15ème législature

Question N° 20721
de M. Régis Juanico (Socialistes et apparentés - Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > déchéances et incapacités

Titre > Protection juridique des majeurs

Question publiée au JO le : 25/06/2019 page : 5763
Réponse publiée au JO le : 24/12/2019 page : 11410

Texte de la question

M. Régis Juanico attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la récente réforme de la procédure de protection des majeurs. Près d'un million de citoyens font l'objet aujourd'hui de mesures de protection ou font face à des instructions en cours, souvent très longues dans leur traitement, et parfois expéditives dans leur résolution. L'article 1224 du code de procédure civile, modifié par le décret n° 2008-1276 du 5 décembre 2008 - art. 1, confère le statut de « mesures d'administration judiciaires », donc non susceptibles de recours juridictionnel, aux mesures tendant à la communication des pièces du dossier du majeur visé par la protection. Pourtant, certaines de ces mesures prises par le procureur de la République génèrent des effets juridiques à l'égard du majeur : pour exemple, le fait pour un procureur de solliciter un certificat médical circonstancié, rédigé par un médecin inscrit sur la liste que lui-même a établie, bloque automatiquement le règlement des successions. Il arrive fréquemment que pour des questions déontologiques ou de disponibilité du corps médical assermenté dans les déserts médicaux, la réquisition du parquet tombe. Dans ce cas, aucun certificat de carence ne permet l'ouverture d'une mesure, même de classement sans suite. Ces circonstances allongent d'autant la procédure et l'effet anxiogène sur des personnes parfois fragilisées. Elles contribuent aussi à l'engorgement des juridictions, en contradiction avec les recommandations du rapport de Mme Caron-Déglise, avocate générale à la Cour de cassation, sur l'évolution de la protection juridique des personnes. Aussi, il lui demande si le Gouvernement envisage des mesures pour remédier à une situation qui touche aux droits les plus élémentaires des plus fragiles des citoyens.

Texte de la réponse

La société française en général et le Gouvernement en particulier ont à cœur d'accompagner, soutenir et protéger les plus vulnérables de ses membres. A cet égard, la réforme de la protection juridique des majeurs, amorcée par la loi du 5 mars 2007, a constitué une étape importante en faveur de l'autonomie des personnes, du respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne. Cette évolution a été prolongée par les dispositions de la loi n° 2019-22 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice qui permet aux majeurs protégés d'exercer eux-mêmes des droits personnels, tels que le droit de vote ou le mariage, sans sacrifier au besoin de protection que l'altération de leurs facultés justifie, puisque l'information de la personne chargée de leur protection est exigée. La loi de programmation pour la justice a aussi prévu que les demandes de protection juridique émanant de personnes n'appartenant pas à la famille ou aux proches des personnes à protéger adressées aux procureurs de la République devaient être accompagnées d'éléments sur sa situation sociale et pécuniaire, son autonomie ainsi que, le cas échéant, un bilan des actions personnalisées menées auprès d'elle. La transmission au procureur de la République de ces éléments plus précis sur la situation de la personne à protéger lui permettra de saisir le juge des tutelles de demandes recevables, et à ce dernier de leur donner une réponse adaptée à la situation concrète et aux besoins du majeur à protéger. En tout état de cause, si la nécessité de fournir une évaluation globale de la situation des personnes à protéger est incontestable, l'exigence d'un certificat médical pour apprécier l'altération des facultés mentales ou physiques empêchant l'expression de la volonté ne saurait être sacrifiée, y compris en cas de difficulté à inscrire des médecins sur la liste établie par le procureur de la République. En conséquence, les difficultés révélées par les rapports issus d'institutions telles que la Cour des comptes, la mission interministérielle confiée à Anne Caron-Déglise ou la mission d'information parlementaire sont prises en compte par le ministère de la justice, en coordination avec le ministère des affaires sociales, également concerné par la protection juridique des majeurs, avec le souci de mettre en œuvre une protection adaptée à la situation de la personne et efficace.