15ème législature

Question N° 21994
de M. Dominique Potier (Socialistes et apparentés - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > droits fondamentaux

Titre > Psychiatrie : droits des personnes malades - Fichier HopsyWeb et fichier FSPRT

Question publiée au JO le : 30/07/2019 page : 7059
Réponse publiée au JO le : 06/08/2019 page : 7411

Texte de la question

M. Dominique Potier alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les conséquences du décret n° 2019-412 paru au Journal officiel le 7 mai 2019. Ce décret, par son article 2, permet le transfert systématique de données d'identification de personnes hospitalisées en soins psychiatriques sans consentement (fichier HopsyWeb) vers le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (fichier FSPRT). Il est donc question ici de mettre en relation d'un côté un fichier visant la facilitation du suivi et de la prise en charge de personnes malades, et de l'autre un outil de lutte anti-terroriste. De ce point de vue, l'article 2 du décret n° 2019-412 présente plusieurs conséquences graves à la fois pour le respect du droit mais aussi pour le bon déroulement des soins nécessaires aux personnes concernées. La CNIL, l'Ordre des médecins, le Syndicat national des médecins, chirurgiens spécialistes et biologistes des hôpitaux publics, le Syndicat des psychiatres des hôpitaux, l'Intersyndicale des praticiens hospitaliers de France, l'Union syndicale de la p sychiatrie et les associations (Santé mentale France, UNAFAM, collectif Schizophrénies, Advocacy France, Argos 2001, FNAPSY) s'accordent pour dénoncer l'impact négatif de ce décret. Il en va d'une inquiétude relative au secret professionnel qui, au-delà de la question du droit, s'il est remis en cause, nuirait à la relation de confiance entre soignant et soigné et donc aux soins. De plus, la législation, par l'article 226-14 du code pénal prévoit déjà pour les professionnels de santé la possibilité d'une entorse au secret médical en cas de danger. L'information des personnes concernées n'est pas envisagée, alors qu'elle est exigée par le RGPD aux articles 12, 13 et 14. De même, l'absence de dispositions pour le droit à l'effacement de ces données pose question. Enfin, la stigmatisation qu'entraîne ce décret par l'idée sous-entendue que psychiatrie rimerait avec dangerosité ne peut que nuire aux patients à la fois dans leur prise en charge et dans leur rapport à la société. En normalisant la mise en relation de la psychiatrie et du terrorisme, ce décret valide des idées reçues qui en plus de mettre au ban les patients, risque de renforcer les dénis de pathologie, le refus des soins par les malades, la culpabilité des familles signant l'hospitalisation de leurs proches. Ainsi, il s'interroge sur le fait que ce décret aille à l'encontre des principes d'inclusion et de solidarité que le Gouvernement se doit de défendre. C'est la raison pour laquelle il lui demande quelles mesures sont envisagées pour garantir le droit des personnes malades et favoriser un bon déroulement de leur processus de soins.

Texte de la réponse

La ministre des solidarités et de la santé est particulièrement attachée au respect des droits des patients, aussi elle a veillé à ce que le décret n° 2019-412 du 6 mai 2019 autorisant les traitements de données à caractère personnel relatifs au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement apporte une solution équilibrée entre préoccupations de sécurité et préservation du secret médical. Aucune nouvelle exception au secret médical n'a été mise en œuvre : le décret s'appuie sur des dispositions du code de la santé publique existantes, qui prévoient l'information du préfet sur les hospitalisations sans consentement. Le dispositif prévu systématise des échanges d'information sur les personnes hospitalisées notamment à la demande du directeur d'établissement. Ces transmissions sont prévues par le code de la santé publique mais les modalités actuelles de cette information ne permettent pas toujours de la réaliser selon des délais utiles. Le Conseil d'Etat, qui a examiné la légalité du texte, a contrôlé l'existence de cette base légale avant de donner un avis favorable à sa publication. Le décret n'autorise en effet que l'échange de données limitées (nom, prénom, date de naissance et département d'hospitalisation) à l'exception de toute autre. De plus, il a été tenu compte de l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) dans la conception du dispositif de raccordement entre les deux applications. Le dispositif d'information des patients a été adapté conformément aux préconisations de la CNIL. Ainsi, le décret du 6 mai 2019, dont la portée se limite à faire évoluer les conditions techniques de l'information du représentant de l'Etat dans le département, s'inscrit dans le respect des principes auxquels le Gouvernement est très attaché.