Question écrite n° 18637 :
Lissage de la hausse de la TGAP pour les collectivités vertueuses

15e Législature
Question signalée le 8 juillet 2019

Question de : M. Jean-Pierre Cubertafon
Dordogne (3e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés

M. Jean-Pierre Cubertafon attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les orientations du Gouvernement vis-à-vis des organismes en charge de la gestion des déchets ménagers, et aux évolutions actuellement en œuvre. En effet, il apparaît que la trajectoire affichée pour la progression de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), prévue à l'article 24 de la loi du 28 décembre 2018, risque d'impacter très fortement les collectivités compétentes en matière d'ordures ménagères et, à travers elles, les contribuables assujettis aux prélèvements dédiés (TEOM ou redevance incitative). En l'espèce, la perspective d'accroissement de la TGAP de 17 à 65 euros/tonne enfouie entre 2019 et 2025 représenterait pour de nombreuses collectivités une dépense supplémentaire de plusieurs millions d'euros. Pour beaucoup, cela signifie qu'elles pourraient majorer leurs recettes fiscales d'un montant de l'ordre de 40 euros par foyer fiscal et par an, à une brève échéance. De nombreuses collectivités ont pleinement pris la mesure de l'enjeu environnemental de réduction à la source de la production de déchets et ont approuvé le principe de mise en œuvre d'une redevance incitative. Pour autant, les gains éventuels d'une telle politique en termes d'économies sur les tonnages ne seront atteints qu'à moyen terme. Aussi, l'évolution du montant de la TGAP pourrait avoir des conséquences négatives, à court terme, pour les collectivités et les contribuables dans une période de tension sur la fiscalité. Alors que le projet de loi économie circulaire est en cours d'élaboration, il souhaiterait connaître son avis sur cette question. Il lui demande si un lissage plus important de la hausse de la TGAP est envisageable afin de mieux accompagner les efforts réels de nombreuses collectivités.

Réponse publiée le 3 décembre 2019

La France doit respecter des objectifs importants en matière de réduction de la mise en décharge de ses déchets, la loi pour la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 prévoit ainsi la réduction de la mise en décharge des déchets non dangereux non inertes de 50 % en 2025. De même, la directive européenne du 30 mai 2018 modifiant la directive relative aux déchets fixe comme objectif aux États membres d'atteindre des taux de valorisation sous forme de matière des déchets municipaux de 55 % d'ici 2025, de 60 % d'ici 2030, et de 65 % d'ici 2035. La loi de finance du 28 décembre 2018 prévoyait déjà une trajectoire d'augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes relative à la mise en décharge et à l'incinération des déchets non dangereux à partir de 2021. Pour renforcer cela, la loi de finances 2019 prévoit une réforme substantielle de la fiscalité des déchets visant à rendre le recyclage plus compétitif que l'élimination des déchets et ainsi à crédibiliser l'objectif présidentiel de division par deux de la mise en décharge d'ici 2025. Cette réforme fait suite à une large concertation initiée dès l'automne 2017 avec les collectivités, les associations, les experts, les syndicats et les industriels pendant l'élaboration de la feuille de route économie circulaire. Elle repose sur un « paquet fiscal » à la fois équilibré dans sa montée en charge (la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) ne prenant effet qu'au 1er janvier 2021) et transparent sur son intention qui n'est pas de prendre par surprise les acteurs, et d'augmenter les recettes pour le budget de l'État, mais d'accélérer les performances du recyclage. Cette réforme permet à la fois d'améliorer la gestion des déchets en France et de faire la démonstration que la fiscalité écologique peut être acceptable et efficace. En réalité, l'impact d'une hausse de 24€, différentiel visé de TGAP d'ici à 2025 par rapport à la trajectoire existante, la tonne enfouie de déchets pour un Français moyen dont la production d'OMR (ordures ménagères résiduelles) par an est de 270 kg, enfouis pour 30 %, serait d'environ 2€ par an. La loi de finances 2019 prévoit une réforme globale de la fiscalité déchets pour inverser la tendance avec une hausse de la TGAP telle que le coût moyen de l'élimination des déchets devienne supérieur de 10€/t au coût moyen de leur recyclage d'ici 2025. En parallèle, la proposition prévoit de donner de nouvelles capacités financières aux collectivités pour investir et pour s'adapter en allégeant la pression fiscale sur les activités de tri, de recyclage et de prévention des déchets : - Le taux de la TVA pour les opérations de prévention, de collecte, de tri et de valorisation matière effectuées dans le cadre du service public de gestion des déchets sera réduit à 5,5 %. - Un abattement de 50 % de la TGAP acquittée pour la valorisation énergétique à haut rendement sera appliqué aux refus de tri provenant de centres de tri performants. Le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire qui est actuellement discuté au Parlement contribue, en renforçant le rôle des filières à responsabilité élargie des producteurs et en incitant plus fortement à la collecte séparée des déchets et à l'incorporation des matériaux issus du recyclage dans la production industrielle, à faire baisser la quantité d'ordures ménagères résiduelles. Un autre levier pour réduire cette quantité est à la disposition des collectivités pour réduire la quantité d'ordures ménagères résiduelles, c'est la mise en place d'une tarification incitative. Cette tarification peut prendre la forme d'une redevance pour l'enlèvement des ordures ménagères, qui permet de faire payer au citoyen la part exacte du coût de gestion de ses déchets. De plus, il a été introduit il y a quelques années la possibilité pour les collectivités d'introduire une part incitative dans la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Cette possibilité accordée aux communes permet d'instaurer une phase transitoire facilitant l'appropriation par les citoyens d'une fiscalité tenant compte de la quantité de déchets produits, tout en rendant l'estimation de la part de déchets produits plus simple. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe ainsi un objectif de 25 millions d'habitants qui doivent être couverts par un dispositif de tarification incitative en 2025. Son déploiement doit effectivement être soutenu. Dans ce contexte, la loi de finance du 28 décembre 2018 a inscrit de nouvelles mesures permettant de faciliter sa mise en œuvre par les collectivités territoriales. L'article 1522-bis du code général des impôts prévoit désormais que les collectivités qui fusionnent en établissement public de coopération intercommunal puissent disposer de 5 ans pour expérimenter la tarification incitative sur une part seulement de leur territoire, avant son extension (ou non) à toutes les communes de l'établissement public. L'article 1641 du même code prévoit également que les frais de gestion prélevés par l'État sur la taxe sur l'enlèvement des ordures ménagères soient abaissés de 8 à 3 % durant les 5 premières années de mise en place de la tarification incitative. Le Gouvernement compte ainsi sur l'ensemble des dispositions législatives adoptées et en cours d'examen pour permettre aux collectivités qui auront mis en place les dispositions en matière de collecte et de tri appropriées de ne pas voir leur fiscalité augmenter fortement à compter de 2021.

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Cubertafon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès de la ministre)

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 8 juillet 2019

Dates :
Question publiée le 9 avril 2019
Réponse publiée le 3 décembre 2019

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