15ème législature

Question N° 21635
de M. François Ruffin (La France insoumise - Somme )
Question écrite
Ministère interrogé > Ville et logement
Ministère attributaire > Ville

Rubrique > urbanisme

Titre > La rénovation urbaine contre les habitants ?

Question publiée au JO le : 16/07/2019 page : 6641
Réponse publiée au JO le : 24/11/2020 page : 8494
Date de changement d'attribution: 20/10/2020
Date de renouvellement: 29/10/2019
Date de renouvellement: 11/02/2020
Date de renouvellement: 02/06/2020

Texte de la question

M. François Ruffin interpelle M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement : la rénovation urbaine doit-elle se faire sans les habitants, voire contre les habitants ? M. le député s'est récemment déplacé dans le quartier Etouvie à Amiens. Il s'agit d'un quartier de grands ensembles, construit loin du centre-ville, à une époque où il fallait loger vite sans forcément loger bien. Ces bâtiments font aujourd'hui l'objet d'un programme de rénovation urbaine, piloté par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) qui prévoit la démolition de trois immeubles, c'est-à-dire 232 logements. Depuis plus de cinq ans qu'ils participent à la « concertation », l'amicale des locataires, le comité de quartier, le centre social et culturel et le café associatif café-touvie s'opposent à ces destructions massives. Ils ont consulté les habitants des trois immeubles, et les chiffres sont sans appel : 99 %, 91 % et 58 % des locataires concernés rejettent le projet. Ils ont alors travaillé à un projet alternatif, comprenant moins de démolitions, mettant le paquet sur la réhabilitation énergétique des bâtiments. Ce projet, écrit par les habitants, a été validé par la ville d'Amiens et par le principal bailleur social du quartier, la SIP. Et pourtant, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine a refusé ce contre-projet ! Au prétexte qu'il ne comprenait pas assez de démolitions ! Face à ce déni de leur parole, les acteurs du quartier ont symboliquement présenté au public, sous forme théâtrale, une proposition de loi : « Interdire la démolition de logements sociaux sans l'accord de la majorité des locataires concernés, sauf en cas de danger pour la santé et la sécurité des occupants et sauf utilité publique argumentée et soumise à débat public ». Car c'est bien une question de démocratie qui se pose, de la démocratie du logement : des fonctionnaires, fussent-ils des experts, peuvent-ils avoir raison seuls contre les locataires, contre les élus locaux, contre les bailleurs ? Peuvent-ils juger, de loin, depuis Paris, sur des généralités statistiques, sur des dogmes urbanistiques, des bonnes décisions à prendre pour une ville, pour un quartier, qu'ils connaissent peu ou pas ? C'est vrai pour Etouvie à Amiens, mais cela vaut pour bien d'autres cités : détruire le bâti ne résout pas les problèmes sociaux. Déplacer des gens ne les rend pas moins pauvres. Il lui demande quelle est la position du Gouvernement sur cette question.

Texte de la réponse

Le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), lancé en 2014, vise la transformation profonde de 480 quartiers prioritaires de la politique de la ville en participant au financement d'opérations portant autant sur l'habitat, que sur les espaces et équipements publics. Les projets de renouvellement urbain, sont portés au niveau de l'intercommunalité et construits par les acteurs locaux. Ces projets font l'objet d'une contractualisation avec l'ANRU et les partenaires en deux étapes : le protocole de préfiguration qui organise la phase d'études et de concertation et la convention qui fixe la participation de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) dans les différentes opérations. Cette démarche contractuelle nécessite l'adhésion de l'ensemble des acteurs locaux et doit répondre aux objectifs de renouvellement visés par le contrat de ville. Le président de l'Établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre construit le projet avec l'ensemble des acteurs locaux (élus, bailleurs, habitants…) et le porte auprès de l'ANRU, qui analyse le respect du règlement général et attribue les concours financiers. Inscrit dans la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville présentant les dysfonctionnements urbains les plus importants et visés par le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) par l'arrêté du 29 avril 2015, le quartier Etouvie bénéficie d'un projet de renouvellement urbain élaboré dans le cadre d'un protocole de préfiguration signé le 16 mars 2017. Lors de cette phase de préfiguration, plusieurs démarches ont permis d'informer et d'associer les habitants : mise en place d'une maison de projet, participation de deux représentants de chaque conseil citoyens de la communauté d'agglomération d'Amiens Métropole au sein des instances de suivi du contrat de ville. Cette phase de préfiguration a abouti à la signature, le 12 mars 2020, d'une convention de renouvellement urbain avec l'ensemble des partenaires qui concourent à l'amélioration des logements et de la qualité urbaine dans ce quartier. La convention de renouvellement urbain est le document central d'un projet de renouvellement urbain dans le cadre du NPNRU. Cette convention décrit l'ensemble des opérations qui participent au renouvellement et qui sont financés par l'ANRU selon les règles du règlement général relatif au NPNRU. Au total, cette convention, signée par les élus locaux, mobilise environ 95 M€ de concours financiers pour les trois quartiers de la métropole d'Amiens visés par le NPNRU (Etouvie, Quartiers nords, Pierre Rollin) dont environ 26 M€ pour le quartier Etouvie qui avait déjà bénéficié d'un projet de rénovation urbaine dans le cadre du programme national de rénovation urbaine (PNRU). Ces financements doivent permettre d'améliorer les conditions de vie des habitants du quartier et l'attractivité du quartier. Les 180 démolitions prévues au quartier Etouvie permettent en effet de réorganiser l'espace public, de créer une voirie et de reconstruire des logements sociaux de qualité tout en offrant aux habitants des trajectoires résidentielles positives en apportant une attention particulière au relogement des ménages. Ces démolitions participent en outre à l'objectif de mixité sociale en permettant de diversifier la typologie des logements proposés.