15ème législature

Question N° 21937
de M. Paul Molac (Libertés et Territoires - Morbihan )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > animaux

Titre > Nécessité de préservation de l'abeille noire

Question publiée au JO le : 30/07/2019 page : 7070
Réponse publiée au JO le : 12/11/2019 page : 9936
Date de changement d'attribution: 05/11/2019

Texte de la question

M. Paul Molac attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur l'importance de préserver l'abeille noire, parfaitement adaptée au climat du nord-ouest du continent européen depuis plus d'un million d'années. Il y a encore un siècle, elle était l'unique espèce d'abeille présente dans les ruches sur le territoire. On la nommait alors « l'abeille commune » puisque parfaitement adaptée à son contexte climatique. Aujourd'hui, elle ne représente plus que 10 % de la population des abeilles mellifères en France. Afin de la sauvegarder, une quinzaine de conservatoires ont été créés dans l'Hexagone, comme sur l'île de Groix et l'île d'Ouessant. Sur ces îles, éloignées du continent, l'abeille noire bénéficie d'un environnement sans pesticide permettant la préservation de l'espèce et de son potentiel génétique. Mais cela n'est pas suffisant car depuis plus de 50 ans l'abeille noire est négligée par le monde apicole lui préférant des espèces plus productives d'importation. En effet, afin d'obtenir des récoltes de plus en plus importantes, les apiculteurs ont sélectionné des abeilles produisant des colonies très populeuses, démarrant rapidement au printemps, essaimant le moins possible et très dociles. Pour preuve, de nos jours, c'est la Buckfast@ (marque déposée) qui, après croisement de différentes espèces en laboratoire, peuple principalement les ruchers. Parce que l'espèce locale qu'est l'abeille noire est un insecte pollinisateur prépondérant dont le rôle écologique en faveur de la préservation de la biodiversité et de l'environnement est primordial, il est nécessaire qu'une reconnaissance juridique puisse protéger les zones au sein desquelles se trouvent les conservatoires qui lui sont dédiés en ce sens que les territoires concernés sont exposés à l'hybridation et à la transmission de maladies lorsque des apiculteurs voisins optent pour un élevage d'espèces importées. Cette action est d'autant plus importante que le mode de fécondation des abeilles est très spécifique. Elle se déroule dans les airs avec des bourdons qui cherchent, tour à tour, la reproduction. La reine, quant à elle, a ce pouvoir de conserver leurs spermatozoïdes toute sa vie, rendant la fécondation non maîtrise, même en laboratoire. C'est pourquoi il souhaite savoir si le Gouvernement publiera des décrets de protection afin d'interdire l'implantation et l'élevage d'abeilles importées dans les zones où sont implantés des conservatoires de l'abeille noire, et quelles mesures il prendra, globalement, pour protéger cette espèce et soutenir les actions de conservation pratiquées.

Texte de la réponse

Les pouvoirs publics sont conscients de l'importance de connaître et de protéger la diversité génétique des abeilles présentes en France et plus largement en Europe. L'amélioration de cette connaissance a pris la forme d'un projet conjoint de l'institut national de la recherche agronomique et de l'institut technique et scientifique de l'abeille et de la pollinisation (ITSAP), qui a caractérisé les populations existantes en France, ceci aussi bien du point de vue de leur patrimoine génétique que du point de vue de leur production. Le travail réalisé a mis en évidence que toutes les populations d'abeilles utilisées en France présentent déjà un niveau d'hybridation important à l'exception de celles de l'association conservatoire de l'abeille noire bretonne d'Ouessant. Un cahier des charges a ainsi été rédigé par l'ITSAP et le centre national de la recherche scientifique pour encadrer le travail des conservatoires, de façon à ce que les populations d'abeilles noires soient maintenues en limitant le risque d'hybridation. Des moyens de recherche et d'accompagnement ont ainsi été mobilisés. Cependant, contrairement à d'autres espèces domestiquées identifiées à l'article L. 653-1 du code rural et de la pêche maritime pour lesquelles des mesures de préservation sont possibles, les espèces apicoles ne sont pas couvertes par ces dispositions. Afin de pallier cette absence de reconnaissance, il est nécessaire de modifier la loi. Les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation recherchent le vecteur législatif approprié pour permettre un cadre législatif rénové. Les réflexions se poursuivent afin de concilier développement de l'apiculture et conservation de l'abeille noire. Enfin, des moyens financiers peuvent être sollicités dans le cadre du programme apicole européen, en particulier sur le volet recherche appliquée. La mobilisation des crédits dépend de l'éligibilité de la demande dans le cadre des dispositifs ouverts en France et des priorités liées à une enveloppe budgétaire contrainte. Au niveau international, la France promeut la conservation et l'utilisation durable des pollinisateurs dont l'abeille noire dans le cadre de sa participation à la commission sur les ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture de l'organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) ainsi qu'aux travaux de la convention sur la diversité biologique. Cette protection inclut de fait la préservation de la diversité génétique.