations. La France ne manque pas, en concertation avec ses partenaires de l'Union européenne, d'évoquer cette question avec les autorités algériennes. Le 8 décembre dernier, lors de la cérémonie de béatification de 19 religieux catholiques assassinés entre 1994 et 1996, le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères a rappelé au ministre algérien des affaires religieuses l'attachement de la France au dialogue entre toutes les religions dont cette cérémonie a été le symbole. Le conseiller pour les affaires religieuses du MEAE s'entretient régulièrement avec les responsables religieux musulmans et chrétiens installés en Algérie et s'enquiert de la situation des Églises catholique et protestantes.