Rubrique > entreprises
Titre > Rôle de la banque publique d'investissement dans la société Arjowiggins
M. Ugo Bernalicis interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur les subventions publiques accordées par la banque publique d'investissement (BPI) au groupe Sequana, dans le dossier Arjowiggins. Le 29 mars 2019, les filiales du papetier Arjowiggins (Arjowiggins papiers couchés et Arjowiggins Creative Papers) ont été placées en liquidation judiciaire. Cette situation est l'archétype de l'échec d'une politique, elle marque un drame social, économique et environnemental qui touche le territoire de la Sarthe, mais plus largement l'ensemble du pays. On parle d'un fleuron français de l'industrie papetière en Europe, seul producteur de papier recyclé en France, qui part en fumée laissant au chômage près de 800 salariés et de nombreux partenaires dans l'incertitude. Il y a de quoi s'alarmer en effet, car ce site est non seulement « viable » au sens économique, mais surtout il s'agit d'une usine récente et moderne avec des savoir-faire des salariés reconnus et appréciés. Pour bien comprendre en quoi le rôle de l'État est en cause dans l'actuelle situation, il faut savoir que le groupe Arjowiggins appartient au groupe Sequana, dont la banque publique d'investissement (BPIFrance) est actionnaire majoritaire à hauteur de 15,4 % du capital et détient 17,2 % des droits de vote. La BPIFrance est présidée par la Caisse des dépôts, institution financière publique française, exerçant pour le compte de l'État et des collectivités territoriales ; il s'agit donc bien de l'État et donc de la responsabilité du Gouvernement. Or, entre la date de cessation des paiements des deux sociétés précitées et l'ouverture des procédures de redressement judiciaire à leur égard, il a été découvert des mouvements de fonds pour un montant total supérieur à 20 millions d'euros, au bénéfice de la société Antalis (deuxième branche au sein du groupe Sequana) et de la société Arjowiggins Sourcing. Aux termes de l'article L. 632-2 du code du commerce, les paiements intervenus à compter de la date de cessation des paiements sont interdits lorsque ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements, ce qui était nécessairement le cas des sociétés Antalis et Arjowiggins. C'est ainsi que légitimement début avril 2019 les avocats des salariés d'Arjowiggins ont mis en demeure Pascal Lebard, PDG de Sequana, et Nicolas Dufourcq, directeur de BPIFrance. Il s'agit ni plus ni moins d'un pillage organisé de la trésorerie des sociétés Arjowiggins, dont la conséquence a été de compromettre les chances de trouver un repreneur pour l'ensemble des activités françaises d'Arjowiggins. Un pillage dont il est essentiel d'interroger le rôle de la BPIFrance principal actionnaire au moment de ces mouvements de fond ! Il faut bien distinguer dans ce dossier les fautes des dirigeants du groupe Sequana, et en particulier de M. Lebard, et celles de la BPI. Les fautes des uns ne sont nullement de nature à exonérer le Gouvernement de ses propres responsabilités dans ce drame industriel, social, économique et écologique. Le Gouvernement, via la voix de la secrétaire d'État s'est engagé à faire toute la lumière sur la gestion du groupe Sequana, dont Arjowiggins était une filiale. Aussi, M. le député interroge le ministre sur sa volonté de faire toute la lumière sur la gestion par la BPIFrance de la société Arjowiggins, et notamment sur la responsabilité du Gouvernement dans le contrôle sur l'utilisation des aides accordées par le BPI à ce groupe. En outre, il souhaite savoir si le ministre va saisir l'agence française anticorruption (AFA) sur le dossier Arjowiggins compte tenu des montants en cause et du rôle de la BPIFrance en tant qu'actionnaire majoritaire, au titre de la détection des atteintes à la probité (faits de corruption, de trafic d'influence, de concussion, de prise illégale d'intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme) qui entrent dans son champ de compétence.