15ème législature

Question N° 22259
de Mme Stella Dupont (La République en Marche - Maine-et-Loire )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Développement de la méthanisation

Question publiée au JO le : 06/08/2019 page : 7256
Réponse publiée au JO le : 27/08/2019 page : 7668

Texte de la question

Mme Stella Dupont attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la méthanisation. Ce procédé, qui consiste à produire du gaz non fossile à partir de déchets organiques, bénéficie d'un développement croissant. Disposant déjà de 646 installations au 30 juin 2018, nombre en augmentation de près de 10 % sur un an, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) lui fixe des objectifs encore plus ambitieux. Présentée en janvier 2019 par l'exécutif, elle envisage une part du biogaz dans la consommation totale de gaz des Français de l'ordre de 7 % à l'horizon 2028. Les promesses de la méthanisation sont nombreuses : accès à une énergie renouvelable, diminution de l'utilisation d'engrais chimiques, amélioration du revenu des agriculteurs. Les impacts positifs de ce procédé sont importants. Cependant, des écueils potentiels invitent à la prudence. D'une part, au niveau local, la croissance du nombre d'installations est proportionnelle au nombre de nuisances provoquées, entre odeurs pestilentielles et multiplication des déplacements de camions. Ainsi, selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), une installation de méthanisation de grande taille nécessite le passage de près de dix camions quotidiens, restreignant ainsi le bilan environnemental positif du procédé. D'autre part, l'exemple allemand a démontré certaines de ces dérives. Un développement exponentiel a, outre-Rhin, conduit à l'accaparement des terres agricoles pour la production d'énergie plutôt que l'alimentation, pour compenser le nombre insuffisant de déchets organiques par rapport aux installations disponibles. Enfin, une croissance incontrôlée des méthaniseurs conduirait à réduire la surveillance exercée sur ceux-ci. Or une méthanisation mal maîtrisée peut conduire à l'émission de méthane, un gaz à effet de serre beaucoup plus nocif que le CO2. Ainsi, il convient de favoriser le développement d'une méthanisation raisonnée. À ce titre, elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement pour permettre un développement ambitieux de la méthanisation sans pour autant en occulter les risques.

Texte de la réponse

La méthanisation agricole contribue activement à la politique nationale de développement des énergies renouvelables, et va y contribuer encore plus dans le cadre de la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie, tout en assurant un complément de revenus pour les agriculteurs. Le plan « Énergie Méthanisation Autonomie Azote » vise la création de 1 000 installations de méthanisation agricole d'ici 2020. La France en compte aujourd'hui plus de 400 en fonctionnement. La question de l'approvisionnement des installations de méthanisation est fondamentale pour éviter la concurrence avec les usages alimentaires. Aussi, cette question a été prise en compte dès l'élaboration de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte qui prévoit, à son article 112 modifiant l'article L. 541-39 du code de l'environnement, que : « Les installations de méthanisation de déchets non dangereux ou de matières végétales brutes peuvent être approvisionnées par des cultures alimentaires, dans la limite de seuils définis par décret. Les résidus de cultures associés à ces cultures alimentaires et les cultures intermédiaires à vocation énergétique sont autorisés. » Le décret n° 2016-929 du 7 juillet 2016 pris pour l'application de cet article a été publié le 8 juillet 2016, après une concertation approfondie avec les parties prenantes. Il prévoit que, pour les cultures alimentaires ou énergétiques, cultivées à titre de culture principale, un seuil maximal de 15 % en tonnage brut total des intrants soit fixé pour l'approvisionnement des installations de méthanisation. La politique européenne évolue vers des modèles d'approvisionnement des méthaniseurs en Europe plus durables. Les pays où le biogaz est produit avec une utilisation massive de cultures énergétiques dédiées s'orientent désormais vers la valorisation de davantage de sous-produits et déchets agricoles, rejoignant ainsi le modèle français. La politique européenne encadre également le changement d'affectation des terres, c'est-à-dire les situations dans lesquelles des cultures destinées à la production d'énergie occupent des terres auparavant consacrées aux cultures alimentaires, lesquelles risquent alors d'être déplacées dans des zones non exploitées jusque-là. Concernant le développement des méthaniseurs agricoles, afin d'en accélérer le rythme d'installation, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a doté un fonds de garantie publique, permettant à Bpifrance de distribuer un prêt sans garantie, destiné aux exploitants agricoles, qui, seuls ou en groupe, investissent dans une installation de méthanisation agricole. Il a pour ambition d'accompagner la réalisation de 400 nouveaux projets dans les cinq prochaines années, pour un montant total de financement d'environ 100 millions d'euros. Ce nouvel instrument financier vise à lever un frein identifié dans la concrétisation des projets de méthanisation agricole. Enfin, la professionnalisation des agriculteurs-méthaniseurs est un des axes retenus dans le cadre du plan d'action interministériel pour le développement de la bioéconomie. À ce titre, un certificat de spécialisation « responsable d'une unité de méthanisation agricole », élaboré par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, vient d'entrer en application en mars 2019. La formation sera notamment proposée dans les lycées agricoles disposant d'une unité de méthanisation. Elle devrait contribuer dans la reconnaissance de la crédibilité des projets de méthanisation agricole sur les plans économiques et environnementaux. D'autres actions sont également à l'étude en interministériel dans cet objectif.