Rubrique > sécurité des biens et des personnes
Titre > Impact d'une directive sur les sapeurs-pompiers volontaires
Mme Virginie Duby-Muller interroge M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences graves et irréversibles qu'aurait sur le modèle français de secours la transposition en droit interne de la directive 2003/88/CE concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, par la voie d'un décret exploitant les facultés de dérogations ouvertes par les articles 17 et 22 (opt-out) de cette directive. Le modèle français de secours d'urgence repose sur l'engagement altruiste et généreux des sapeurs-pompiers volontaires (SPV) qui représentent 79 % des sapeurs-pompiers de France. Près de la moitié des États membres de l'Union européenne (France, Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Pologne), dont la France, sont susceptibles de voir leur modèle de secours remis en cause en cas d'application de la DETT - directive européenne sur le temps de travail - aux sapeurs-pompiers volontaires qui en constituent le socle. Cette directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail pourrait être appliquée aux sapeurs-pompiers volontaires, du fait de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, en les considérant non plus comme des citoyens librement engagés, mais comme des travailleurs. Comme le souligne le rapport de la Mission volontariat remis le 23 mai 2018 au ministre de l'intérieur, le volontariat est un engagement altruiste et généreux, il ne peut donc être confondu avec une charge de travail. Si tel était le cas, cela sonnerait la fin de ce système puisque le temps de volontariat serait comptabilisé dans le calcul du temps de travail hebdomadaire autorisé (48 heures) et serait soumis au principe de repos quotidien de sécurité (11 heures). D'une logique d'organisation selon la disponibilité avec des autorisations d'absence conventionnées avec leurs employeurs (pour des formations et des interventions), les SPV passeraient alors à une logique de cumul d'emplois. Cela porterait préjudice tant aux SPV, qu'à leurs employeurs, privés et publics, rendant de fait impossible la conciliation d'un engagement de SPV et d'une activité professionnelle, sachant que 69 % des SPV français sont salariés. Ce serait également préjudiciable pour les services départementaux d'incendie et de secours, qui devraient alors recruter des sapeurs-pompiers professionnels à temps partiel en remplacement des anciens volontaires. Ainsi, l'engagement altruiste et généreux sans but lucratif (avec de simples indemnités horaires et une prestation de fin de service) ferait place à une logique de contractualisation et de droits à pensions de retraite, ce qui aurait de lourdes conséquences pour le statut juridique, fiscal et social des SPV et les finances publiques. La professionnalisation intégrale ne semble également pas envisageable en raison de son impact budgétaire (2,5 milliards d'euros) incompatible avec l'objectif de maîtrise de la dépense et de la dette publiques. La distribution des secours, au quotidien et en temps de crise, ne serait plus assurée dans les mêmes conditions (proximité, rapport coût/efficacité, équité territoriale, capacité de montée en puissance) qu'aujourd'hui, au détriment de la population et de la résilience de notre société. Aussi, elle souhaite connaître son analyse sur cette problématique.