Question écrite n° 19190 :
Fichage des « gilets jaunes » dans les hôpitaux parisiens

15e Législature

Question de : M. Sébastien Chenu
Nord (19e circonscription) - Non inscrit

M. Sébastien Chenu alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le fichage des « gilets jaunes » par l'AP-HP. Face à l'évidence des preuves, l'AP-HP est enfin sortie du déni et admet que des patients « gilets jaunes » ont fait l'objet d'un fichage par les hôpitaux parisiens. Un fichier créé en 2015 pour faciliter l'identification des victimes d'attentats a été détourné de sa fonction initiale et utilisé pour recenser les « gilets jaunes » admis dans les hôpitaux. Les patients blessés lors des manifestations des « gilets jaunes » ont fait l'objet d'une inscription sur un fichier nominatif indiquant leur nom, adresse, numéro de téléphone et même la nature de leurs blessures. Ces données médicales ont pu être consultées par les services des ministères de l'intérieur, de la justice et des affaires étrangères comme le permet le décret « relatif au système d'infirmation d'identification des victimes » du 9 mars 2018. Il s'agit d'un scandaleux fichage politique et d'une atteinte grave au secret médical. Aucun patient n'a été averti qu'il faisait l'objet d'un tel fichage. Il est inacceptable que des services administratifs demandent à des médecins hospitaliers de participer à une forme de délation en violation complète du secret médical et sans qu'aucun des 17 chefs de services d'urgence de la région parisienne n'ait osé dénoncer l'opération. On assiste à une dérive dangereuse dans laquelle les hôpitaux deviennent des centres de tri de et de renseignement de la police. Qui a été à l'origine de la mise en œuvre de ce fichier ? S'agit-il du ministère de l'intérieur ? Il lui demande enfin ce que sont devenues les données collectées dans ce fichier et qui y a eu accès.

Réponse publiée le 9 juillet 2019

La mise en place de l'outil SI-VIC au niveau national a été validée afin de permettre l'identification et le suivi des victimes prises en charge par le système de santé. Les principaux objectifs de SI-VIC, autorisé dans le cadre de la délibération de la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) n° 2017-321 du 7 décembre 2017, sont les suivants : - assurer le dénombrement des victimes dans les établissements de santé afin de caractériser l'impact de l'évènement sur les capacités des établissements de santé, - informer les familles et les proches sur le lieu d'accueil des victimes notamment dans le cadre de la cellule interministérielle d'aide aux victimes (CIAV), - assurer l'identification et le suivi des victimes prises en charge dans le système de soins, alimenter la liste des victimes établie par le ministère de la justice à la demande du Procureur afin qu'elles puissent bénéficier de leurs droits. Ce système d'information ne doit en aucun cas contenir des données médicales ou sensibles. Les violences urbaines survenues lors des manifestations du 1er décembre 2018 ont engendré un nombre important de blessés, avec un impact significatif sur l'organisation de l'offre de soins, identifié tardivement. Aussi, afin d'éviter l'identification tardive d'un impact sanitaire pouvant perturber l'offre de soins, l'activation de SI-VIC a été réalisée par les agences régionales de santé (ARS), les week-end des 8 et 15 décembre 2018, à la demande du ministère des solidarités et la santé. Ce dispositif a permis de quantifier l'impact du nombre de blessés sur l'offre de soins et permettre d'anticiper la mise en place, le cas échéant, des mesures de régulation des flux de blessés ou de renforcement capacitaire dans les établissements de santé. En fonction des circonstances locales et des besoins des acteurs de santé, un évènement SI-VIC a pu être créé à l'initiative des ARS ou des SAMU, toujours pour poursuivre l'objectif de dénombrement et de gestion des flux de blessés. Comme pour tout type d'évènement pouvant engendrer des conséquences sur le système de santé, l'utilisation de SI-VIC est donc légale. Le décret du 9 mars 2018 prévoit que les agents du ministère de l'intérieur ont accès aux données de SI-VIC dans la stricte mesure où elles sont nécessaires à l'exercice des missions qui leur sont confiées. L'autorisation de la CNIL précise les conditions de ces accès aux données. Aussi, dans le cadre des attentats et au sein de la CIAV, le ministère de l'intérieur peut accéder aux données de SI-VIC. Il s'agit ici d'une autorisation exceptionnelle donnée aux agents des directions nationales de police judiciaire, habilités, nommément désignés et participant à la CIAV (activée uniquement en cas d'attentat). Pour tous les autres cas de figure, le ministère de l'intérieur n'a pas accès aux données, ni à l'outil SI-VIC. Le ministère de la santé lui fournit exclusivement des bilans quantitatifs concernant le nombre de victimes prises en charge dans les établissements de santé concernés. En conséquence, aucune information nominative concernant la prise en charge de blessés dans le cadre du mouvement des « gilets jaunes » n'a été communiquée, sous quelque forme que ce soit, à des services extérieurs au ministère chargé de la santé. Par ailleurs, concernant le cas particulier de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), une enquête a été diligentée par l'ARS Ile-de-France et l'AP-HP afin de rechercher d'éventuels dysfonctionnements locaux et de s'assurer que les données renseignées dans le dispositif ont été strictement celles prévues. Enfin, des échanges ont eu lieu entre le ministère des solidarités et de la santé avec le Conseil national de l'ordre des médecins concernant le système d'information SI-VIC. Ils ont permis de préciser les objectifs de ce dispositif et de rappeler l'intérêt de celui-ci dans le cadre de la gestion de crises par les acteurs de la santé. Des actions conjointes sont prévues par la suite dans le cadre du développement de ce système d'information.

Données clés

Auteur : M. Sébastien Chenu

Type de question : Question écrite

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Dates :
Question publiée le 30 avril 2019
Réponse publiée le 9 juillet 2019

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