Élevages intensifs de poulets
Question de :
M. Pierre-Yves Bournazel
Paris (18e circonscription) - Non inscrit
M. Pierre-Yves Bournazel interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conditions d'élevage dans la filière avicole. Premier pays agricole de l'Union européenne, la France est appelée à mieux mettre en valeur son patrimoine naturel. En septembre 2018, un rapport de la Commission européenne révèle que, au sein de l'UE, la France est l'un des pays où les conditions de vie des poulets sont les pires, la densité atteignant 42kg/m2. Une réglementation plus stricte des conditions d'élevage de ces animaux permettrait ainsi de remédier au problème de leur maltraitance. Un sondage récent a par ailleurs dévoilé que près de neuf Français sur dix se déclaraient défavorables à l'élevage intensif. L'entassement des poulets, le manque de lumière naturelle et d'espace, l'insalubrité des hangars et la manipulation de leur croissance sont autant d'éléments qui nuisent à leur santé. Or les antibiotiques qui leurs sont distribués sont à l'origine d'intoxications alimentaires chez les consommateurs. L'Autorité européenne de sécurité des aliments indique qu'au-delà d'une densité de 30 kg/m2, les poulets risquent de souffrir de malformations et de troubles du comportement sévères. Dans cette perspective, des organisations de défense des animaux proposent des normes plus exigeantes que se sont engagées à respecter plusieurs entreprises françaises et européennes d'ici 2026. Par ailleurs, une proposition de résolution commune du Parlement européen visant à réduire les souffrances des poulets dans les élevages a été adoptée le 22 octobre 2018. C'est pourquoi il souhaite avoir son avis sur la mise en place d'une densité d'élevage de poulets maximale de 30 kg/m2, sans dérogation possible, en limitant le détassage à un détassage par lot.
Réponse publiée le 30 juillet 2019
Le bien-être des animaux et les conditions d'élevage des animaux de production occupent une place de plus en plus importante parmi les préoccupations des citoyens et consommateurs français et européens. La Commission européenne, sensible à cette évolution des attentes sociétales, est le garant du respect des normes minimales nécessaires à la protection de ces animaux sur le territoire de l'Union européenne (UE). C'est dans ce but que le Conseil de l'UE a émis en 2007, sur proposition de la Commission, la directive 2007/43/CE visant à encadrer les normes minimales relatives à la protection des poulets destinés à la production de viande. Cette directive a été transposée en droit français en 2010. Ainsi, la réglementation prévoit notamment que les poulets disposent d'un accès approprié à des abreuvoirs, à des aliments pour animaux et à une litière sèche et friable. Les locaux doivent eux être ventilés et éclairés pendant les périodes de luminosité. La formation des professionnels est une autre exigence d'importance. Les éleveurs doivent détenir un certificat professionnel individuel d'éleveur de poulets de chair (CPIEPC) justifiant d'un niveau de connaissances en bien-être animal. Les formations doivent traiter des exigences liées aux différentes densités d'élevage et à la physiologie des animaux, des pratiques de manipulations des animaux et de dispense de soins d'urgence ainsi, que des mesures de biosécurité. Par ailleurs, la densité est précisément encadrée. Le respect des conditions précitées implique un taux maximal de 33 kg/m2. Des dérogations prévues par la directive autorisent une densité supérieure, mais limitée à 42 kg/m2 sous réserve du respect de prescriptions supplémentaires. Le propriétaire ou l'éleveur a l'obligation de fournir aux autorités de contrôle la documentation spécifique contenant les informations sur les modalités techniques relatives à l'exploitation et à son équipement. L'exploitation doit être équipée de systèmes de ventilation, de chauffage et de climatisation permettant de maintenir la température, l'humidité et la concentration en CO2 et en NH3 à des niveaux appropriés. La pression de contrôle est alors renforcée et les autorités doivent pouvoir vérifier la faible mortalité et les bonnes pratiques de gestion de troupeau. Le respect de cette directive européenne est primordial pour le ministère de l'agriculture et de l'alimentation qui considère par ailleurs essentiel d'agir pour une plus grande prise en compte du bien-être des animaux d'élevage. Le ministère chargé de l'agriculture a ainsi élaboré en 2016, la première stratégie nationale en faveur du bien-être animal (BEA), qui s'inscrit dans la continuité de la stratégie de l'UE en faveur du BEA. La stratégie française, déclinée en vingt actions prioritaires pour mieux prendre en compte le BEA s'appuie sur la responsabilisation de l'ensemble des acteurs, valorise les bonnes pratiques existantes ainsi que le développement d'alternatives et les atouts de la production française. En 2018, cette stratégie a été renforcée selon les cinq axes que sont : le partage du savoir et l'innovation, la responsabilisation des acteurs, la formation, le contrôle et les sanctions, et enfin l'information des consommateurs. Ce renforcement vise l'ensemble des acteurs du bien-être animal : l'éleveur, le transporteur, le vétérinaire, l'interprofession, l'abatteur et le consommateur. C'est dans cette perspective globale d'amélioration des pratiques que la France, deuxième producteur européen de volailles, est attentive aux conditions d'élevage des poulets de chair. Les poulets de chair, à la différence des poules destinées à la production d'œufs, ne sont pas logés dans des cages, mais dans des bâtiments, au sol, avec selon certains cahiers des charges, des possibilités d'accès à des parcours extérieurs. Les élevages de poulets de chair font l'objet d'une attention particulière au sein de l'ensemble des filières de production, tant auprès des organisations professionnelles que des services de l'État. Leur taille n'est pas limitée en nombre d'emplacements par la réglementation européenne dans la mesure où l'augmentation du nombre d'animaux n'entraîne pas de facto l'apparition de problématiques de bien-être animal ou environnementales. Un suivi plus soutenu des élevages est néanmoins assuré par les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, ainsi que par les services du ministère de la transition écologique et solidaire au titre des installations classées pour la protection de l'environnement. La délimitation d'un chiffre raisonnable maximum semble quant à elle peu réaliste, à la fois parce qu'un consensus européen sur la désignation d'élevage « industriel » semble difficile à atteindre, mais également parce qu'un tel chiffre pourrait induire une distorsion de concurrence pour les éleveurs français au sein du marché unique européen, sans pour autant garantir un niveau plus élevé de bien-être animal. La filière française est en outre confrontée à une demande de prix bas sur la viande de poulet, impliquant une production à faible coût. Ainsi en 2018, 43 % de la viande de poulet consommée provient d'importations. Il est toutefois à noter que la filière volailles de chair s'est engagée, dans le cadre des états généraux de l'alimentation en décembre 2017, à développer la part de la production de certains cahiers des charges comme le label rouge et l'agriculture biologique, qui valorisent des élevages à effectif plus restreint. La filière prévoit ainsi, pour fin 2022, une augmentation de 50 % en production biologique et de 15 % en label rouge. Enfin, devant l'importance de cette production en France, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation soutient également la recherche appliquée dans le but d'améliorer toujours plus les pratiques et d'offrir des solutions d'hébergement toujours plus performantes aux animaux.
Auteur : M. Pierre-Yves Bournazel
Type de question : Question écrite
Rubrique : Élevage
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Dates :
Question publiée le 11 juin 2019
Réponse publiée le 30 juillet 2019