15ème législature

Question N° 22195
de Mme Valérie Oppelt (La République en Marche - Loire-Atlantique )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Viticulteurs : zones de non-traitement et chartes d'engagement

Question publiée au JO le : 06/08/2019 page : 7251
Réponse publiée au JO le : 29/10/2019 page : 9580

Texte de la question

Mme Valérie Oppelt appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'inquiétude des viticulteurs relativement au projet d'arrêté présenté à la profession agricole, suite à l'annulation par le Conseil d'État le 26 juin 2019 de l'arrêté ministériel du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants. Ce projet d'arrêté rend obligatoire un délai de prévenance d'au moins 12 heures et propose une zone de non-traitement (ZNT) à 10 mètres pour tous les produits autour des espaces attenants aux habitations et bâtiments d'activité avec une réduction possible à 5 mètres sous certaines conditions. Or l'article 83 de la loi EGAlim du 30 octobre 2018 prévoit la mise en place de chartes d'engagement par les utilisateurs de produits phytosanitaires, élaborées dans chaque département en concertation avec les riverains ou leurs représentants, afin de préciser et renforcer les mesures de protection à mettre en place. Les agriculteurs et, en particulier, les viticulteurs, se sont pleinement investis dans l'établissement de bonnes pratiques. Un dialogue s'est instauré avec la population sous l'égide du préfet comme cela se pratique très bien en Loire-Atlantique. La rédaction des chartes d'engagement en concertation avec les préfets départementaux est l'aboutissement naturel de ces échanges conformément à la volonté du législateur. Mais des inquiétudes demeurent avec l'instauration de zones non traitées qui réduiront inéluctablement le potentiel de production agricole dans toute la France alors qu'une solution résiderait dans le retrait total des produits qui nécessitent de telles dispositions. Faire confiance à la profession agricole et aux viticulteurs en particulier est une nécessité. Aussi, elle lui demande quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour éviter d'imposer unilatéralement des zones de non-traitement d'une part, et si les discussions engagées avec la société civile sous l'égide des préfets dans le cadre de la mise en œuvre des chartes prévues par la loi EGAlim seront bien respectées d'autre part.

Texte de la réponse

L'article 83 de la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite loi EGALIM) subordonne, à partir du 1er janvier 2020, l'utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d'habitation à des mesures de protection des personnes habitant ces lieux. De plus, dans une décision du 26 juin 2019, le Conseil d'État a partiellement annulé l'arrêté du 4 mai 2017 qui encadre l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, pour absence de dispositions relatives à la protection des riverains. Le Conseil d'État a enjoint le Gouvernement de prendre les mesures nécessaires dans un délai de six mois. Le dispositif envisagé s'appuie sur la concertation afin de s'assurer que les mesures applicables sont les plus adaptées au contexte local. Selon la loi, ces mesures doivent être formalisées dans des chartes d'engagements faisant l'objet de consultations lors de leur élaboration, avec les riverains ou leurs représentants notamment. Le 9 septembre dernier, le Gouvernement a soumis à la consultation publique, pour une durée de trois semaines, deux projets de textes réglementaires précisant les modalités d'application de la loi. Un décret encadre la procédure d'élaboration des chartes ainsi que leur contenu, tandis que l'arrêté établit des distances de sécurité à respecter entre les zones d'épandage et les zones d'habitation. Les distances sont différentes selon que la culture traitée est dite « haute » (viticulture et arboriculture notamment) ou « basse » (céréales et légumes par exemple). Elles ont été établies sur la base des recommandations de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) dans son avis du 14 juin 2019. Selon ces projets, les distances de sécurité peuvent, lorsque les produits phytopharmaceutiques appliqués ne sont pas les plus préoccupants et lorsque le matériel de pulvérisation utilisé présente une efficacité reconnue pour diminuer la dérive, être réduites dans le cadre des chartes d'engagement, selon les modalités précisées par l'arrêté. Les chartes doivent donc permettre de formaliser les mesures que les utilisateurs s'engagent à prendre lorsqu'ils réalisent un traitement phytopharmaceutique à proximité des habitations, y compris la façon de prévenir à l'avance les riverains et les passants, et le cas échéant de réduire sous conditions les distances de sécurité dans le cadre d'un ensemble de bonnes pratiques. À proximité des habitations, sans limitation de distances, les agriculteurs pourront protéger leurs cultures en utilisant les produits les moins risqués qui sont les produits de biocontrôle et les produits constitués exclusivement de substances de base ou de substances à faible risque, ou en recourant à des alternatives non chimiques telles que le désherbage mécanique. À ce titre, la grande majorité des produits utilisables en agriculture biologique pourront être employés sans limitation de distance. Ce dispositif réglementaire fondé sur les chartes d'engagements et des distances de sécurité vient en complément de l'évaluation des risques conduite par l'Anses dans le cadre des autorisations de mise sur le marché. L'exposition des riverains et des passants est évaluée selon une méthodologie harmonisée développée par l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Elle prend en compte des distances de 3, 5 et 10 m en fonction de situations de traitement réelles. Lorsqu'un risque pour la santé humaine est identifié pour une distance supérieure à 10 m, le produit n'est pas autorisé. Les projets de textes ont également été notifiés à la Commission européenne, pour une durée minimale de trois mois. Une fois cette procédure terminée, les textes issus des consultations seront publiés pour une application à partir du 1er janvier 2020. Le Gouvernement est déterminé à renforcer la protection des populations ainsi que celle des exploitants agricoles, en veillant à la qualité du dialogue entre les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques, les riverains et les élus locaux. Cet objectif fait partie des priorités du plan d'actions sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides, présenté en avril 2018, de même que la réduction de l'utilisation des substances les plus préoccupantes.