Question orale n° 20 :
L'élevage en montagne et la menace du loup

15e Législature

Question de : Mme Pascale Boyer
Hautes-Alpes (1re circonscription) - La République en Marche

Mme Pascale Boyer appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'élevage de montagne et les nombreux enjeux auxquels il est de plus en plus confronté. Tout d'abord, les problèmes de financement des indemnités et plus précisément, l'indemnité compensatrice de handicaps naturels (ICHN) destinée aux zones présentant des handicaps naturels et spécifiques. Le financement de cette mesure fondamentale pour les zones de montagne se doit d'être pérennisé pour la fin de programmation 2014-2020. Une forte inquiétude commence à gagner les agriculteurs de ces zones à handicaps, d'autant plus que le règlement du solde des indemnités au titre de l'année 2016 demeure impayé. Une autre menace est celle du danger que représente le loup pour les éleveurs et leurs troupeaux. En 2016, les dégâts dus à la prédation du loup ont atteint un niveau incommensurable en termes de dommages (plus de 2 800 attaques pour environ 10 600 victimes lors de la dernière estimation en juillet 2017) et de coût budgétaire (plus de 26 millions d'euros). Depuis quelques années, la population de loups ne cesse de s'accroître, en 2016, elle a augmenté de 22 %, mais le nombre maximum de spécimens de loups dont la destruction est autorisée, demeure constant et est fixé à 40 pour la période du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018. De plus, cette année comme les précédentes, l'État a publié cet arrêté le 18 juillet 2017, ce qui a représenté 18 jours d'attente pour les éleveurs sans pouvoir défendre leurs troupeaux. Il lui demande s'il envisage de modifier la période sur laquelle porte l'autorisation de l'arrêté, en la déplaçant du 1er juillet au 30 juin à la période du 1er janvier au 31 décembre. Elle souhaite également savoir s'il envisage de faire évoluer les mesures relatives à la protection des cheptels pour garantir le droit des éleveurs de se défendre contre le loup à tout moment.

Réponse en séance, et publiée le 13 décembre 2017

ÉLEVAGE DE MONTAGNE ET PROTECTION CONTRE LE LOUP
M. le président. La parole est à Mme Pascale Boyer, pour exposer sa question, n°  20, relative à l'élevage de montagne et à la protection contre le loup.

Mme Pascale Boyer. Madame la ministre chargée des transports, ma question s'adresse au ministre de l'agriculture et de l'alimentation, mais j'ai auparavant des remerciements à vous faire. La neige est arrivée sur les stations de ski des Hautes-Alpes, pour le plus grand bonheur des futurs vacanciers, et la pluie sur le sud du département, pour celui des agriculteurs haut-alpins. Les réservations des trains de nuit sur la ligne Paris-Briançon sont déjà complètes, ce qui réjouit tous les Haut-Alpins. Nous avons apprécié votre geste, madame la ministre, qui nous permettra de passer des vacances de Noël plus sereines.

Néanmoins, je souhaite faire part, ce matin, au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de certains enjeux auxquels l'élevage de montage est particulièrement confronté. Pour les agriculteurs pluriactifs, dont le nombre est important en montagne et destiné à augmenter en raison de la baisse des revenus agricoles, le projet de loi de finances pour 2018 opère une diminution du revenu extérieur maximum autorisé pour bénéficier de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels – l'ICHN. Le calcul de cette indemnité repose sur l'assiette des revenus de l'exercice n-2. Les agriculteurs n'ont donc pas pu anticiper cette modification pour ajuster la part de leurs revenus agricoles et de leurs revenus extérieurs. Or, pour certains, ces revenus extérieurs sont, en proportion, trop élevés à cause de la baisse des revenus agricoles. La réforme rétroactive de l'ICHN tombe comme une double peine.

Le deuxième enjeu, en montagne, est la présence du loup. Dans mon département, les derniers chiffres sont alarmants : déjà 300 attaques et 1 122 victimes contre 800 environ l'année dernière. La détresse psychologique de nos éleveurs est intense et, au niveau national, le coût des dommages atteint 26 millions d'euros. En 2017, l'arrêté ministériel autorisant les prélèvements de loups à partir du 1er juillet a été publié le 20 juillet ! Pendant trois semaines, les éleveurs ont été dépourvus de tout moyen de protection, alors qu'en plein été, les troupeaux, dans les alpages, sont particulièrement exposés à la prédation.

Tandis que le nouveau plan loup est en cours d'écriture, il est envisagé de déplacer au 1er janvier le début de la période d'autorisation des prélèvements, qui finira donc au 31 décembre. C'est une très bonne chose. En contrepartie, les tirs de défense renforcée ne pourront être autorisés que du 1er janvier au 31 août et les tirs de prélèvement et de prélèvement renforcé du 1er septembre au 31 décembre, afin d'atteindre le nombre de 500 loups sur le territoire. N'y a-t-il pas là une équation mathématico-géographique impossible à résoudre ? Entre 2016 et 2017, on est passé de 300 à 360 loups répartis essentiellement dans les départements de montagne, et la situation y est déjà intenable. Nous n'allons tout de même pas demander à chaque département de prendre son lot de loups pour trouver une solution apaisée…

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des transports.

Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Madame Boyer, je vous prie, tout d'abord, d'excuser le ministre d'État Nicolas Hulot, qui m'a chargée de vous répondre. La protection des loups répond directement aux engagements de la France en faveur de la biodiversité. Néanmoins, le ministre d'État est parfaitement conscient que la présence du loup peut générer des dommages importants pour les éleveurs, confrontés à des attaques sur leurs troupeaux. Dans ce contexte, vous l'avez dit, un nouveau plan national d'action, pour la période 2018-2023, est en cours de préparation avec le ministère de l'agriculture et sera publié fin janvier 2018. L'objectif est de parvenir à un équilibre entre les enjeux écologiques et les activités agricoles en s'appuyant notamment sur le principe de gestion adaptative. Car si le loup reste une espèce strictement protégée, des dérogations sont possibles dès lors que les moyens alternatifs ne sont pas suffisants et que les destructions ne remettent pas en cause l'état favorable de l'espèce.

Les conditions dans lesquelles les préfets peuvent accorder des dérogations sont fixées dans un arrêté interministériel dit cadre qui prévoit la détermination d'un nombre maximum de loups dont la destruction est autorisée. Comme vous le rappelez, la campagne de tirs court actuellement du 1er juillet au 30 juin de l'année suivante. Le nouveau plan prévoit qu'elle corresponde désormais à une année civile, soit du 1er janvier au 31 décembre. L'objectif est double : gérer plus facilement le plafond au cours de l'année et privilégier au maximum les tirs de défense, que l'on sait plus efficaces pour réduire la prédation. Notre ambition est bien d'instaurer dans les territoires les conditions d'une coexistence durable de l'espèce avec les activités humaines.

Données clés

Auteur : Mme Pascale Boyer

Type de question : Question orale

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2017

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