Usage des boues des stations d'épuration
Question de :
Mme Émilie Bonnivard
Savoie (3e circonscription) - Les Républicains
Mme Émilie Bonnivard attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les problèmes qui pourraient résulter de la mise en œuvre de l'article 95 de la loi Égalim prévoyant l'interdiction de toute valorisation à caractère de fertilisant des boues des stations d'épuration. Si cette mesure peut se comprendre pour des stations situées en zone urbaine dense comportant des activités industrielles ou une organisation urbaine susceptible de favoriser la présence de traces de métaux lourds dans les dites boues, une telle disposition, dès lors qu'elle serait mise en œuvre uniformément et sans discernement de l'origine des boues comme des volumes de fertilisants produits, est susceptible de fragiliser des filières courtes de valorisation répondant à des objectifs environnementaux ambitieux. C'est ainsi que l'État a soutenu le développement par les collectivités locales de montagne des filières bois énergie, qui s'appuient d'une part sur la production de plaquettes forestières pour des réseaux de chaleur locaux, mais aussi l'utilisation de résidus forestiers dans des productions de compost nécessitant l'intégration de boues. Ce double usage permet d'éviter le transport vers de grandes unités des boues des stations pour être incinérées, et assure une valorisation mixte des déchets végétaux et boues de stations dans des unités communes qui permet une réduction de l'empreinte carbone et crée des emplois ainsi que des ressources budgétaires pour les collectivités. L'origine des boues des stations d'épuration locales, dans des secteurs où la présence de métaux lourds est sans doute limitée, tout comme la part de celle-ci dans les composts, justifierait une adaptation de cette disposition dans son application afin d'être cohérent avec le soutien financier apporté par l'État à ces projets et face à l'impact environnemental très négatif d'une solution d'incinération de ces boues. Elle souhaite savoir si le Gouvernement entend établir une concertation sur les mesures d'application de cette disposition.
Réponse publiée le 3 décembre 2019
La valorisation des matières organiques en fertilisant est une préoccupation du Gouvernement, à la fois en vue de valoriser au mieux les déchets mais aussi de préserver la qualité et la valeur agronomique de nos sols. Jusqu'à la promulgation de la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGALIM), la possibilité d'utiliser des matières organiques issues d'un processus de traitement de déchets faisant l'objet d'une autorisation au titre de la loi sur l'eau ou au titre du régime des installations classées pour la protection de l'environnement faisait l'objet de deux procédures administratives concomitantes avant une possible réutilisation comme matière fertilisante. La première procédure était instruite au titre du code rural et de la pêche maritime et visait à vérifier que le déchet possédait une composition chimique et une qualité agronomique lui permettant d'être utilisé sans risque comme matière fertilisante. La deuxième procédure consistait à vérifier que la composition physico-chimique du déchet était telle que, compte tenu de sa future utilisation, il pouvait perdre son statut de déchet, c'est-à-dire que le producteur initial du déchet n'était pas redevable, quasiment sans limite de durée, d'éventuelles nuisances ou dommages liés à sa valorisation agronomique. Bien qu'issues de code distincts, les similarités sur l'objectif recherché ont conduit le Parlement à considérer que la procédure d'autorisation au titre des matières fertilisantes valait sortie de statut de déchets, excepté pour les boues de stations d'épuration issues du traitement des eaux usées. En effet, un certain nombre de parties prenantes, dont les organisations professionnelles agricoles, ont considéré qu'il était nécessaire d'obtenir un certain nombre de garanties sur les conditions dans lesquelles cette sortie du statut de déchets pourrait être opérée, car la question de la responsabilité en cas de contamination de produits agricoles due à un épandage de matière fertilisante issue du traitement des eaux usées n'était pas suffisamment précisées à ce stade, notamment depuis la suppression de l'obligation d'abonder un fonds de garantie qui avait été créé il y a quelques années, justement pour permettre une indemnisation des agriculteurs en cas de difficulté avérée. L'article 90 de la loi EGALIM n'a donc pas pour objet d'interdire l'utilisation des boues de station d'épuration comme matière fertilisante, seules ou sous forme de compost. Les conditions dans lesquelles ces boues pourront être valorisées doivent cependant être précisées, à l'issue de la consultation menée par Alain Marois dans le cadre d'une démarche de pacte de confiance, pacte qui doit permettre d'utiliser au mieux les ressources disponibles tout en donnant à l'ensemble des acteurs les garanties qu'ils estiment nécessaire de préserver.
Auteur : Mme Émilie Bonnivard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Déchets
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès du ministre d'État)
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire (Mme Poirson, SE auprès de la ministre)
Dates :
Question publiée le 28 mai 2019
Réponse publiée le 3 décembre 2019