15ème législature

Question N° 18194
de M. Jérôme Nury (Les Républicains - Orne )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > produits dangereux

Titre > Problèmes de mise sur le marché de produits alternatifs au glyphosate

Question publiée au JO le : 26/03/2019 page : 2690
Réponse publiée au JO le : 09/07/2019 page : 6373

Texte de la question

M. Jérôme Nury attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les problèmes de mise sur le marché rencontrés par les produits bio de substitution au glyphosate. Le président Macron a indiqué à plusieurs reprises qu'aucune interdiction au glyphosate ne serait prise avant que des produits naturels alternatifs n'existent. Or il s'avère que de tels produits existent mais éprouvent de grandes difficultés à s'implanter sur le marché. L'entreprise bretonne Osmobio a mis au point un désherbant naturel qui pourrait être aussi efficace que les désherbants chimiques mais il reste dans l'impasse. L'ANSES refuse d'accorder sa mise sur le marché, faute de classifications correspondant au contrôle du produit. Ce manque s'explique par l'absence de traduction en droit national de la volonté de l'Europe de développer les produits dits de biocontrôle. En définitive, un produit chimique aurait eu moins de difficultés à obtenir sa mise sur le marché. Il en résulte donc, aujourd'hui, un problème majeur pour commencer à sortir du glyphosate. Si les produits naturels ne peuvent accéder au marché, aucun produit de substitution ne verra le jour, annulant ainsi cette sortie du chimique. Il lui demande ainsi si le Gouvernement est conscient de cette lacune et s'il envisage d'y remédier sérieusement afin de permettre le développement des produits naturels comme alternative au glyphosate.

Texte de la réponse

Dans le but d'atteindre l'objectif d'une réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques de 25 % à l'horizon 2020 et 50 % à l'horizon 2025, une des priorités du Gouvernement est d'amplifier la recherche-développement d'alternatives et la mise en œuvre de ces solutions par les agriculteurs. Dans ce cadre, la loi n° 2014-1170 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt a introduit une définition du biocontrôle dans le code rural et de la pêche maritime. Cette loi, ainsi que celles du 20 mars 2017 relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle et du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, ont introduit pour les produits de biocontrôle figurant sur une liste positive et considérés à « faible risque » des exemptions aux interdictions ou obligations auxquelles sont soumis les produits phytopharmaceutiques (interdictions de remise, rabais, ristournes ou de publicité commerciale, interdictions d'utilisation pour les particuliers ou les personnes publiques dans les lieux ouverts au public…). Dans le cadre de la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché, les produits de biocontrôle bénéficient de délais d'évaluation réduits [6 mois ou 8 mois (si consultation d'un État membre) au lieu de 12] et sont soumis à des taxes plus faibles (2 000 € ou 25 000 € selon le type de produit au lieu de 50 000 € pour un produit conventionnel pour une demande de nouvelle autorisation de mise sur le marché). L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a par ailleurs mis en place une organisation spécifique permettant un traitement prioritaire des dossiers de biocontrôle. Dans le domaine de la recherche, dans le cadre du premier plan Ecophyto, 14 projets ont été financés pour une enveloppe de 2 M€ à travers l'appel à projets « Contribuer à l'essor du biocontrôle ». En 2018, le biocontrôle a constitué un axe spécifique de l'appel à projets national du plan Ecophyto II, lancé en octobre 2018. Le biocontrôle est également l'un des deux grands domaines de la première édition de l'appel à projets Ecophyto-Maturation, opéré par l'agence nationale de la recherche (ANR) et cofinancé par l'agence française pour la biodiversité et l'ANR, lancé en février 2019. Il constitue en outre un des défis identifiés dans le cadre du programme prioritaire de recherche « Cultiver et protéger autrement » (près de 30 millions d'euros de soutien de l'État). La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous est venue renforcer les dispositions existantes en demandant à ce que le plan Ecophyto s'accompagne d'une stratégie nationale de déploiement du biocontrôle et qu'il prévoie la réduction des délais d'évaluation des produits de biocontrôle, tout en veillant à alléger les démarches administratives pour les entreprises concernées. Cette stratégie nationale sera finalisée dans les prochaines semaines. Concernant le produit Osmobio, l'absence de délivrance d'autorisation de mise sur le marché (AMM) par l'Anses ne peut être imputée à une absence de traduction en droit national de la volonté de l'Europe de développer les produits dits de biocontrôle. Au contraire, la notion de biocontrôle est uniquement française et un des axes de la stratégie nationale est de porter sa reconnaissance auprès de la Commission européenne. L'absence d'AMM n'est pas due non plus à une absence de classification correspondant au produit mais à des carences importantes dans le dossier soumis en 2014 par la société à l'Anses, carences non corrigées à ce jour malgré les demandes formulées par l'Anses. Les produits de biocontrôle sont en effet soumis aux mêmes exigences d'évaluation des risques pour l'utilisateur et l'environnement que les produits phytopharmaceutiques contenant des substances obtenues chimiquement, le fait d'utiliser des substances d'origine naturelle n'apportant aucune garantie en matière d'absence de risque. De nombreux produits d'origine naturelle présentent en effet des toxicités élevées et peuvent avoir un effet négatif pour la santé et pour l'environnement. Lors de l'élaboration de la stratégie nationale de déploiement du biocontrôle, la difficulté pour les petites et moyennes entreprises et les très petites entreprises d'élaborer des dossiers complets de demande d'autorisation de mise sur le marché a été clairement identifiée et fait l'objet d'un axe dédié visant à accompagner et encourager ces entreprises à développer de nouvelles solutions de biocontrôle.