15ème législature

Question N° 22340
de Mme Constance Le Grip (Les Républicains - Hauts-de-Seine )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > Fonds alloués par l'AFD à un évènement soutenant le boycott d'Israël

Question publiée au JO le : 06/08/2019 page : 7276
Réponse publiée au JO le : 10/12/2019 page : 10755

Texte de la question

Mme Constance Le Grip alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les risques relatifs à l'éventuelle réédition de « l'université d'été solidaire et rebelle des mouvements sociaux et citoyens ». En effet, l'édition 2018 de cette manifestation, qui s'était déroulée à Grenoble avait fait l'objet de polémiques sérieuses. Cette manifestation avait reçu différents soutiens dont celui de l'Agence française de développement, opérateur de l'État qui « finance, accompagne et accélère les transitions vers un monde plus juste et durable » selon le site internet. Cette agence a accordé, en juillet 2018, une subvention de 1,15 million d'euros pour l'organisation de cette université d'été organisée par un collectif regroupant des ONG françaises mais également des structures plus politiques comme l'Association France Palestine solidarité (AFPS), qui promeut ouvertement le boycott d'Israël, à travers notamment la campagne « BDS » (Boycott, désinvestissement, sanctions). Durant les 5 jours de l'évènement, par exemple, plusieurs ateliers ont été organisés aux discours clairement anti-israéliens, faisant la promotion de la campagne « Boycott désinvestissement, sanction ». Ce mouvement « BDS » déploie sa stratégie dans de nombreux pays (Grande-Bretagne, États-Unis, Belgique, Allemagne...) au moyen d'appels aux boycotts commerciaux, universitaires ou culturels contre l'État d'Israël. Or les militants du boycott d'Israël sont régulièrement condamnés par les juridictions françaises pour provocation à la haine et à la discrimination. Deux arrêts du 20 octobre 2018 rendus par la chambre criminelle de la Cour de cassation font de la France l'un des rares pays à interdire les actions du mouvement « BDS ». Il est donc particulièrement surprenant, voire choquant, de constater que l'Agence française de développement a subventionné un évènement faisant l'apologie de la campagne « BDS ». Le Président de la République a affirmé le 20 février 2019 au dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) que « l'antisionisme est une des formes modernes de l'antisémitisme », et qu'il n'y aurait plus « aucune complaisance à l'égard des pratiques de boycott et du BDS, plusieurs fois condamnées en France, et qui le seront à nouveau. » Les inquiétudes relatives à ce type d'évènement ont étés portées à la connaissance du Gouvernement, notamment par des questions écrites de M. Adrien Morenas, député du Vaucluse, le 24 juillet 2018, et M. Roger Karoutchi, sénateur des Hauts-de-Seine, le 9 août 2018. Elle souhaite connaître la position du Gouvernement en cas de réédition d'un tel évènement et lui demande quelle sera l'attitude des structures publiques, vis-à-vis de celui-ci.

Texte de la réponse

La France est profondément attachée au rôle de la société civile dont celui des ONG, indispensable dans toute société démocratique. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) soutient depuis 20 ans les activités du Centre de recherche et d'information pour le développement (CRID), un collectif d'ONG françaises de solidarité internationale dont le cœur de métier est d'animer des lieux de débat citoyens sur les enjeux internationaux et la solidarité internationale. En juillet 2018, une subvention d'1,15 million d'euros pour la période 2018-2020 a été octroyée sur le programme 209 du ministère de l'Europe et des affaires étrangères par l'Agence française de développement (AFD) au CRID, dans le cadre de son activité de financement des organisations de la société civile (OSC). L'objet de ce financement était la structuration du milieu associatif en matière d'éducation au développement et à la solidarité internationale, qui inclut notamment l'organisation de manifestations publiques. La subvention triennale de l'AFD a ainsi financé plusieurs rencontres inter-associatives aux niveaux local, national et international (notamment le "forum social mondial"), des campagnes de plaidoyer et des publications et n'a pas été ciblée sur "l'université d'été solidaire et rebelle des mouvements sociaux et citoyens" de Grenoble. Le soutien apporté par l'AFD à cet événement porte par ailleurs uniquement sur la logistique et vise à soutenir une coalition d'acteurs que le CRID coordonne et anime sur différents sujets de la solidarité internationale, dont le climat, les questions de développement et d'engagement solidaire. Cette rencontre d'organisations de la société civile française de solidarité internationale n'étant pas réservée aux membres du CRID, l'organisation Campagne BDS (Boycott désinvestissement sanctions) France, porteur de projet sur trois ateliers en 2018, y a participé. Le CRID n'apporte pour sa part aucun soutien financier à l'organisation Campagne BDS. La sélection des projets qui sont financés par la France est effectuée avec le plus grand soin. Les autorités françaises veillent à ce que chaque financement s'inscrive en pleine conformité avec la législation française et en cohérence avec les principes et les valeurs que la France défend. Dans le cadre de ses activités de soutien à la société civile, l'AFD n'endosse ni les positions publiques ni les actions militantes que pourraient initier ses bénéficiaires et veille à garder la neutralité qui s'impose à elle en tant qu'établissement public. Elle se montre vigilante à ce que les bénéficiaires de ses financements ne contribuent pas aux débats ou actions de plaidoyer qui mentionneraient, appelleraient ou encourageraient, de façon directe ou indirecte, des positionnements contraires à la Loi française. Cela a été rappelé par l'AFD au CRID par une lettre en date du 23 août 2018. La France est opposée à tout boycott d'Israël. L'appel au boycott est prohibé en droit français, quelle que soit sa justification ou la cause qu'il entend servir. Le boycott est assimilé à une pratique discriminatoire dans la mesure où celui-ci est motivé par l'appartenance d'une personne ou d'un produit à une nation donnée. Dès lors, l'appel d'individus ou d'acteurs privés (entreprises, associations) à boycotter un Etat est illégal dans la mesure où il constitue une provocation publique à la discrimination.