15ème législature

Question N° 19223
de M. Gabriel Serville (Gauche démocrate et républicaine - Guyane )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > outre-mer

Titre > Police - Sur-rémunération arrêt maladie

Question publiée au JO le : 30/04/2019 page : 4007
Réponse publiée au JO le : 17/12/2019 page : 11028

Texte de la question

M. Gabriel Serville interroge M. le ministre de l'intérieur sur la question du maintien de la sur-rémunération des fonctionnaires de police résidant sur le territoire de la Guyane durant leurs congés maladie. En effet, il semblerait que le préfet de la région Guyane ait décidé, par voie d'arrêtés, de suspendre le versement de la majoration salariale de 40 % aux agents faisant l'objet d'un arrêt maladie ordinaire alors même que le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 prévoit expressément son maintien. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui apporter des éléments explicatifs quant à cette situation qui a d'ores et déjà motivé plusieurs recours en annulation des arrêtés précités devant la justice administrative.

Texte de la réponse

Le régime des congés de maladie des fonctionnaires est fixé par l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et précisé par décret du 14 mars 1986. Les fonctionnaires actifs de la police nationale sont soumis à des règles dérogatoires à ce droit commun en application de l'article 19 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité. Ainsi, le décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale prévoit en son article 39 que « les fonctionnaires actifs des services de la police nationale placés en congé de maladie conservent pendant une durée d'un an l'intégralité de leur traitement auquel s'ajoutent les indemnités dont la liste est fixée par arrêté interministériel ». Cet article déroge partiellement aux dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 précitée en tant qu'il allonge de trois mois à un an la conservation intégrale du traitement et permet d'ajouter, outre la garantie du traitement, du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence, une série d'indemnités fixées par arrêté. Aucun arrêté n'a toutefois été pris sur le fondement de cette disposition. Cependant, l'article premier du décret n° 2010-997 du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés dispose que « le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 […] est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congés pris en application de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, des 1°, 2° [congé de maladie ordinaire] et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée [...] ». Le décret pose ainsi le principe du maintien des primes et indemnités, en cas de congés de maladie ordinaires, dans les mêmes conditions et sur les mêmes périodes que le traitement. Une circulaire du 22 mars 2011 de la direction générale de l'administration et de la fonction publique apporte des précisions sur les modalités d'application du décret du 26 août 2010. S'agissant du cas particulier de l'indemnité de vie chère, l'article 3 de la loi du 3 avril 1950 concernant les conditions de rémunération et les avantages divers accordés aux fonctionnaires en service dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane et de La Réunion dispose qu'« une majoration de traitement de 25 % est accordée, à partir du 1er avril 1950, à tous les fonctionnaires des départements considérés ». Les décrets des 22 décembre 1953 et 28 janvier 1957 prévoient que les fonctionnaires de l'Etat en service dans des départements d'outre-mer se voient attribuer un complément à la majoration de traitement prévue à l'article 3 précité de 5 % en 1953 puis de 15 % à partir de 1957. L'effet combiné de ces dispositions permet d'accorder une majoration de traitement de 40 % aux fonctionnaires affectés en Guyane. Cette majoration de traitement a pour objet de compenser l'écart du coût de la vie avec la métropole. La jurisprudence administrative relative aux périodes antérieures à l'entrée en vigueur du décret de 2010 a toujours considéré que les compléments de rémunération outre-mer étaient liés au service effectif. Pour le Conseil d'Etat, ces compléments de rémunération apparaissent comme étant destinés à compenser les charges liées à l'exercice effectif des fonctions outre-mer, ce qui suppose la résidence locale. Cette position est réaffirmée dans des arrêts récents, postérieurs au décret de 2010. Ainsi, dans une décision n° 356171 du 14 novembre 2012, le Conseil d'Etat a considéré qu'il résulte «[…] de la combinaison de ces dispositions qu'un fonctionnaire en congé de maladie ordinaire [...] conserve, outre son traitement ou son demi-traitement, l'indemnité de résidence et le supplément familial de traitement, le bénéfice de la totalité ou de la moitié des indemnités accessoires qu'il recevait avant sa mise en congé, à l'exclusion de celles qui sont attachées à l'exercice des fonctions ou qui ont le caractère de remboursement de frais ; que la majoration de traitement accordée aux fonctionnaires en service dans les départements d'outre-mer sur le fondement de la loi du 3 avril 1950 et des textes qui l'ont complétée est liée au séjour de l'agent dans un département d'outre-mer et, par suite, attachée à l'exercice des fonctions [...] ». Dans ces décisions toutefois, les faits examinés étaient antérieurs à l'entrée en vigueur du décret du 26 août 2010. Dès lors, cette jurisprudence ne saurait être utilement opposée à l'application du décret de 2010. Le décret du 26 août 2010 prévoit expressément quatre situations dans lesquelles le maintien des indemnités peut ne pas jouer : régimes indemnitaires qui prévoient leur modulation en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent ; dispositions qui prévoient leur suspension à compter du remplacement de l'agent dans ses fonctions ; primes et indemnités non forfaitaires qui ont le caractère de remboursement de frais ; primes non forfaitaires qui sont liées à l'organisation et au dépassement du cycle de travail. L'indemnité de cherté de la vie ne paraît entrer dans aucune de ces quatre exceptions. Il ne s'agit pas à proprement parler d'une indemnité ayant le caractère de remboursement de frais. D'ailleurs, dans sa décision de 2012 précitée, le Conseil d'Etat ne l'a pas qualifiée de remboursement de frais mais « d'indemnité attachée à l'exercice des fonctions ». Or, le décret de 2010 ne prévoit pas d'exception au maintien du versement pour les indemnités attachées à l'exercice des fonctions. Il ressort de ce qui précède que la jurisprudence administrative posant le principe selon lequel la majoration de 40 % ne joue pas en cas de congé de maladie ordinaire n'a été rendue que dans des affaires portant sur des faits antérieurs à l'entrée en vigueur du décret du 26 août 2010. Les dispositions du décret du 26 août 2010 énoncent le maintien des indemnités, en cas de congés ordinaires de maladie, dans les mêmes proportions que le traitement. Ce principe ne connaît que quatre exceptions et l'indemnité de vie chère ne paraît entrer dans aucune. Dans une décision MLD 2012-35 du 20 février 2012, le Défenseur des droits estime d'ailleurs qu'au regard des dispositions du décret du 26 août 2010, l'indemnité de cherté de vie doit être versée aux agents absents du service, notamment pour congé de maladie. En Guyane, les arrêtés de suspension de la majoration qui avaient été contestés devant le tribunal administratif ont donc été rapportés.